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12/05/1998 | FRANCE | N°94-43480;95-43577

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 1998, 94-43480 et suivant


Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 94-43.480 et 95-43.577 ;

Attendu que Mmes A... et X... et MM. Y..., Z..., B..., D..., E..., F..., G..., H... et C... ont été engagés par la société Florida tubes ; que ladite société ayant été mise en redressement judiciaire le 7 octobre 1988, le tribunal de commerce a arrêté le plan de cession des éléments d'actif corporel de l'entreprise à la société Wavin ; que les intéressés ont été repris par cette dernière société avec laquelle ils ont signé, lors de la réalisation de la cession le 23 mars 1989, un nouveau contra

t de travail ; qu'ils ont été licenciés pour motif économique le 26 juillet 1991...

Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 94-43.480 et 95-43.577 ;

Attendu que Mmes A... et X... et MM. Y..., Z..., B..., D..., E..., F..., G..., H... et C... ont été engagés par la société Florida tubes ; que ladite société ayant été mise en redressement judiciaire le 7 octobre 1988, le tribunal de commerce a arrêté le plan de cession des éléments d'actif corporel de l'entreprise à la société Wavin ; que les intéressés ont été repris par cette dernière société avec laquelle ils ont signé, lors de la réalisation de la cession le 23 mars 1989, un nouveau contrat de travail ; qu'ils ont été licenciés pour motif économique le 26 juillet 1991 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de rappels de divers éléments de leur rémunération ; qu'un premier arrêt a décidé que le paiement d'un treizième mois et d'une prime de vacances était un usage de l'entreprise cédante et qu'un second arrêt a fixé le montant des rappels dus à chacun des salariés ;

Sur le premier moyen du pourvoi dirigé contre le premier arrêt :

Attendu que la société Wavin reproche à l'arrêt attaqué (Agen, 31 mai 1994) d'avoir décidé que la reprise de vingt-et-un des vingt-cinq salariés de la société Florida tubes à l'occasion de la cession du site de Casteljaloux est soumise à l'application de l'article L. 122-12 du Code du travail et d'en avoir déduit qu'ils devaient conserver au sein de la société Wavin les avantages tenant au treizième mois et à la prime de vacances que leur accordait la première société, alors, selon le moyen, qu'il incombe au juge, au regard de l'article L. 122-12 du Code du travail, de rechercher si l'entité qui a été transférée conserve son identité ou la perd à la suite des changements substantiels qui y sont apportés, faisant obstacle à l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ; qu'en estimant qu'elle l'avait conservée, au seul motif de l'identité du site d'exploitation et de la matière première utilisée, et de la reprise de vingt-et-un emplois sur vingt-cinq, sans s'expliquer, ni sur l'importance des investissements réalisés pour adapter le matériel à la fabrication d'un produit différent, ni sur les modifications apportées aux tâches confiées aux salariés repris, avec les changements de qualification qui en résultaient et les formations professionnelles qui leur avaient été données pour y parvenir et sans avoir égard au fait que, les produits nouveaux fabriqués étaient destinés à une clientèle différente, la nouvelle activité excluait toute poursuite ou reprise des marchés antérieurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé et n'a pas répondu aux conclusions invoquant ces changements substantiels, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que lorsqu'en application d'un plan de cession totale ou partielle arrêté par le tribunal de commerce des salariés sont repris par l'entreprise cessionnaire, les contrats de travail de ces salariés sont transmis conformément à l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, alors même que le cessionnaire n'exerce pas la même activité que le cédant, dès l'instant que les éléments d'exploitation cédés constituent une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ;

Et attendu que la cour d'appel qui, répondant aux conclusions, a relevé que la production de tubes plastiques par la société Wavin avait maintenu sur le même site l'activité de production de tubes annelés de la société Florida tubes, caractérisant ainsi le transfert d'un élément d'exploitation constituant une entité économique ayant conservé son identité et dont l'activité avait été poursuivie, a pu décider, peu important les changements intervenus dans la clientèle et les techniques de fabrication, que les contrats de travail des salariés affectés à la branche cédée de l'entreprise s'étaient poursuivis de plein droit avec le cessionnaire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi dirigé contre le premier arrêt :

