Statuant tant sur le pourvoi incident formé par M. et Mme X..., que sur le pourvoi principal formé par le directeur général des Impôts, le directeur des Services fiscaux de la Nièvre et le receveur principal des Impôts de Cosne-Cours-sur-Loire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la procédure de liquidation judiciaire de la société Confections du Val de Loire, dont M. et Mme X... étaient les dirigeants de fait, a été clôturée pour insuffisance d'actif par jugement du 19 septembre 1990 ; que la cour d'appel a statué, le 10 mai 1995, sur l'appel formé par M. et Mme X... contre le jugement du tribunal de grande instance de Nevers du 17 août 1993 qui, en application de l'article L. 267 du Livre des procédures fiscales, les avait condamnés solidairement au paiement de la dette fiscale de la société ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. et Mme X... reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leur exception de prescription, alors, selon le pourvoi, que l'interruption de l'action ouverte à l'encontre des dirigeants sociaux, n'interrompt pas celle ouverte contre la société ; que la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif ayant été prononcée le 19 septembre 1990, l'action fiscale contre la société se trouvait prescrite au jour où la cour d'appel a statué ; que, dès lors, l'action contre eux se trouvait elle-même prescrite ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 266 et L. 267 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'ayant énoncé exactement que, si, pour l'application de l'article L. 267 du Livre des procédures fiscales, le principe de solidarité doit être établi par une décision de justice avant que la dette fiscale de la société ne soit prescrite, il n'est pas nécessaire que cette décision soit définitive, la cour d'appel a pu en déduire que la décision de première instance dont l'effet dévolutif de l'appel n'implique pas l'anéantissement a fait obstacle à l'acquisition de la prescription durant la procédure d'appel ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article L. 267 du Livre des procédures fiscales ;
Attendu que pour rejeter la demande du comptable public, l'arrêt énonce qu'il appartient à l'administration fiscale de démontrer l'existence de circonstances particulières créées par le débiteur ou du moins de son fait, en raison desquelles l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales a rendu impossible le recouvrement, et qu'en l'espèce rien n'est démontré ni vraiment allégué, l'Administration estimant que le caractère grave et renouvelé des inobservations fiscales suffirait à entraîner l'impossibilité de recouvrement, dès lors qu'elle a elle-même fait diligence ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme il était soutenu à partir de faits et de documents précis, la dissimulation des recettes qui, durant plusieurs années, avait entraîné la constitution d'une dette fiscale dépassant les possibilités de paiement de la société, et retardé l"établissement de l'impôt jusqu'après la vérification opérée au printemps de 1988 durant le déroulement de laquelle M. X... avait déposé le bilan de la société, n'avait pas empêché la mise en oeuvre de mesures d'exécution en un temps où elles auraient été efficaces, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom.