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29/01/1998 | FRANCE | N°96-83149

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 janvier 1998, 96-83149


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Thierry,
- la société X... et Compagnie,
- l'administration des douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, du 16 avril 1996, qui, après relaxe définitive des prévenus pour fausses déclarations d'espèce à l'importation, et sur renvoi après cassation, a déclaré partiellement prescrites les demandes de cette Administration en paiement de droits éludés et a condamné Thierry X..., solidairement avec la société X..., à lui payer la somme de 30 709 francs.>LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produ...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Thierry,
- la société X... et Compagnie,
- l'administration des douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, du 16 avril 1996, qui, après relaxe définitive des prévenus pour fausses déclarations d'espèce à l'importation, et sur renvoi après cassation, a déclaré partiellement prescrites les demandes de cette Administration en paiement de droits éludés et a condamné Thierry X..., solidairement avec la société X..., à lui payer la somme de 30 709 francs.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, présenté par l'administration des Douanes, pris de la violation des articles 336, 351, 354, 369, § 4, 377 bis du Code des douanes, 2 et 3 du règlement CEE n° 1697/79, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré prescrite la demande en paiement formée par la demanderesse contre les prévenus et d'avoir limité à 30 709 francs la condamnation de Thierry X... et de la société X... pour les seules importations des 1er août 1988 et 3 janvier 1989 ;
" aux motifs que la demande en paiement relève des dispositions combinées des articles 354 et suivants du Code des douanes, 2 et suivants du règlement CEE du 24 juillet 1979 et non de celles de l'article 351 du même Code applicable à la seule action en répression des infractions douanières ; que l'action a été engagée plus de 3 ans après que les droits auraient dû être payés ; que les procès-verbaux des 17 novembre 1989 et 19 août 1991 n'ont pas interrompu la prescription ; que l'article 355 du Code des douanes ne prévoit d'interversion de la prescription triennale pour devenir trentenaire que quand il y a, avant le terme, contrainte décernée et notifiée, demande en justice, condamnation, promesse, convention ou obligation particulière et spéciale à l'objet répété ; que l'Administration ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 355, alinéa 2, ou de celles de l'article 3 du règlement CEE car aucun acte passible de poursuite pénale n'a été commis ; qu'il n'existe aucune cause ou acte interruptif de prescription ; que la saisine de la Commission de conciliation et d'expertise douanière n'a pu suspendre le cours de la prescription de la demande à l'égard des sociétés Sagatrans et Daher qui n'étaient pas partie à la procédure devant la Commission de conciliation et d'expertise douanière ;
" alors que l'article 3 du règlement CEE n° 1697/79 relatif au recouvrement a posteriori des droits de douane dispose que le délai de prescription triennale institué par l'article 2 n'est pas applicable lorsque les autorités compétentes constatent que c'est par suite d'un acte passible de poursuites judiciaires répressives qu'elles n'ont pas été en mesure de déterminer le montant des droits dus ; qu'en l'espèce, les prévenus ont été poursuivis du chef de fausses déclarations d'espèce et il résulte de l'arrêt partiellement censuré par la Cour de Cassation qu'il y avait bien eu fausse déclaration d'espèce, les marchandises ayant été déclarées sous la position 97-03 au lieu de 70-13 ; qu'en estimant, dès lors, l'article 3 susvisé inapplicable, aux motifs erronés qu'il a été définitivement jugé qu'aucun acte passible de poursuite pénale n'avait été commis, la cour d'appel a violé ce texte et l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors que, ainsi que l'avait fait valoir la demanderesse, l'article 377 bis du Code des douanes, en liant la compétence des tribunaux pour ordonner le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues à l'application de l'article 369 relatif aux circonstances atténuantes, soumet par là-même la demande en prescription des droits à la prescription de l'article 351 dudit Code ; qu'en déclarant ce texte inapplicable, la cour d'appel a violé les articles 351, 369 et 377 bis du Code des douanes ;
" alors que, même en admettant, comme l'avait précisé la demanderesse, que la demande en paiement relèverait de l'article 354 du Code des douanes, la prescription aurait été interrompue par les procès-verbaux des 17 novembre 1989 et 19 août 1991 ; qu'en estimant le contraire aux motifs erronés et inopérants que l'article 355 ne prévoit "d'interversion de la prescription triennale pour devenir trentenaire que quand il y a, avant le terme, contrainte décernée et notifiée, demande formée en justice, condamnation, promesse, convention ou obligation particulière et spéciale à l'objet répété", la cour d'appel a violé les articles 336 et 354 du Code des douanes " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 10 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout acte de poursuite et d'instruction interrompt, à l'égard de tous les participants à l'infraction, la prescription des actions tant publique que civile ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société