Attendu que la société Wavin fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle était tenue de maintenir à ses salariés les avantages acquis par ceux-ci au sein de la société Florida tubes concernant le treizième mois et la prime de vacances, alors, selon le moyen, que la poursuite des contrats de travail dans le cadre de l'article L. 122-12 n'implique pas le maintien de tous les éléments du contrat et des avantages qui lui sont attachés, et que le nouvel employeur qui entend procéder à leur modification doit le signifier individuellement aux salariés repris ; qu'en l'espèce, la société Wavin, immédiatement après la reprise de la société Florida tubes, a proposé à chacun des salariés la signature d'un nouveau contrat conclu le 23 mars 989 avec la mention " lu et approuvé ", lequel, à la différence des contrats antérieurement conclus par les intéressés avec la société Florida tubes, lesquels comportaient une clause leur garantissant expressément un treizième mois et une prime de vacances, ne contenait aucune stipulation analogue ; que dès lors, d'une part, en qualifiant d'usage la source d'avantages expressément stipulés dans chacun des contrats individuels de travail conclus avec l'ancien employeur et revendiqués par les salariés comme y trouvant leur origine, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 7 du nouveau Code de procédure civile ; et que dès lors, d'autre part, en ne recherchant pas si la signature d'un nouveau contrat de travail par les salariés repris, ne prévoyant pas certains avantages stipulés dans le contrat antérieur, ne valait pas acceptation de leur suppression, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-12 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure que la société Wavin ait soutenu devant les juges du fond que les contrats de travail qui avaient lié les salariés à la société Florida tubes prévoyaient le paiement d'un treizième mois de salaire et d'une prime de vacances ;

Et attendu, ensuite, que la cour dappel, d'une part, a relevé que les salariés percevaient de manière fixe, constante et générale un treizième mois de salaire et une prime de vacances lorsqu'ils étaient au service de la société Florida tubes ; que, d'autre part, elle a constaté que la société Wavin, au sein de laquelle les contrats de travail des intéressés s'étaient poursuivis par l'effet de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, avait mis fin à cet usage sans le dénoncer au préalable aux salariés et aux institutions représentatives du personnel ; que cette révocation irrégulière étant inopposable aux salariés, la cour d'appel a exactement décidé que le cessionnaire était tenu de maintenir le paiement aux salariés repris des avantages qu'ils avaient acquis au service du premier employeur ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le moyen unique du pourvoi dirigé contre le second arrêt :

(sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 94-43480;95-43577
Date de la décision : 12/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Cession dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire - Plan de cession - Reprise des salariés par le cessionnaire - Article L - du Code du travail - Application - Transfert d'une entité économique autonome conservant son identité - Elément suffisant.

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Plan de cession - Reprise des salariés par le cessionnaire - Article L - du Code du travail - Application - Cessionnaire n'exerçant pas la même activité - Portée 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Continuation du contrat de travail - Conditions - Transfert d'une entité économique autonome conservant son identité - Elément suffisant 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Article L - du Code du travail - Domaine d'application.

1° Lorsqu'en application d'un plan de cession totale ou partielle arrêté par le tribunal de commerce, des salariés sont repris par l'entreprise cessionnaire, les contrats de travail de ces salariés sont transmis conformément à l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, alors même que le cessionnaire n'exerce pas la même activité que le cédant, dès l'instant que les éléments d'exploitation cédés constituent une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Cession de l'entreprise - Continuation du contrat de travail - Effets - Usages - Dénonciation - Opposabilité - Condition.

2° USAGES - Usages de l'entreprise - Contrat de travail - Dénonciation - Effets - Cession de l'entreprise 2° USAGES - Usages de l'entreprise - Contrat de travail - Dénonciation - Opposabilité - Condition 2° USAGES - Usages de l'entreprise - Contrat de travail - Dénonciation - Modalités.

2° La révocation irrégulière d'un usage, faite sans dénonciation préalable aux salariés et aux institutions représentatives du personnel, est inopposable aux salariés dont le contrat de travail s'est poursuivi au sein de l'entreprise cessionnaire par l'effet de l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail.


Références :

1° :
2° :
Code du travail L122-12 al. 2
Loi 85-98 du 25 janvier 1985

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 1994-05-31 et 1995-06-27

A RAPPROCHER : (2°). Chambre sociale, 1996-12-03, Bulletin 1996, V, n° 412, p. 296 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 1998, pourvoi n°94-43480;95-43577, Bull. civ. 1998 V N° 240 p. 182
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 240 p. 182

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Chagny.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, M. Guinard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:94.43480
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