Sur la première branche du premier moyen :
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli la demande en indemnisation des consorts X... pour la disparition d'Yvan X... qui aurait été victime d'une infraction, alors que, selon le moyen, pour donner lieu à une indemnisation allouée par une commission d'indemnisation des victimes d'infractions, le préjudice doit résulter de faits présentant le caractère matériel d'une infraction ; que s'il appartient à la Commission de constater que les faits dont elle est saisie présente le caractère matériel d'une infraction, il ne lui appartient pas, lorsque l'existence même d'une infraction matérielle n'est pas établie, de rassembler des présomptions pour la prouver ; qu'en décidant qu'il résultait de présomptions graves, précises et concordantes que M. X... avait péri par la main d'un tiers, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs au regard de l'article 706-3 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'en recherchant si les faits qui lui étaient soumis présentaient le caractère matériel d'une infraction, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article 706-3 du Code de procédure pénale ;
Mais sur la seconde branche du moyen :
Vu l'article 706-3 du Code de procédure pénale ;
Attendu que pour dire que M. X... avait été victime d'une infraction, l'arrêt relève qu'un homme mis en examen, décrit comme violent, s'était vanté de faire disparaître facilement une personne en la brûlant, qu'il avait déclaré aux enquêteurs que dans le courant de l'après-midi de la disparition d'Yvan X..., il avait eu un trou de mémoire consécutif à une absorption d'alcool, mais que dans une semi-conscience, il se remérorait avoir fait un feu ; que le lendemain, découvrant un énorme tas de cendre qui dégageait une forte odeur d'huile brûlée, il l'avait fouillé, y trouvant des morceaux compacts sentant l'huile et la viande brûlée et qu'il avait le vague souvenir de l'incinération d'un corps de sexe masculin qui avait la corpulence d'Yvan X... et énonce qu'il résulte de ces éléments un ensemble de présomptions graves, précises et concordantes dans lesquelles les juges puisent la conviction que la victime a péri par la main d'un tiers, quand bien même celui-ci n'aurait pu être identifié par les investigations du magistrat instructeur ;
Qu'en se bornant à ces motifs, sans mettre en évidence les circonstances caractérisant l'intervention d'un tiers, élément matériel de l'infraction, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles R. 91 et R. 92.15° du Code de procédure pénale ;
Attendu que les frais exposés devant toutes les juridictions statuant en matière d'indemnisation des victimes d'infraction sont à la charge du Trésor public ;
Attendu que l'arrêt, qui a alloué des indemnités aux consorts X... a condamné le Fonds aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le Fonds ne pouvait être condamné aux dépens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.