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16/12/1997 | FRANCE | N°95-20365

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 décembre 1997, 95-20365


Attendu, selon le jugement critiqué (tribunal de grande instance de Bordeaux, 7 août 1995), que M. André X... qui séjournait en France métropolitaine depuis le 28 avril 1980 est décédé à Villenave-d'Ornon le 28 mars 1981 ; qu'une déclaration de succession a été déposée à Nouméa et une déclaration complémentaire à la recette des Impôts de non-résidents, à Paris ; que l'administration fiscale, estimant que M. André X... avait son domicile fiscal en France métropolitaine et non en Nouvelle-Calédonie, a liquidé en conséquence les droits de succession, notifié un redress

ement à ses héritiers, Mme Veuve X..., Mmes Z... et Y... et MM. Louis et Ar...

Attendu, selon le jugement critiqué (tribunal de grande instance de Bordeaux, 7 août 1995), que M. André X... qui séjournait en France métropolitaine depuis le 28 avril 1980 est décédé à Villenave-d'Ornon le 28 mars 1981 ; qu'une déclaration de succession a été déposée à Nouméa et une déclaration complémentaire à la recette des Impôts de non-résidents, à Paris ; que l'administration fiscale, estimant que M. André X... avait son domicile fiscal en France métropolitaine et non en Nouvelle-Calédonie, a liquidé en conséquence les droits de succession, notifié un redressement à ses héritiers, Mme Veuve X..., Mmes Z... et Y... et MM. Louis et Armand X... (les consorts X...) et émis les avis de mise en recouvrement correspondants ; que le directeur des services fiscaux de la Gironde ayant rejeté leur réclamation, les consorts X... l'ont assigné, pour obtenir décharge des sommes mises en recouvrement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le directeur général des Impôts reproche au jugement d'avoir déclaré valable l'assignation, alors, selon le pourvoi, que, si, en application de l'article R. 202-2, alinéa 3, du Livre des procédures fiscales, le ministère d'avocat n'est pas obligatoire devant le tribunal de grande instance statuant en matière fiscale, il n'est pas interdit aux parties de se faire représenter par un avocat devant la juridiction ; que l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 confie aux avocats le monopole de la représentation devant les juridictions, sauf dispositions spéciales qui n'existent pas en matière fiscale ; qu'il résulte encore de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971, dont les dispositions ne sont pas incompatibles avec celles de l'article R. 202-2, alinéa 3 précité du livre des procédures fiscales et doivent dès lors recevoir application chaque fois qu'il est recouru à la représentation par ministère d'avocat, que la mission de représentation de l'avocat s'exerce exclusivement devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel l'avocat a établi sa résidence professionnelle ; que l'article 117 du nouveau Code de procédure civile frappe de nullité l'assignation délivrée par un avocat n'ayant pas la capacité de représenter devant la juridiction considérée ; qu'en l'espèce, ayant constaté dans son jugement que les consorts X... avaient constitué pour les représenter devant le tribunal de grande instance de Bordeaux deux avocats inscrits au barreau des Hauts-de-Seine, le Tribunal n'a pu, sans violer, outre les textes susvisés, les articles 19 et 414 du nouveau Code de procédure civile, juger régulière l'assignation délivrée le 29 octobre 1993 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les instances en matière d'enregistrement ne nécessitaient pas le ministère d'avoué antérieurement à la loi du 31 décembre 1971 et que depuis lors les parties y sont libres de ne pas se faire représenter, le jugement en déduit qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 5 de cette loi qui interdit aux avocats d'exercer, ailleurs que devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel ils ont établi leur résidence professionnelle, " les activités antérieurement dévolues au ministère obligatoire de l'avoué auprès de ce tribunal " et retient, à bon droit, que le moyen tiré du défaut de capacité et de pouvoir de l'avocat auteur de l'assignation devait être rejeté ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen pris en ses deux branches :