X... a importé des Etats-Unis, les 17 juillet 1987, 6 et 7 janvier 1988, 1er août 1988 et 3 janvier 1989, des vases et des presse-papiers en verre ; que ces objets ont été déclarés, par des commissionnaires en douane, comme productions originales de l'art statuaire, sous la position tarifaire 97-03 ; qu'après avoir effectué, postérieurement aux opérations de dédouanement, la vérification de ces marchandises, l'administration des Douanes a estimé qu'elles auraient dû être déclarées comme objets en verre pour l'ornementation des appartements, sous la position tarifaire 70-13 et a notifié, en conséquence, à l'importateur et aux commissionnaires en douane, par procès-verbaux des 17 novembre 1989 et 19 août 1991, des infractions de fausses déclarations d'espèce ayant eu pour but ou pour effet de compromettre des droits et taxes à l'importation ;
Que la Commission de conciliation et d'expertise douanière, consultée pour avis par la société X..., a estimé que seuls les presse-papiers relèvent de la position tarifaire 70-13 ;
Attendu que, dans les poursuites exercées par l'administration des Douanes, la cour d'appel, par arrêt du 25 mars 1994, a reconnu la bonne foi de Thierry X... et de la société X..., ainsi que des six autres prévenus, a prononcé leur relaxe et débouté l'Administration de ses demandes en paiement des droits compromis ;
Que, sur le pourvoi de cette administration, la chambre criminelle, par arrêt du 20 mars 1995, a cassé l'arrêt susvisé en ses seules dispositions concernant le paiement des droits éludés ;
Attendu que, pour dire l'action engagée par l'administration sur le fondement de l'article 377 bis du Code des douanes et tendant au paiement des sommes fraudées, totalement prescrite en ce qu'elle visait les commissionnaires en douane, la cour de renvoi, après avoir relevé que les droits et taxes à l'importation auraient dû être légalement acquittés à chaque opération de dédouanement, les 17 juillet 1987, 6, 7 janvier et 1er août 1988 et 3 janvier 1989, énonce que, faute d'être intervenue dans les trois ans de leurs faits générateurs et faute de pouvoir invoquer une des deux exceptions prévues par l'article 355 du Code précité, en raison de la relaxe prononcée et de l'absence d'actes interruptifs, cette demande se heurte à la prescription visée à l'article 354 du même Code ; qu'elle ajoute, pour dire que l'action dirigée contre la société importatrice n'était qu'en partie prescrite, que la consultation de la Commission de conciliation et d'expertise douanière avait eu pour effet, en vertu de l'article 350 du Code des douanes, de suspendre le cours de la prescription visée à l'article 354 précité ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les dispositions de l'article 355 du Code des douanes relatives à l'interversion des prescriptions triennales en prescriptions trentenaires et non à leur interruption, étaient inapplicables au cas d'espèce, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes et principe ci-dessus rappelés ;
Qu'en effet, sauf à priver de toute portée les dispositions des articles 369, 4°, et 377 bis du Code des douanes, 2 et 3 du règlement CEE n° 1697/79 du conseil du 24 juillet 1979, permettant le recouvrement a posteriori des droits dus, les procès-verbaux établis par l'administration des Douanes, en ce qu'ils visent à la fois à établir l'existence d'une infraction et à asseoir l'assiette des droits à recouvrer, ont un effet interruptif non seulement à l'égard de l'action en répression des infractions douanières mais encore à l'égard de celle tendant au recouvrement de ces droits ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de cassation proposés pour Thierry X... et la société X...,
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, du 16 avril 1996, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-83149
Date de la décision : 29/01/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DOUANES - Procédure - Action en recouvrement des droits fraudés fondée sur l'article 377 bis du Code des douanes - Prescription - Interruption - Procès-verbal d'infraction.

PRESCRIPTION - Action des Douanes en recouvrement des droits fraudés fondée sur l'article 377 bis du Code des Douanes - Interruption - Procès-verbal d'infraction

Sauf à priver de toute portée les dispositions des articles 369, 4 et 377 bis du Code des Douanes, 2 et 3 du règlement CEE n° 1697/79 du Conseil du 24 juillet 1979, permettant le recouvrement a posteriori des droits dûs, les procès-verbaux dressés par l'administration des Douanes, en ce qu'ils visent à la fois à établir l'existence d'une infraction et à asseoir l'assiette des droits à recouvrer, ont un effet interruptif non seulement à l'égard de l'action en répression des infractions douanières mais encore à l'égard de celle tendant au recouvrement de ces droits.


Références :

Code des douanes, 369, 4 et 377 bis

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 avril 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 jan. 1998, pourvoi n°96-83149, Bull. crim. criminel 1998 N° 35 p. 85
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 35 p. 85

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Schumacher, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Géronimi.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Challe.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré et Xavier, M. Balat, la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.83149
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