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05/05/1998 | FRANCE | N°96-13498

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mai 1998, 96-13498


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 février 1996) que, le 19 novembre 1993, un accord dit " accord pour le développement de l'emploi et une nouvelle dynamique sociale " a été conclu entre, d'une part, Electricité de France et Gaz de France, d'autre part, plusieurs organisations syndicales de salariés ; que, le 3 décembre 1993, le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production (CSC des CMP) d'EDF et de GDF, qui exerce au sein d'EDF et de GDF l'ensemble des attributions d'un comité d'entreprise, a assigné les signataires de cet accord devant le tribunal de gr

ande instance à l'effet d'obtenir que soit constatée la nulli...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 février 1996) que, le 19 novembre 1993, un accord dit " accord pour le développement de l'emploi et une nouvelle dynamique sociale " a été conclu entre, d'une part, Electricité de France et Gaz de France, d'autre part, plusieurs organisations syndicales de salariés ; que, le 3 décembre 1993, le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production (CSC des CMP) d'EDF et de GDF, qui exerce au sein d'EDF et de GDF l'ensemble des attributions d'un comité d'entreprise, a assigné les signataires de cet accord devant le tribunal de grande instance à l'effet d'obtenir que soit constatée la nullité de l'accord et, à défaut, la nullité des clauses de cet accord portant atteinte aux droits et prérogatives des organismes de la filière CMP ; que, le même jour, la Fédération nationale CGT des industries électriques nucléaires et gazières (FNE) a également assigné les signataires de l'accord pour obtenir qu'il soit déclaré nul ;

Sur le pourvoi incident formé par la Fédération CFDT Gaz-Electricité, qui est préalable :

Attendu que la Fédération CFDT Gaz-Electricité fait grief à l'arrêt d'avoir écarté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée, alors, selon le moyen, que le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production comprend l'ensemble des comités à la production de tous les services et de toutes les exploitations chargés, aux termes de l'article 33 du statut national du personnel des industries électriques et gazières, d'étudier et de présenter toutes les suggestions visant à améliorer le rendement du travail ainsi que les conditions de fonctionnement des services et réaliser des économies et, aux termes d'une convention du 8 juillet 1983, des attributions des comités d'entreprise qui ne sont pas confiées par le statut national aux organismes de la filière des commissions du personnel ou aux organismes sociaux prévus à l'article 23 du statut, qu'il n'est donc pas de droit partie à la négociation d'un accord collectif et n'a pas, en conséquence, quel que soit son intérêt à agir, qualité pour en critiquer la validité, que de ce chef, la cour d'appel a donc violé l'article 32 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en outre, que le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production n'a pas mission de veiller au respect du statut du personnel, que de ce chef, la cour d'appel a violé tant les articles 3 et 33 dudit statut que l'article 9 de la convention du 8 juillet 1983 ;

Mais attendu, qu'ayant relevé que le CSC des CMP soutenait, notamment, qu'il aurait dû être consulté préalablement à la signature de l'accord en cause et que l'inobservation de cette obligation légale entachait l'accord de nullité, ce dont il résultait qu'il invoquait un droit qui lui était propre, la cour d'appel en a justement déduit, qu'il avait un intérêt à agir et qualité pour ce faire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la Fédération nationale CGT du personnel des industries électriques, nucléaires et gazières et le CSC des CMP reprochent à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande tendant à ce que soit jugé nul l'accord dit " Accord pour le développement de l'emploi et une nouvelle dynamique sociale " du 19 novembre 1993 et, subsidiairement, à ce que soient annulées les dispositions anti-statutaires de l'accord, alors, selon le moyen, d'une part, que le comité d'entreprise dont les comités mixtes à la production et le CSC des CMP exercent les attributions au sein d'EDF et de GDF est obligatoirement informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise et, notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel, que cette consultation préalable à toute décision est requise avant la signature d'une convention ou d'un accord collectif d'entreprise issu de la décision convergente de l'employeur et d'une ou plusieurs organisations représentatives des salariés, qu'en estimant que l'accord du 19 novembre 1993 avait pu être signé sans que le projet issu de la négociation entre EDF et GDF, d'une part, et les syndicats représentatifs, d'autre part, ait été préalablement soumis pour avis au CSC des CMP, la cour d'appel a violé les articles L. 431-5, L. 432-1, L. 431-1 du Code du travail, 9 de la convention du 8 juillet 1983 relative aux organismes de représentation du personnel d'EDF et de GDF, et 211 de la PERS 873 ; alors, d'autre part, que les attributions consultatives dévolues à la Commission supérieure nationale du personnel en matière de surveillance du respect du statut d'EDF-GDF, de recrutement, de classification et d'avancement, à la sous-commission de la formation professionnelle pour les questions relatives à la formation, et au Comité national d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour les questions ayant des répercussions sur l'organisation du travail, impliquent que ces organismes soient consultés préalablement à la signature par les employeurs et une ou plusieurs organisations représentatives des salariés de tout accord portant sur des matières relevant de leur compétence, qu'en en décidant autrement, la cour d'appel a violé l'article 3 du statut national du personnel des industries électriques et gazières approuvé par le décret du 22 juin 1946, l'article 2111 de la PERS 888 et les dispositions de la PERS 944 ; et alors, enfin, que la décision prise ou la convention ou l'accord collectif d'entreprise conclu sans que le comité d'entreprise, ou d'autres organismes exerçant des attributions consultatives, ait été préalablement consulté sur le projet de décision ou d'accord alors qu'une telle consultation était requise, est entaché de nullité, qu'en décidant par motifs adoptés des premiers juges, le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 431-5, L. 432-1 du Code du travail, 3 du statut national du personnel des industries électriques et gazières, ainsi que l'article 2111 de la PERS 888 et la PERS 944 ;

