CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai, du 23 janvier 1998, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de viol, a rejeté sa demande d'annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, du 27 avril 1998, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 78-1, 78-2, 78-3, 78-4, 154, 151, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation des pièces de la procédure ;
" aux motifs que les policiers parisiens ont procédé à l'arrestation de X... en application de l'article 78-2 du Code de procédure pénale, car il correspondait au signalement de l'auteur présumé d'un vol de sac ; que M. Y..., officier de police judiciaire à Cambrai, délégataire d'une commission rogatoire visant l'article 18 paragraphe 4 du Code de procédure pénale, a prescrit à ses collègues de placer X... en garde à vue dès qu'il a été avisé de son arrestation, et en a avisé le magistrat mandant ; que c'est à bon droit que la prolongation de la garde à vue mentionne que X... était à la disposition de M. Y... depuis son placement en garde à vue, et que celui-ci s'est déplacé à Paris pour notifier cette prolongation ;
" alors, d'une part, que l'article 78-2 du Code de procédure pénale n'autorise que le contrôle d'identité dans les hypothèses qu'il édicte, et non les arrestations ; qu'en déclarant valable l'arrestation de X... sur le fondement de ce texte, la chambre d'accusation l'a directement violé ;
" alors, d'autre part, que l'arrestation de X... et sa retenue au commissariat parisien, avant tout contact avec les officiers de police judiciaire de Cambrai, ont constitué une mise en garde à vue de X..., en dehors de toute commission rogatoire délivrée aux officiers de police judiciaire de Paris qui en sont les seuls auteurs, et des dispositions de l'article 63 du Code de procédure pénale ; que cette arrestation, qui a constitué selon la chambre d'accusation elle-même le point de départ de la garde à vue, était donc entachée d'incompétence et d'un grave excès de pouvoir, et devait entraîner l'annulation de la garde à vue et de toute la procédure subséquente ;
" alors que, de surcroît, M. Y..., seul titulaire d'une commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction de Cambrai, n'avait pas le pouvoir de subdéléguer ce mandat à ses collègues parisiens ; que, dès lors qu'il n'a pas procédé lui-même au placement en garde à vue, se bornant, selon la chambre d'accusation elle-même, à " prescrire à ses collègues de le faire, il a effectué une subdélégation illégale de son mandat " ;
" alors, enfin, que la prolongation de la garde à vue qui se déroule, sur commission rogatoire d'un juge d'instruction, dans le ressort d'un autre juge d'instruction ne peut avoir lieu qu'après présentation au juge d'instruction dans le ressort duquel se trouve le gardé à vue, ou, à défaut, par décision motivée de ce dernier ; qu'ainsi, la prolongation de la garde à vue par le magistrat instructeur de Cambrai, incompétent, était doublement irrégulière " ;
Vu l'article 154 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'en vertu dudit texte, lorsqu'un officier de police judiciaire chargé de l'exécution d'une commission rogatoire en dehors du ressort du juge mandant est amené à garder une personne à sa disposition, il doit, avant l'expiration d'un délai de 24 heures, la présenter au juge d'instruction du lieu d'exécution de la mesure lequel peut prolonger la garde à vue d'un nouveau délai dont il fixe la durée, sans que celle-ci puisse excéder 24 heures ; qu'à titre exceptionnel, ce magistrat peut accorder cette autorisation par décision écrite et motivée sans présentation préalable de la personne ;
Attendu que, pour refuser d'annuler les actes de la procédure en raison de l'irrégularité de la garde à vue de X..., la chambre d'accusation se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que X... était gardé à vue à Paris et que la prolongation de la mesure a été accordée par le juge d'instruction de Cambrai, la chambre d'accusation a privé sa décision de base légale ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt précité de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai, en date du 23 janvier 1998 ;
Et pour être jugé à nouveau, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens.