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30/04/1998 | FRANCE | N°96-80885

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 avril 1998, 96-80885


REJET du pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
agissant en qualité d'exécuteur testamentaire de Y..., veuve de Z..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 15 janvier 1996, qui a ordonné la restitution à A..., d'une sculpture, saisie dans la procédure suivie pour contrefaçon et fraude en matière d'oeuvre artistique et clôturée par une ordonnance de non-lieu.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la suite de sa plainte avec constitution de partie civile du chef

de contrefaçon et fraude en matière d'oeuvre artistique, Y..., veuve d'Z..., a...

REJET du pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
agissant en qualité d'exécuteur testamentaire de Y..., veuve de Z..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 15 janvier 1996, qui a ordonné la restitution à A..., d'une sculpture, saisie dans la procédure suivie pour contrefaçon et fraude en matière d'oeuvre artistique et clôturée par une ordonnance de non-lieu.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la suite de sa plainte avec constitution de partie civile du chef de contrefaçon et fraude en matière d'oeuvre artistique, Y..., veuve d'Z..., a obtenu qu'une statue attribuée à Z..., propriété de A..., soit placée sous main de justice, étant présumée contrefaite en violation du droit moral sur l'oeuvre de l'artiste ; qu'il n'a pas été statué sur sa restitution lors du règlement de la procédure, par une ordonnance de non-lieu, non frappée d'appel ; que A... l'a réclamée ultérieurement par une requête formulée en application de l'article 41-1 du Code de procédure pénale ;
En cet état ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée par le défendeur ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que X..., qui s'est vu reconnaître par les juges du fond la qualité d'exécuteur testamentaire d'Y..., veuve d'Z..., avec saisine immédiate de tout le mobilier composant la succession, pour assurer au profit de la Fondation Y..., en cours de création, la transmission des biens meubles de cette dernière, y compris les contrefaçons par elle obtenues à la suite de décisions judiciaires, s'est opposé en appel à la demande en restitution formulée par A... sans que sa qualité pour agir ait été contestée à ce stade de la procédure ; que la décision attaquée, qui a ordonné la restitution à A... d'une statue sur laquelle Y..., veuve d'Z..., a fait reconnaître ses droits, est présumée porter atteinte aux intérêts de la fondation qui en est légataire et dont X... a la charge ; que son pourvoi contre ledit arrêt ne peut, dès lors, au regard de l'article 567 du Code de procédure pénale, être déclaré irrecevable ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1er du 1er protocole additionnel à cette Convention :
" en ce que l'arrêt attaqué a statué en chambre du conseil, après des débats non publics, sur une demande de restitution d'oeuvre saisie dans le cadre d'une procédure pénale pour contrefaçon artistique ;
" alors qu'aucun impératif de sécurité ni d'ordre public, ni aucune nécessité liée à l'existence même d'une société démocratique ne justifiait qu'une telle procédure, à caractère à la fois patrimonial et pénal, ne soit pas jugée en audience publique ; que l'arrêt attaqué est donc nul en la forme " ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que la cour d'appel a, conformément aux dispositions de l'article 41-1 du Code de procédure pénale, statué en chambre du conseil, alors que l'intéressé, présent à l'audience, n'a émis aucune contestation à ce sujet, et dès lors qu'il ne démontre pas, au demeurant, en quoi il a été ainsi porté atteinte à ses intérêts ;
D'où il suit que le moyen doit être rejeté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 41-1, 593, du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a ordonné la restitution à A... d'une sculpture en bronze placée sous scellé dans le cadre d'une procédure pénale engagée du chef de contrefaçon, et terminée par une ordonnance de non-lieu faute d'en avoir pu identifier les auteurs ;
" aux motifs que A... n'a jamais été entendu dans le cadre de la procédure pénale ; que la restitution n'est pas de nature en l'espèce à créer un danger pour les personnes ou pour les biens, aucune décision statuant sur le fond n'ayant constaté le caractère contrefaisant de l'oeuvre ; que refuser la restitution reviendrait à prononcer une confiscation que seule la juridiction répressive peut prononcer ;
" alors, d'une part, que, aux termes de l'article 41-1 du Code de procédure pénale, il n'y a lieu à restitution lorsque celle-ci est de nature à créer un danger pour les personnes ou pour les biens ; que constitue un danger au sens de ce texte la remise en circulation d'une oeuvre susceptible de constituer un faux et d'être remise sur le marché de l'art au risque de tromper d'éventuels acquéreurs ; qu'en refusant de prendre en compte un tel risque qui était indépendant de la bonne foi de A..., la cour d'appel a violé l'article 41-1 du Code pénal ;
" alors, d'autre part, que, lorsqu'une procédure pénale du chef de contrefaçon s'est terminée par un non-lieu, faute d'avoir pu identifier les auteurs de l'infraction, il appartient à la juridiction saisie, sur le fondement de l'article 41-1 du Code de procédure pénale, d'une requête en restitution de l'oeuvre contestée, de se prononcer sur le risque que peut présenter une telle restitution, et donc éventuellement de se prononcer, en l'absence de toute décision ayant autorité de chose jugée sur ce point, sur le caractère trompeur ou contrefaisant de l'oeuvre ; qu'en se refusant à toute appréciation de ce genre, la cour d'appel a méconnu les pouvoirs qu'elle tient de l'article 41-1 précité qu'elle a ainsi violé ;
" alors, enfin, que le refus de restitution, qui peut être prononcé même "lorsque aucune juridiction n'a été saisie", n'est pas subordonné à l'existence d'une décision de la juridiction répressive ; que la cour d'appel a encore violé l'article 41-1 du Code de procédure pénale par refus d'application " ;
Attendu que, saisie de la demande en restitution, dans le cadre de la procédure instituée par l'article 41-1 du Code de procédure pénale, la cour d'appel, qui ne pouvait fonder sa décision sur les dispositions relatives aux contrefaçons et fraudes en matière d'oeuvres artistiques prévues tant aux articles L. 335-4 à L. 335-7 du Code de la propriété intellectuelle qu'aux articles 1 à 3-1 de la loi du 9 février 1895 modifiée le 5 février 1994, non applicables en l'espèce pour les raisons qu'elle expose, a estimé que l'oeuvre dont le caractère contrefaisant n'avait jamais été constaté par une décision judiciaire statuant sur le fond, n'était pas de nature à créer un danger pour les personnes et les biens, au sens de l'article 41-1 du Code de procédure pénale, et qu'il n'y avait, dès lors, pas lieu de s'opposer à la requête ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, relevant de son appréciation souveraine du caractère dangereux de l'objet à restituer, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-80885
Date de la décision : 30/04/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement - publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial - Juridictions correctionnelles - Juridiction correctionnelle saisie d'une requête en restitution - Chambre du Conseil.

1° L'exigence de publicité édictée par l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ne peut être valablement invoquée, par le demandeur à une action en restitution sur laquelle il a été statué en chambre du Conseil conformément à l'article 41-1 du Code de procédure pénale, dès lors que l'intéressé présent à l'audience n'a élevé aucune contestation sur la procédure suivie tant au regard du droit interne que de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et qui ne démontre pas en quoi il a été ainsi porté atteinte à ses intérêts.

2° RESTITUTION - Juridiction correctionnelle - Pouvoirs - Objet présentant un danger pour les personnes et les biens.

2° La cour d'appel saisie d'une demande en restitution d'une oeuvre dont le caractère contrefaisant n'a jamais été contesté par une juridiction statuant sur le fond s'est prononcée à bon droit dans le cadre des seules dispositions de l'article 41-1 du Code de procédure pénale et a dès lors souverainement apprécié au regard de ce texte le caractère dangereux pour la personne et pour les biens de la restitution demandée(1).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 janvier 1996

CONFER : (2°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1995-05-23, Bulletin criminel 1995, n° 186, p. 508 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1996-04-30, Bulletin criminel 1996, n° 183, p. 528 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 avr. 1998, pourvoi n°96-80885, Bull. crim. criminel 1998 N° 146 p. 389
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 146 p. 389

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Schumacher, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Pibouleau.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Coutard et Mayer.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.80885
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