Mais attendu que, contrairement aux énonciations de l'arrêt attaqué, il résulte de la combinaison des articles L. 431-5 et L. 432-1 du Code du travail que la décision du chef d'entreprise doit être précédée par la consultation du comité d'entreprise quand elle porte sur l'une des questions ou mesures visées par le second de ces textes, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que la décision en cause est une décision unilatérale ou prend la forme de la négociation d'un accord collectif d'entreprise portant sur l'un des objets soumis légalement à l'avis du comité d'entreprise ; que cette consultation doit avoir lieu concomitamment à l'ouverture de la négociation et au plus tard avant la signature de l'accord ; que, cependant, le défaut de consultation du comité d'entreprise, qui peut être sanctionné par ailleurs selon les règles régissant le fonctionnement des comités d'entreprise, n'a pas pour effet d'entraîner la nullité ou l'inopposabilité d'un accord collectif d'entreprise conclu au mépris de ces dispositions et dont la validité et la force obligatoire demeurent soumises aux règles qui lui sont propres ;

Que, par ce motif de pur droit, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les mêmes reprochent encore à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande tendant à ce que soit jugé nul l'accord signé le 19 novembre 1993 par EDF-GDF et certains syndicats de salariés alors, d'une part, que les conventions ou les accords d'entreprise sont négociés entre l'employeur et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise qui doivent être toutes convoquées à toutes les réunions, que l'accord du 19 novembre 1993 prévoit l'engagement d'une " étude " avec les fédérations syndicales signataires en vue de la création d'un fonds d'encouragement à la solidarité, d'une " étude associant l'ensemble des fédérations syndicales signataires " en vue d'améliorer le système de formation, et la préparation par les signataires d'une négociation sur la réduction de la durée du travail, qu'en estimant que cet accord avait pu valablement exclure des réunions ainsi organisées entre les représentants de la direction et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise les syndicats non signataires de cet accord, réunions visant, quelle que soit leur dénomination, à préparer la conclusion d'un ou de plusieurs accords collectifs relatifs aux matières qu'il mentionnait, la cour d'appel a violé les articles L. 132-19 et L. 412-2 du Code du travail, le principe de non-discrimination entre syndicats, et le paragraphe 1-5 du chapitre 1, le paragraphe 2-1 du chapitre 3 et le paragraphe 3 du chapitre 2 de l'accord " pour le développement de l'emploi et une nouvelle dynamique sociale " du 19 novembre 1993 ; alors, d'autre part, qu'en estimant que la participation à l'observatoire national de l'emploi, créé par l'accord aux fins de permettre aux organisations syndicales de contribuer à la préparation, à la mise en oeuvre et au suivi des politiques relatives à l'emploi, avait pu être valablement réservée aux syndicats signataires de l'accord, à l'exclusion des autres syndicats représentatifs dans l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L. 132-15 du Code du travail, l'article L. 412-2 du même Code et le principe de non-discrimination entre syndicats ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a retenu, à bon droit, d'une part, que les dispositions de l'accord relatives à la création d'un fonds d'encouragement à la solidarité et à l'amélioration du système de formation se bornaient à prévoir la réalisation d'études afférentes à ces thèmes sans faire référence à de futures négociations collectives, d'autre part, que celles relatives à la réduction de la durée du travail, qui prévoyaient bien la préparation d'une négociation collective, n'en excluaient pas les organisations syndicales non signataires de l'accord ;

Et attendu, ensuite, que seules peuvent prétendre participer aux organismes paritaires ou aux institutions créés par un accord collectif de travail les organisations d'employeurs et de salariés signataires de cet accord ou celles qui y ont adhéré, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre un accord collectif de branche et un accord d'entreprise ; que c'est, par suite, à bon droit, que la cour d'appel a décidé, qu'en réservant aux signataires de l'accord le droit de participer à l'observatoire national de l'emploi créé par l'accord, celui-ci n'avait pas instauré une discrimination prohibée entre syndicats ;

Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-13498
Date de la décision : 05/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° ELECTRICITE - Electricité de France - Personnel - Représentation des salariés - Conseil supérieur consultatif - Action en justice - Recevabilité - Constatations suffisantes.

