Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 mai 1995), que la société Bourgey Montreuil international (société Bourgey Montreuil) a chargé la société des Transports Foissin et compagnie (société Foissin) de transporter deux lots de marchandises d'Italie en France ; que cette dernière société, après avoir pris en charge un lot de marchandises à Varèse, s'est rendue dans les entrepôts de la société Bourgey Montreuil à Cormano pour y recevoir le second lot ; que, pendant que le personnel procédait à l'opération de chargement, le chauffeur de la société Foissin est parti se restaurer ; qu'à son retour il a constaté que son véhicule avait été volé avec son chargement ; que la société Bourgey Montreuil et son assureur, la société GAN assurances (GAN) ont demandé la réparation de leur préjudice à la société Foissin et à son assureur la société compagnie Rhin et Moselle (la société Rhin et Moselle) ;
Attendu que la société Bourgey Montreuil et le GAN font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le transporteur est présumé responsable de la marchandise depuis la prise en charge jusqu'à la livraison, c'est-à-dire pendant toute l'exécution du contrat de transport ; qu'il ne peut être déchargé de cette responsabilité qu'en cas de faute de l'ayant droit, vice propre de la marchandise ou circonstances qu'il ne pouvait éviter ; qu'en conséquence, en décidant que le transporteur n'était pas responsable par la considération que la garde aurait été transférée à l'expéditeur après avoir expressément relevé qu'il avait pris en charge la marchandise, la cour d'appel a violé l'article 17 de la convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ; alors, d'autre part, qu'à supposer même que l'entrepôt de la société Bourgey Montreuil ait été surveillé et gardienné, le seul fait d'y pénétrer ne saurait transférer la garde des marchandises du voiturier à l'expéditeur ; qu'en conséquence la cour d'appel a de nouveau violé l'article 17 de la CMR ; alors, encore, que la marchandise est prise en charge par le voiturier dès qu'elle se trouve dans le véhicule, de sorte qu'à compter de ce moment l'expéditeur n'en a plus la garde ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que les marchandises, ultérieurement volées, avaient été chargées sur le camion ; qu'en décidant pourtant qu'il n'y avait pas eu prise en charge par le voiturier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 17 de la CMR ; et alors, enfin, que le transporteur doit contrôler le chargement réalisé par l'expéditeur ; que dès lors, en se bornant à énoncer que la prise en charge n'était pas établie motif pris de ce que le chauffeur était absent sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si le préposé du voiturier n'avait pas commis une faute pour n'avoir pas procédé au contrôle du chargement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 17 de la CMR ;
Mais attendu, en premier lieu que l'arrêt ne s'est pas borné à relever que le voiturier avait pénétré dans les entrepôts gardés et surveillés de la société Bourgey Montreuil à Cormano, mais a constaté aussi qu'après son arrivée en ce lieu, le voiturier avait mis son véhicule, qui contenait un premier lot de marchandises à la disposition des employés de la société Bourgey Montreuil afin que ceux-ci effectuent le chargement du deuxième lot de marchandises, que le chauffeur, comme cela se pratique habituellement, était allé se restaurer après en avoir informé les préposés de la société Bourgey Montreuil et que, le chargement effectué, un des employés de cette société en avait informé le personnel de surveillance ; que de ces constatations l'arrêt a pu retenir que, dès lors que les préposés de la société Bourgey Montreuil chargeaient les marchandises à l'intérieur du camion de la société Foissin, la société Bourgey Montreuil avait un pouvoir de contrôle, de direction et de surveillance sur ce véhicule ainsi que sur son contenu et assumait la garde de celui-ci ;
Attendu, en second lieu, que, pour les seuls motifs qui précèdent, d'où il résulte que le vol intervenu dans l'enceinte gardée de la société Bourgey Montreuil était imputable à la faute de cet ayant droit, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer une recherche sans incidence sur la solution du litige, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.