Attendu, selon l'arrêt critiqué, que M. X... était titulaire d'un compte courant à la Banque de Picardie ; que les parties étaient en désaccord sur le montant d'une autorisation verbale de découvert sur ce compte, M. X... prétendant qu'il était supérieur à 1 350 000 francs et la Banque de Picardie soutenant qu'il était de 1 000 000 de francs ; que celle-ci a rejeté des effets en juin 1989, puis le 3 juillet 1989, pour défaut de provision ; qu'après avoir été mis en redressement judiciaire le 31 octobre 1989, M. X..., assisté de M. Garnier, administrateur de ce redressement judiciaire, a assigné la Banque de Picardie en lui reprochant, notamment, d'avoir rompu abusivement son crédit et d'avoir perçu illégalement des intérêts ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X... et M. Garnier, commissaire à l'exécution du plan de redressement de celui-ci, font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur action en responsabilité formée à l'encontre de la Banque de Picardie en raison de la perception injustifiée de sommes indues, de la rupture abusive de crédit et des abus commis dans la gestion du compte et de l'interdiction bancaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans une lettre datée du 19 mai 1989, adressée à M. Joël X..., la Banque de Picardie indiquait que " le solde débiteur (du compte courant) atteint ce jour (soit 1 338 906,91 francs) constitue un maximum que nous ne souhaitons pas dépasser ; nous vous demandons ainsi de bien vouloir prendre toutes dispositions pour rapidement revenir à l'intérieur de l'autorisation qui avait été convenue, faute de quoi, nous serons contraints de procéder à des rejets de valeurs " ; qu'en considérant que la banque avait accordé à M. X... un découvert en compte courant limité à 1 000 000 de francs, la cour d'appel, dénaturant les termes clairs et précis de la lettre du 19 mai 1989 par laquelle la banque accordait un découvert jusqu'à 1 338 906,91 francs, a violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'octroi ou le renouvellement des facilités de caisse pendant un certain temps établit la volonté du banquier de consentir une ouverture de crédit dont le montant est déterminé d'après le plus fort découvert ou, à tout le moins, d'après le découvert moyen consenti par le banquier ; que la cour d'appel a constaté que la Banque de Picardie avait accordé des découverts allant jusqu'à environ 1 350 000 francs et que la moyenne des découverts s'établissait à environ 1 050 000 francs ; qu'en considérant néanmoins que l'ouverture du crédit accordée par la Banque à M.
X...
était limitée à 1 000 000 de francs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a, par là-même, violé les articles 1134 du Code civil et 109 du Code de commerce ; et alors, enfin, que le banquier commet une faute engageant sa responsabilité en limitant le montant du découvert consenti, notamment en rejetant des valeurs pourtant émises dans la limite de ce découvert, sans que les conditions légales de la rupture du crédit soient réunies ; que la cour d'appel a constaté que la Banque de Picardie avait indûment débité du compte courant de M. Joël X... des intérêts, si bien que ceux-ci ne devaient pas être pris en compte dans le calcul du montant du solde débiteur du compte ; que pour considérer que la banque avait à juste titre rejeté en juin, juillet et août 1989 des chèques ou effets de commerce en raison d'un dépassement du plafond du découvert autorisé et fixé par la Banque de Picardie elle-même à 1 000 000 de francs, la cour d'appel a refusé de tenir compte des agios indûment décomptés, violant par là-même les articles 1147 et 1907 du Code civil et 60 de la loi du 24 janvier 1984 ;
Mais attendu, d'une part, que c'est par une interprétation que l'ambiguïté de la lettre du 19 mai 1989 rendait nécessaire, que la cour d'appel a estimé que ce document ne constituait pas une reconnaissance, par la Banque de Picardie, d'une autorisation de découvert à hauteur de 1 350 000 francs ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, qui, à juste titre, ne s'est pas fondée, pour fixer le montant du découvert convenu, sur des méthodes de calcul abstraites, telles que celles dites du plus fort découvert ou du découvert moyen, a retenu que le montant du découvert autorisé ne saurait être déterminé à partir des plus forts débits enregistrés par le compte de M. X..., qui ne reflétaient que des débordements unilatéraux de ce dernier, seulement tolérés par la banque qui les subissait, étant observé qu'après ces débordements, le compte était à nouveau crédité pour être ramené à une somme avoisinant 1 000 000 de francs et que par ailleurs, ces plus forts découverts correspondaient à des anticipations de rentrées d'argent ; qu'ayant ainsi concrètement recherché la commune intention des parties à travers l'analyse des variations du solde débiteur du compte courant depuis 1987, du comportement de M. X... après les dépassements occasionnels de la somme de 1 000 000 de francs, ainsi que du contenu de la lettre envoyée par la banque le 19 mai 1989, la cour d'appel a pu décider qu'il convenait de retenir un découvert verbal de 1 000 000 de francs consenti à M. X... ;
Attendu, enfin, que l'arrêt retient que, si l'interdiction bancaire dont a été l'objet M. X... à compter du 10 août 1989 lui a causé une indéniable gêne, il ne peut être soutenu qu'elle a été la cause de son dépôt de bilan le 31 octobre 1989 ; que, par ce motif non critiqué, qui fait apparaître que le préjudice invoqué par M. X... est sans relation avec ses dépassements de découvert autorisé, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.