Attendu, selon les arrêts confirmatifs attaqués, que, le 26 avril 1989, M. X..., agent titulaire de la commune de Gamaches, a été mortellement blessé par la retombée de la benne d'un camion-benne de cette commune alors qu'il en réparait le tuyau de levée ; que sa veuve, Mme X..., a assigné la commune et son assureur, la Compagnie Abeille paix, aux droits de qui se trouve la Compagnie Abeille assurances, en réparation de son préjudice ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt du 9 novembre 1994 d'avoir retenu sa compétence, alors, selon le moyen, que les accidents de véhicule régis par la loi du 31 décembre 1957 sont ceux qui sont provoqués par un engin ayant une fonction de déplacement ; que ne relève pas de cette loi l'accident provoqué par la chute de la benne d'un camion à l'arrêt, le mouvement de la benne étant étranger à la fonction de déplacement de l'engin ; qu'en décidant que constituait un accident de véhicule l'accident provoqué par la chute de la benne sur la tête de Claude X... à un moment où le véhicule était à l'arrêt et la benne immobile et où la victime avait seulement entrepris de réparer la fuite du tuyau du système de levage de la benne la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, après avoir énoncé exactement que la loi du 31 décembre 1957 ne vise pas seulement les accidents de la circulation mais s'applique aux dommages de toute nature causés par un véhicule quelconque, c'est à raison que la cour d'appel en a déduit qu'elle était applicable à l'accident causé par la chute de la benne du camion-benne, peu important que celui-ci ait été à l'arrêt ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu que, pour retenir la responsabilité entière de la commune, l'arrêt du 3 mai 1996 se borne à énoncer que c'est la défectuosité du matériel dont le système de levage de la benne était ancien et démuni de dispositif de sécurité qui est à l'origine de l'accident ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'omission par M. X... de caler préalablement la benne ne constituait pas une faute en relation causale avec le dommage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen, qui, étant de pur droit, est recevable :
Vu l'article L. 211-1 du Code des assurances, ensemble l'article R. 211-8.1 du même Code, dans sa rédaction antérieure au décret du 7 septembre 1993 ;
Attendu que le premier de ces textes, qui prévoit une obligation d'assurance des dommages provoqués par un véhicule terrestre à moteur, a une portée générale ; qu'il s'applique dès lors aux accidents de service régis par les règles du droit commun et dont est victime un agent titulaire d'une collectivité publique, sans que puisse être opposée l'exception prévue au second de ces textes, laquelle avait pour justification l'indemnisation forfaitaire des salariés ou préposés ;
Attendu que l'arrêt du 3 mai 1996 énonce qu'une clause du contrat d'assurance souscrit par la commune auprès de l'Abeille paix exclut la garantie de l'assureur pour les dommages subis pendant leur service par les préposés de l'assuré responsable du sinistre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la portée de cette clause se référant aux termes de l'article R. 211-8.1 du Code des assurances dans sa rédaction alors applicable ne pouvait être que limitée aux dommages relevant de la législation sur les accidents du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt du 9 novembre 1994 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement sur la responsabilité entière de la commune et le recours en garantie contre la compagnie Abeille assurances, l'arrêt du 3 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.