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10/11/1998 | FRANCE | N°96-41308;96-45857

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 novembre 1998, 96-41308 et suivant


Vu leur connexité, joint les pourvois nos 96-41.308 et 96-45.857 ;

Attendu que M. X... a été engagé, à compter du 14 mai 1962, en qualité d'ingénieur cadre confirmé par la société L'Oréal, selon contrat conclu le 12 septembre 1982 ; que ce contrat comportait, outre le rappel d'une obligation de loyauté et de discrétion pendant la durée du contrat, une clause de non-concurrence valable pendant les 12 mois qui suivraient son départ de l'entreprise, quelle qu'en soit la cause ; que, par une lettre du 23 février 1979 formant avenant au contrat, la durée de cet engagement, a

pplicable dans l'ensemble des pays du Marché commun, a été portée à 24...

Vu leur connexité, joint les pourvois nos 96-41.308 et 96-45.857 ;

Attendu que M. X... a été engagé, à compter du 14 mai 1962, en qualité d'ingénieur cadre confirmé par la société L'Oréal, selon contrat conclu le 12 septembre 1982 ; que ce contrat comportait, outre le rappel d'une obligation de loyauté et de discrétion pendant la durée du contrat, une clause de non-concurrence valable pendant les 12 mois qui suivraient son départ de l'entreprise, quelle qu'en soit la cause ; que, par une lettre du 23 février 1979 formant avenant au contrat, la durée de cet engagement, applicable dans l'ensemble des pays du Marché commun, a été portée à 24 mois, la société L'Oréal s'engageant de son côté à verser au salarié pendant la même période une indemnité mensuelle égale aux 2/3 de ses appointements mensuels ; que M. X... a été licencié pour faute lourde par une lettre du 5 juillet 1994, prenant effet le lendemain et lui reprochant d'avoir pris, par l'intermédiaire de tiers membres de sa famille ou proches, des brevets pour des produits qui, ayant été créés par lui dans le cadre de son contrat de travail, étaient la propriété de son employeur, ces faits étant analysés comme un manquement à l'obligation de loyauté ; que M. X... a saisi la formation des référés de la juridiction prud'homale, une première fois le 16 août 1994, puis une seconde fois le 15 février 1996, pour obtenir une condamnation provisionnelle de la société L'Oréal au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 96-41.308 :

Attendu que la société L'Oréal fait grief au premier des deux arrêts attaqués (Paris, 11 janvier 1996), statuant en référé, de l'avoir condamnée à payer à M. X... une provision à valoir sur ce que lui attribueront les juges du fond, alors, selon le moyen, d'une part, que l'obligation de non-concurrence, telle qu'elle résulte d'une clause de non-concurrence stipulée au contrat, a pour objet et pour effet de prolonger conventionnellement au-delà de la rupture du contrat, dans les limites qu'elle édicte, l'obligation de non-concurrence pesant sur le salarié pendant l'exécution même du contrat ; que l'obligation se poursuit donc après la rupture, sans discontinuité et de façon indivisible ; qu'en conséquence, lorsque le salarié a violé son obligation de non-concurrence pendant le contrat, motivant ainsi son licenciement par l'employeur, celui-ci, qui entend se prévaloir de la clause de non-concurrence, est fondé à invoquer la violation par le salarié de son obligation, pour se libérer de sa propre obligation de verser l'indemnité compensatrice de non-concurrence, ceci indépendamment du prononcé d'une éventuelle sanction disciplinaire, fût-ce le licenciement ; qu'en refusant de prendre en compte la violation de son obligation de non-concurrence par le salarié avant même la rupture, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil ; alors, d'autre part, que la violation de l'obligation de non-concurrence par le salarié résultait en l'espèce de ce qu'il avait fait déposer, par personnes interposées, pendant la durée du contrat, des brevets qui auraient dû appartenir à son employeur et dont l'exploitation commencée avant la rupture du contrat continuait sans solution de continuité, dès le moment de cette rupture ; qu'en refusant de considérer qu'un tel comportement, constitutif de la violation de l'obligation de non-concurrence pendant la durée du contrat, constituait également une violation de cette obligation dès la rupture du contrat, déliant ainsi l'employeur de son obligation financière corrélative, la cour d'appel a encore violé les textes susvisés ; et alors, enfin, que constitue une difficulté sérieuse, exclusive du pouvoir du juge des référés d'accorder une provision, le point de savoir si la violation par le salarié de son obligation de non-concurrence pendant le contrat, laisse subsister son droit à percevoir une indemnité en contrepartie de son obligation de non-concurrence après le contrat ; qu'ainsi la cour d'appel a, en toute hypothèse, violé l'article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que la clause de non-concurrence, étant distincte de l'obligation de loyauté à laquelle le salarié se trouve soumis pendant la durée d'exécution du contrat et, n'ayant pu entrer en application qu'à compter de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a exactement énoncé que les seuls manquements du salarié pouvant, dans le cadre de cette clause, permettre à l'employeur de s'exonérer de son obligation financière étaient ceux fondés sur des faits postérieurs à la rupture ; qu'elle a constaté souverainement que la preuve de tels faits n'était pas rapportée et décidé, sans encourir les griefs du moyen, que, si les dépôts de brevets effectués avant le licenciement, à les supposer imputables à M. X..., pouvaient constituer un acte de déloyauté, que l'employeur avait sanctionné en le qualifiant de faute lourde, ils ne constituaient pas par eux-mêmes des infractions à la clause de non-concurrence, susceptibles de priver l'intéressé du bénéfice de l'indemnité compensatrice ;

Et attendu, ensuite, que la cour d'appel a énoncé que, si l'utilisation qui avait pu être faite des brevets litigieux, au cours de la période durant laquelle s'appliquait la clause de non-concurrence, aurait pu être considérée comme une contravention à cette clause, elle a constaté qu'aucun acte de cette nature n'était établi, qu'elle a pu en déduire que l'obligation de l'employeur au versement de cette contrepartie n'était pas sérieusement contestable ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° 96-45 857 : (sans intérêt) ;

Sur le second moyen du même pourvoi : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-41308;96-45857
Date de la décision : 10/11/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Violation - Faits postérieurs à la rupture - Nécessité .

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Obligation de loyauté - Distinction - Effet

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Obligations du salarié - Obligation de loyauté - Clause de non-concurrence - Distinction - Effet

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Application - Point de départ - Rupture du contrat de travail - Nécessité

La clause de non-concurrence, étant distincte de l'obligation de loyauté à laquelle le salarié se trouve soumis pendant la durée d'exécution du contrat et, n'ayant pu entrer en application qu'à compter de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a exactement énoncé que les seuls manquements du salarié pouvant, dans le cadre de cette clause, permettre à l'employeur de s'exonérer de son obligation financière étaient ceux fondés sur des faits postérieurs à la rupture.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 janvier et, 27 novembre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 nov. 1998, pourvoi n°96-41308;96-45857, Bull. civ. 1998 V N° 484 p. 361
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 484 p. 361

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. Martin.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Merlin.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.41308
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