Attendu que le directeur général des Impôts reproche au jugement d'avoir déclaré nuls les avis de mise en recouvrement émis le 24 février 1992, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'article 4 B du Code général des impôts, auquel renvoie l'article 750 ter du même Code pour la liquidation des droits de mutation par décès, pose, comme l'un des critères alternatifs d'appréciation du domicile fiscal, le lieu du séjour principal ; qu'il s'agit là d'un critère autonome, contingent à la durée du séjour, et qui est étranger à toute appréciation des intentions de la personne dont le domicile est recherché, et indépendant des motifs, fussent-ils qualifiés de force majeure, ayant conduit au séjour en un lieu donné ; qu'ayant constaté le caractère principal, voire exclusif, du séjour à Bordeaux de M. X..., le Tribunal ne pouvait l'écarter comme critère de localisation en ce lieu de son domicile en faisant prévaloir les circonstances de fait tenant à la maladie du de cujus et l'absence d'intention supposée de sa part d'y transférer son principal établissement ; qu'en décidant de la sorte, les premiers juges ont violé, outre les textes précités par refus d'application, les articles 102 et 103 du Code civil par fausse application ; et alors, d'autre part, que le Tribunal ne pouvait faire droit aux prétentions des consorts X... sans expressément déterminer le lieu de domicile du de cujus au regard des critères posés par l'article 4 B du Code général des impôts ; qu'en confondant systématiquement, à partir des mêmes éléments d'appréciation, le critère du foyer et celui du séjour principal, le Tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant énoncé que tous les biens transmis par décès sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit lorsque le défunt avait son domicile fiscal en France, notamment du fait qu'il y avait son foyer ou son lieu de séjour principal, et constaté que M. André X..., qui dirigeait une société dont le siège social est situé à Nouméa et dont l'activité se situe essentiellement en Nouvelle-Calédonie depuis 1948, est décédé à Villenave-d'Ornon en mars 1981 après avoir séjourné plus de 6 mois en France au cours de l'année précédente, ces séjours résultant non de convenances personnelles ou professionnelles mais seulement des nécessités du traitement d'une maladie qui ne pouvait pas être soignée en Nouvelle-Calédonie, le jugement a estimé qu'un tel transfert de son lieu de séjour principal qui ne manifestait nullement son intention de fixer sur le territoire métropolitain de la France son principal établissement n'établissait pas qu'il y avait son domicile fiscal ; qu'appréciant la portée du fait invoqué par l'Administration au regard des circonstances, le Tribunal a pu statuer comme il a fait ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que les faits invoqués par l'administration fiscale n'étaient pas pertinents pour établir que M. X... avait son domicile fiscal sur le territoire métropolitain de la France, le Tribunal a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui n'est fondé en aucune de ses deux branches, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-20365
Date de la décision : 16/12/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Procédure (règles communes) - Ministère d'avocat postulant - Limite - Tribunal de grande instance de sa résidence professionnelle (non).

1° Les instances en matière d'enregistrement ne nécessitaient pas le ministère d'avoué antérieurement à la loi du 31 décembre 1971 et depuis lors, les parties sont libres de ne pas s'y faire représenter. Dès lors, ces instances n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 5 de cette loi qui interdit aux avocats d'exercer ailleurs que devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel ils ont établi leur résidence professionnelle les activités antérieurement dévolues au ministère obligatoire de l'avoué auprès de ce tribunal.

2° IMPOTS ET TAXES - Contributions directes - Impôt sur le revenu - Domicile fiscal - Critères légaux - Lieu du séjour principal - Appréciation.

2° Ayant relevé que les séjours du défunt en métropole, s'ils avaient excédé 6 mois au cours de l'année précédant son décès, résultaient non de ses convenances personnelles ou professionnelles mais seulement des nécessités du traitement d'une maladie qui ne pouvait être soignée en Nouvelle-Calédonie, un tribunal a pu estimer qu'un tel transfert de son lieu de séjour principal sur le territoire métropolitain n'établissait pas qu'il y avait son domicile fiscal.


Références :

1° :
Loi 71-1130 du 31 décembre 1971

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 07 août 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 déc. 1997, pourvoi n°95-20365, Bull. civ. 1997 IV N° 343 p. 297
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 IV N° 343 p. 297

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Poullain.
Avocat(s) : Avocats : M. Goutet, la SCP Defrénois et Levis.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.20365
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