Sur le moyen unique :
Vu l'article 17 de l'avenant ingénieurs et cadres à la Convention collective nationale du caoutchouc du 6 mars 1953, relatif à la clause de non-concurrence ;
Attendu que, selon le paragraphe 3 de ce texte l'interdiction de concurrence ne doit pas, en principe, excéder deux années ; que, selon son paragraphe 5, il peut, par exception, dans certains cas, en raison du caractère particulièrement délicat ou secret de certaines fabrications, être stipulé, de convention expresse, un délai supérieur à deux années, avec un maximum de quatre années ; que son paragraphe 7 dispose : " Lorsque le contrat de travail prévoyant une clause de non-concurrence est dénoncé par l'ingénieur ou cadre, celui-ci doit rappeler, par écrit et de façon explicite, à son employeur, l'existence de la clause de non-concurrence. L'employeur aura un délai de trois semaines pour se décharger de l'indemnité prévue, en libérant par écrit l'ingénieur ou cadre de la clause d'interdiction... " ; qu'enfin, son paragraphe 8 est ainsi rédigé :
" Si l'interdiction prévue est supérieure à deux ans, l'employeur pourra se décharger de l'indemnité pour les troisième et quatrième années en prévenant l'intéressé à la dénonciation du contrat ; de même, il pourra se décharger de la moitié de l'indemnité due pour la quatrième année en prévenant l'intéressé un an après la dénonciation du contrat et en libérant dans ce cas l'ingénieur ou cadre pour la quatrième année " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, que, lorsque la dénonciation du contrat de travail comportant une clause de non-concurrence d'une durée de 4 ans émane du salarié, le délai de 3 semaines, dont l'employeur dispose pour libérer le salarié de son obligation et pour se décharger lui-même du paiement de l'indemnité, a pour point de départ, dans tous les cas, la date de la réception par l'employeur de la démission du salarié, c'est-à-dire la dénonciation du contrat, et ce, même dans l'hypothèse, envisagée par le paragraphe 8, où l'employeur renonce partiellement au bénéfice d'une clause d'une durée supérieure à deux ans ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, en qualité de cadre, par la Manufacture française des pneumatiques Michelin (MFPM) le 1er octobre 1985 ; qu'un avenant à son contrat de travail, signé le 28 janvier 1986, a prévu une clause de non-concurrence, faisant référence aux dispositions de l'article 17 de l'avenant ingénieurs et cadres à la Convention collective nationale du caoutchouc du 6 mars 1953 et applicable pendant une durée de quatre années entières à dater de la cessation de ses fonctions, quelle que soit la cause de son départ ; que M. X... a présenté sa démission par une lettre du 4 septembre 1989, reçue par son employeur le 5 septembre, et dans laquelle il lui a rappelé l'existence de la clause de non-concurrence ; que la société MFPM lui a notifié, par lettre du 29 septembre 1989, d'une part, qu'elle le dispensait d'accomplir son préavis à compter du 3 octobre 1989, tout en le conservant dans ses effectifs jusqu'au 4 décembre, d'autre part, qu'elle le libérait de la clause précitée ; que M. X... a engagé une instance prud'homale ;
Attendu que, pour le débouter partiellement de sa demande en paiement de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence au titre des 3e et 4e années et d'un supplément d'indemnité au titre de l'actualisation, l'arrêt énonce qu'il résulte de l'article 17, paragraphe 3, 5 et 8, de l'avenant à la convention collective précitée que les règles conventionnelles relatives à la libération du salarié de son interdiction de concurrence ne sont pas les mêmes pour la période courante de 2 ans régie par le paragraphe 7 et pour les deux années complémentaires exceptionnelles réglementées par le paragraphe 8 ; que le salarié se prévaut à tort de l'indivisibilité des deux régimes ; qu'en l'absence de dispositions plus précises sur le point de départ de ce délai quand la dénonciation du contrat n'est pas le fait de l'employeur, il convient de retenir la notification faite avant l'expiration du délai-congé et, en cas de dispense totale ou partielle d'accomplissement du préavis, la date à laquelle celui-ci cesse de s'exécuter ; qu'en la cause, la société MFPM a fait connaître de façon explicite et irrévocable sa décision de libérer M. X... de l'exécution du préavis restant à courir ; qu'ainsi, même si la renonciation était dépourvue d'efficacité pour la première période de deux ans en raison de l'inobservation par l'employeur du délai conventionnel de trois semaines, elle est en revanche valable pour la période postérieure des 3e et 4e années ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans ses dispositions ayant rejeté la demande du salarié en paiement d'une contrepartie financière de la clause de non-concurrence au titre des 3e et 4e années, l'arrêt rendu le 28 novembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.