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02/04/1997 | FRANCE | N°94-43352

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 avril 1997, 94-43352


Attendu que M. Jean-Claude X... a été engagé le 1er décembre 1975 par la société SFOB, en qualité de tourneur, société dont la directrice générale est devenue Mme X..., épouse en seconde noces du père du salarié, M. Léopold X..., à la suite du placement de ce dernier sous une mesure de protection ; que M. Jean-Claude X... a été licencié le 9 octobre 1991 pour faute grave, l'employeur lui reprochant des propos diffamatoires à son égard ;

Sur les trois premiers moyens réunis :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 29 avril 1994) d'avo

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Attendu que M. Jean-Claude X... a été engagé le 1er décembre 1975 par la société SFOB, en qualité de tourneur, société dont la directrice générale est devenue Mme X..., épouse en seconde noces du père du salarié, M. Léopold X..., à la suite du placement de ce dernier sous une mesure de protection ; que M. Jean-Claude X... a été licencié le 9 octobre 1991 pour faute grave, l'employeur lui reprochant des propos diffamatoires à son égard ;

Sur les trois premiers moyens réunis :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 29 avril 1994) d'avoir décidé que le licenciement n'était pas justifié par une faute grave, alors, selon les moyens, que la lettre de licenciement, en date du 9 octobre 1991, énonçait deux séries de faits : les propos de M. X... sur " le court devenir " de la SFOB et les propos mensongers et diffamatoires sur le directeur général ; que les propos sur " le court devenir " de la société étaient expressément relatés dans la lettre de licenciement et dans la lettre d'avertissement du 19 juin 1991 à laquelle celle du 9 octobre 1991 se référait expressément ; que la cour d'appel, en énonçant que la lettre de licenciement ne " contenait aucune précision sur la nature des propos imputés au salarié ", a dénaturé cette lettre et violé l'article 1134 du Code civil ; que la cour d'appel ne pouvait énoncer davantage que le salarié avait appris par la suite la nature des propos qui lui étaient imputés et qui se fondaient sur une lettre adressée à son conseil ; que la cour d'appel a mêlé deux séries de propos tenus par M. X... et qu'elle a dénaturé, sur ce point encore, le sens et la portée de la lettre de licenciement et violé l'article 1134 du Code civil ; que la cour d'appel devait, en tout cas, s'expliquer sur l'impact des insinuations de M. X... sur l'avenir de la SFOB et sur son bon fonctionnement, sur leur caractère gravement fautif ; qu'en s'abstenant de le faire la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision vis-à-vis de l'article L. 122-6 du Code du travail et que les propos ainsi tenus en plein atelier tendaient à discréditer l'employeur, qu'ils créaient un trouble manifeste au sein de l'entreprise et constituaient une faute grave ; que la cour d'appel a violé l'article L. 122-6 du Code du travail ; et alors encore que, dans sa lettre du 23 juillet 1991, M. X... proférait des accusations diffamatoires contre Mme X..., prise en sa qualité de directeur général de la SFOB et à l'origine du projet de restructuration de cette société ; que la procédure de tutelle a été engagée par MM. Jean-Claude X... et Laurent X..., en tant que salariés du groupe X..., pour faire obstacle à ce projet de holding ; que cette instance, loin d'être étrangère aux relations de travail des parties, s'y rapportait au contraire directement ; que la cour d'appel, en ne s'expliquant pas suffisamment tant sur la lettre du 23 juillet que sur la procédure dans laquelle elle avait été produite, n'a pas donné de base légale à sa décision vis-à-vis de l'article L. 122-6 du Code du travail ; et, de plus, que le comportement de M. X..., même dans une instance distincte de l'instance prud'homale et affectant sa vie privée, n'en créait pas moins, compte tenu de ses fonctions et de sa position dans l'entreprise, ainsi que des particularités de cette dernière, en cours de restructuration, un trouble grave au sein de la SFOB ; que la cour d'appel a violé l'article L. 122-6 du Code du travail ; et alors, enfin, que les propos de dénigrement de la SFOB, tenus en plein atelier par M. X..., ainsi que ses paroles diffamatoires dans une procédure offrant un lien avec les relations de travail, justifiaient pleinement le licenciement de ce salarié ; que la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que la lettre de licenciement invoquait des propos tenus dans un atelier et d'autres propos visant la personne de Mme X..., directeur général ; qu'elle a décidé à bon droit que les premiers ne pouvaient justifier le licenciement comme ayant fait l'objet d'un avertissement et que les seconds, contenus dans une lettre adressée par le salarié à son avocat à l'occasion de la procédure de mise en tutelle de son père, ne pouvaient constituer ni une faute ni une cause de licenciement ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié une prime au titre d'une prime trimestrielle pour le mois de juin 1991, alors, selon le moyen, que la cour d'appel s'est abstenue d'indiquer les raisons pour lesquelles elle estimait que M. X... était en droit d'obtenir le paiement de cette prime ; que cette absence de motif prive l'arrêt de toute base légale au regard des articles 1134 du Code civil, L. 121-1 du Code du travail et que la cour d'appel n'a pas expliqué pourquoi elle statuait différemment des premiers juges qui avaient débouté M. X... de ce chef, décision dont, à cet égard, la société SFOB demandait la confirmation ; qu'elle n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir que la prime litigieuse avait été supprimée en raison de faits considérés comme fautifs par l'employeur, ce qui constituait une sanction pécuniaire illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 94-43352
Date de la décision : 02/04/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faits ayant déjà été sanctionnés.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Avertissement - Licenciement postérieur - Licenciement sanctionnant les mêmes faits - Licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

1° Des propos ayant fait l'objet d'un avertissement ne peuvent justifier un licenciement.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Propos contenus dans une lettre à son avocat (non).

2° Une cour d'appel décide à bon droit que des propos contenus dans une lettre adressée par le salarié à son avocat à l'occasion de la procédure de mise en tutelle de son père ne peuvent constituer ni une faute ni une cause de licenciement.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Sanction pécuniaire - Définition - Primes - Prime trimestrielle - Suppression en raison de faits qualifiés de fautifs par l'employeur.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Sanction pécuniaire - Sanction pécuniaire prohibée.

3° La suppression d'une prime trimestrielle en raison de faits considérés comme fautifs par l'employeur constitue une sanction pécuniaire illicite.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 avril 1994

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1989-10-31, Bulletin 1989, V, n° 629, p. 379 (cassation)

arrêt cité. A RAPPROCHER : (3°). Chambre sociale, 1994-02-16, Bulletin 1994, V, n° 56, p. 41 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 avr. 1997, pourvoi n°94-43352, Bull. civ. 1997 V N° 136 p. 99
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 V N° 136 p. 99

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. de Caigny.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Carmet.
Avocat(s) : Avocats : MM. Copper-Royer, Roger.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:94.43352
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