1° ACTION EN JUSTICE - Intérêt - Représentation des salariés - Comité d'entreprise - Action en nullité - Accord collectif - Défaut de consultation préalable 1° REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Action en justice - Conditions - Défense d'un droit propre - Constatations suffisantes 1° CONVENTIONS COLLECTIVES - Accords et conventions divers - Accords particuliers - Accord d'entreprise - Action en nullité - Recevabilité - Conditions - Comité d'entreprise - Défense d'un droit propre.

1° Ayant relevé que le Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production d'Electricité de France et de Gaz de France, qui exerce au sein d'EDF et de GDF l'ensemble des attributions d'un comité d'entreprise, soutenait, notamment, qu'il aurait dû être consulté préalablement à la signature de l'accord collectif de travail en cause et que l'inobservation de cette obligation légale entachait l'accord de nullité, ce dont il résultait qu'il invoquait un droit qui lui était propre, la cour d'appel en a justement déduit qu'il avait un intérêt à agir et qualité pour ce faire.

2° CONVENTIONS COLLECTIVES - Dispositions générales - Accord collectif - Accord d'entreprise - Validité - Défaut de consultation du comité d'entreprise - Effet.

2° REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Attributions - Attributions consultatives - Organisation - gestion et marche générale de l'entreprise - Conclusion d'un accord d'entreprise - Consultation - Défaut - Sanction 2° REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Attributions - Attributions consultatives - Organisation - gestion et marche générale de l'entreprise - Conclusion d'un accord d'entreprise - Consultation - Moment 2° REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Attributions - Attributions consultatives - Organisation - gestion et marche générale de l'entreprise - Décision du chef d'entreprise - Obligation de consultation - Etendue.

2° Il résulte de la combinaison des articles L. 431-5 et L. 432-1 du Code du travail que la décision du chef d'entreprise doit être précédée par la consultation du comité d'entreprise quand elle porte sur l'une des questions ou mesures visées par le second de ces textes, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que la décision en cause est une décision unilatérale ou prend la forme de la négociation d'un accord collectif d'entreprise portant sur l'un des objets soumis légalement à l'avis du comité d'entreprise ; cette consultation doit avoir lieu concomitamment à l'ouverture de la négociation et au plus tard avant la signature de l'accord. Cependant, le défaut de consultation du comité d'entreprise, qui peut être sanctionné par ailleurs selon les règles régissant le fonctionnement des comités d'entreprise, n'a pas pour effet d'entraîner la nullité ou l'inopposabilité d'un accord collectif d'entreprise conclu au mépris de ces dispositions et dont la validité et la force obligatoire demeurent soumises aux règles qui lui sont propres.

3° CONVENTIONS COLLECTIVES - Accords et conventions divers - Convention collective de branche - accord professionnel ou interprofessionnel - Organismes paritaires ou institutions créés par convention ou accord - Participation - Exclusion des syndicats non signataires - Discrimination (non).

3° CONVENTIONS COLLECTIVES - Accords et conventions divers - Convention collective de branche - accord professionnel ou interprofessionnel - Organismes paritaires ou institution créés par convention ou accord - Participation - Condition.

3° Seules peuvent prétendre participer aux organismes paritaires ou aux institutions créés par un accord collectif de travail les organisations d'employeurs et de salariés signataires de cet accord ou celles qui y ont adhéré, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre un accord collectif de branche et un accord d'entreprise. C'est, par suite, à bon droit que la cour d'appel a décidé qu'en réservant aux signataires de l'accord le droit de participer à l'observatoire national de l'emploi créé par l'accord, celui-ci n'avait pas instauré une discrimination prohibée entre syndicats.


Références :

2° :
Code du travail L431-5, L432-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 février 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mai. 1998, pourvoi n°96-13498, Bull. civ. 1998 V N° 219 p. 164
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 219 p. 164

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. Terrail.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Frouin.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, M. Brouchot, la SCP Defrénois et Levis, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.13498
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