Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 juillet 1995), que M. X..., passager en provenance du Mali, s'est vu refuser, le 21 avril 1993, au contrôle de Roissy, l'accès au territoire français, après établissement d'un procès-verbal pour usurpation d'identité ; que, maintenu en zone d'attente, il a été embarqué à destination de Bamako le 25 avril suivant, l'officier de permanence ayant jugé non probants les documents remis par sa famille en vue d'établir sa présence en France depuis 1971 ; que l'arrêt attaqué a jugé que la juridiction judiciaire n'était pas compétente pour statuer sur la demande de M. X... tendant à l'annulation de la décision du 21 avril 1993 refusant son admission sur le territoire français, les mesures prises à son encontre ne constituant pas une voie de fait ;
Sur la recevabilité du pourvoi principal contestée par la défense : (sans intérêt) ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de M. X... pris en ses trois branches, auquel s'associe le pourvoi incident du GISTI :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel a constaté que la décision de refus d'admission de l'intéressé et son maintien en zone d'attente jusqu'à son embarquement pour le Mali résultait d'une usurpation prétendue d'identité qui avait donné lieu à un procès-verbal et aurait été révélée par une dissemblance physionomique entre M. X... et la photographie du titre de séjour dont il était titulaire, qu'il en résultait que l'acte litigieux ayant porté atteinte à la liberté d'aller et venir de M. X... et à la présomption d'innocence dont bénéficiait celui-ci, ainsi qu'au droit à un procès équitable, était fondé sur une infraction dont la constatation relevait des juridictions pénales, et manifestement insusceptible d'être rattaché à l'exercice d'un pouvoir conféré à l'Administration ; qu'en décidant néanmoins que les éléments constitutifs d'une voie de fait n'étaient pas réunis en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ainsi que l'article 2 du protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et l'article 6 de cette dernière Convention ; alors, d'autre part, que la cour d'appel a relevé, par ailleurs, que par suite d'une information inexacte sur la date de l'audience prévue à l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'avocat de M. X... n'avait pu assister à celle-ci ; qu'en s'abstenant dès lors de tirer les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que M. X... n'avait pas bénéficié des droits garantis tant par l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que par l'article 6 de la Convention précitée et qu'il avait ainsi été victime d'une voie de fait, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées, ainsi que l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ; alors, enfin, qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'appel signifiées les 21 et 28 juillet 1994, lesquelles faisaient valoir que les décisions des 21 et 23 avril 1993 n'avaient pas été remises en copie à M. X..., en violation de l'article 5.3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes et a exactement relevé que la décision de refus d'admission de M. X... sur le territoire français et celle de le maintenir en zone d'attente jusqu'à son embarquement vers son pays d'origine avaient été prises en application des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et du décret du 27 mai 1982, a, par ce seul motif, justement décidé que ces mesures ne constituaient pas des voies de fait ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du GISTI pris en ses deux branches :
Attendu que le GISTI fait également grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'intervention par lesquelles le GISTI faisait valoir que le rapatriement forcé de M. X... le 25 avril 1993 était constitutif d'une voie de fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors, d'autre part, qu'en l'absence de texte l'autorisant expressément, l'exécution forcée d'une décision administrative, dont l'inobservation est assortie de sanction pénale, est constitutive d'une voie de fait lorsqu'elle porte atteinte au droit de propriété ou à une liberté fondamentale ; que, s'il résulte des dispositions de l'article 27 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que l'étranger qui se soustrait ou tente de se soustraire à l'exécution d'une décision de refus d'entrée est punissable d'une peine de 6 mois à 3 ans d'emprisonnement, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 n'autorisait pas l'administration à exécuter d'office sa décision prononçant le refus d'entrée ; que, en décidant néanmoins que le rapatriement forcé de M. X... le 25 avril 1993 n'était pas constitutif d'une voie de fait, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ainsi que l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Mais attendu qu'en relevant que les mesures prises à l'encontre de M. X... n'avaient pas porté atteinte à une liberté fondamentale, dès lors que l'intéressé, non admis sur le territoire français, ne pouvait invoquer le droit d'y circuler librement et qu'une condamnation préalable pour usurpation d'identité ne pouvait conditionner l'application des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la cour d'appel a, à bon droit, rejeté par là même la qualification de voie de fait pour le rapatriement de l'intéressé comme pour les autres décisions prises à son encontre ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident.