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07/07/1998 | FRANCE | N°95-43443

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 juillet 1998, 95-43443


Attendu que Mme Y... a été engagée à temps partiel le 3 janvier 1990, par la société Edition Karthala, en qualité d'assistante de fabrication ; qu'en 1992, dans le cadre d'une réorganisation, la société a créé un poste à plein temps ; que Mme Y..., candidate à ce poste, ne l'a pas obtenu, l'employeur ayant choisi pour l'occuper une autre employée à temps partiel ; que par la suite, en raison d'un litige concernant les horaires de travail, Mme Y... a été licenciée par lettre du 28 décembre 1992 ;

Sur la première branche du premier moyen :

Attendu que la salari

ée fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de dommages-in...

Attendu que Mme Y... a été engagée à temps partiel le 3 janvier 1990, par la société Edition Karthala, en qualité d'assistante de fabrication ; qu'en 1992, dans le cadre d'une réorganisation, la société a créé un poste à plein temps ; que Mme Y..., candidate à ce poste, ne l'a pas obtenu, l'employeur ayant choisi pour l'occuper une autre employée à temps partiel ; que par la suite, en raison d'un litige concernant les horaires de travail, Mme Y... a été licenciée par lettre du 28 décembre 1992 ;

Sur la première branche du premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que les salariés à temps partiel bénéficient d'une priorité d'embauche pour un emploi de leur catégorie professionnelle à temps plein ; qu'en cas de pluralité de demandes pour un même poste, il appartient à l'employeur de prendre en considération la situation de famille et l'ancienneté de chaque salarié ; que la salariée soutenait que le seul motif de son licenciement était l'embauche à temps plein de Mme X... en ses lieu et place ; qu'en affirmant que le juge ne pouvait pas contrôler la légitimité du choix de l'employeur d'embaucher à temps plein Mme X... plutôt que Mme Y..., et par la suite, en refusant de rechercher si le véritable motif du licenciement n'était pas celui invoqué par Mme Y..., la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au regard des articles L. 212-4-5 et L. 122-14-3 du Code du travail ;

Mais attendu que s'il est exact que les salariés à temps partiel bénéficient d'une priorité d'embauche pour occuper un emploi à temps complet relevant de leur catégorie professionnelle, l'employeur doit, en cas de pluralité de candidatures pour le même emploi, choisir entre les intéressés ; qu'en cas de contestation, il appartient à l'employeur de communiquer au juge les éléments objectifs sur lesquels il s'est appuyé pour arrêter son choix ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que le choix de l'employeur était motivé par des impératifs d'organisation de l'entreprise ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu l'article L. 212-4-3 du Code du travail dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, le contrat de travail à temps partiel détermine la durée hebdomadaire, mensuelle ou annuelle du travail et prévoie, sauf pour les associations d'aide à domicile, mentionnée à l'article L. 241-10 du Code de la sécurité sociale, la répartition du temps de travail à l'intérieur de ces périodes ; que le contrat définit, en outre, les conditions de la modification éventuelle de cette répartition, qui doit être notifiée au salarié au moins 7 jours avant la date à laquelle cette modification doit intervenir ;

Attendu que, pour débouter Mme Y... de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, après avoir constaté que le travail de l'intéressée avait été d'un commun accord réparti sur 4 jours : mardi, mercredi après-midi, jeudi après-midi et vendredi, a énoncé que le contrat de travail prévoyait la possibilité pour l'employeur de modifier l'horaire convenu " si les circonstances le demandent ", que l'exiguïté des locaux justifiait le désir de l'employeur de fixer un mi-temps sur 3 jours, que le refus catégorique et non motivé de Mme Y... ne permettait plus le maintien des relations contractuelles ;

Attendu, cependant, d'abord que la répartition du travail à temps partiel, telle qu'elle doit être prévue, en application de l'article L. 212-4-3, constitue un élément du contrat qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié ;

Attendu, ensuite, qu'une clause du contrat ne peut valablement permettre à l'employeur de modifier l'horaire convenu en prévenant le salarié au moins 7 jours à l'avance qu'à la double condition, d'une part, de la détermination par le contrat de la variation possible, d'autre part, de l'énonciation des cas dans lesquels cette modification pourra intervenir ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la répartition du travail à temps partiel sur 3 jours au lieu de 4 jours constituait une modification du contrat de travail et alors que la clause contractuelle visée par l'arrêt, en accordant à l'employeur un pouvoir discrétionnaire ne correspondait pas aux exigences légales, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a rejeté la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de Mme Y..., l'arrêt rendu le 23 mai 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 95-43443
Date de la décision : 07/07/1998
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° TRAVAIL REGLEMENTATION - Travail à temps partiel - Emploi à temps complet - Demande du salarié - Priorité d'embauchage - Pluralité de candidatures - Obligation de l'employeur.

1° Si les salariés à temps partiel bénéficient d'une priorité d'embauche pour occuper un emploi à temps complet relevant de leur catégorie professionnelle (article L. 212-4-5 du Code du travail), l'employeur doit en cas de pluralité de candidatures pour le même emploi choisir entre les intéressés et, en cas de contestation, il lui appartient de communiquer au juge les éléments objectifs sur lesquels il s'est appuyé pour arrêter son choix.

2° TRAVAIL REGLEMENTATION - Travail à temps partiel - Durée du travail - Répartition - Nature - Portée.

2° TRAVAIL REGLEMENTATION - Travail à temps partiel - Durée du travail - Répartition - Modification - Accord du salarié - Nécessité 2° TRAVAIL REGLEMENTATION - Travail à temps partiel - Durée du travail - Modification - Clause la prévoyant - Validité - Condition 2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification du contrat de travail - Domaine d'application - Travail à temps partiel - Durée du travail - Répartition.

2° La répartition du travail à temps partiel, telle qu'elle doit être prévue en application de l'article L. 212-4-3 du Code du travail, constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié ; ensuite une clause du contrat ne peut valablement permettre à l'employeur de modifier l'horaire convenu en prévenant le salarié au moins 7 jours à l'avance qu'à la double condition, d'une part de la détermination par le contrat de la variation possible et d'autre part de l'énonciation des cas dans lesquels cette modification pourra intervenir.


Références :

1° :
2° :
Code du travail R212-4-3
Code du travail R212-4-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 mai 1995

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1995-03-29, Bulletin 1995, V, n° 116, p. 83 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 jui. 1998, pourvoi n°95-43443, Bull. civ. 1998 V N° 373 p. 282
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 373 p. 282

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Girard-Thuilier.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.43443
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