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19/02/1997 | FRANCE | N°95-41207

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 février 1997, 95-41207


Attendu que Mme X..., engagée à compter du 1er juillet 1978 par la société Euromarché en qualité de caissière avec un horaire hebdomadaire de 30 heures, a été informée le 6 août 1992 de la modification de ses horaires de travail, comportant désormais deux nocturnes jusqu'à 21 heures 30 ou 22 heures ; qu'ayant refusé ces nouveaux horaires elle a été licenciée le 31 août 1992 et a signé le 2 octobre 1992 une transaction, puis a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur repr

oche à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors que, selon le moyen, d'une part, il ressort d...

Attendu que Mme X..., engagée à compter du 1er juillet 1978 par la société Euromarché en qualité de caissière avec un horaire hebdomadaire de 30 heures, a été informée le 6 août 1992 de la modification de ses horaires de travail, comportant désormais deux nocturnes jusqu'à 21 heures 30 ou 22 heures ; qu'ayant refusé ces nouveaux horaires elle a été licenciée le 31 août 1992 et a signé le 2 octobre 1992 une transaction, puis a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors que, selon le moyen, d'une part, il ressort de l'arrêt que l'indemnité versée par l'employeur au titre de la transaction était supérieure à l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'employeur insistant encore sur la circonstance qu'il résultait des documents produits et notamment des attestations écartées des débats par la cour d'appel que Mme X... a artificiellement refusé la modification de ses horaires et qu'elle a obtenu et négocié, moyennant le paiement d'indemnités, son licenciement alors que son attitude, selon une jurisprudence constante, était constitutive d'une faute grave dont l'employeur n'a pas entendu faire état, ce qui constituerait une concession, l'existence de concessions réciproques devant être appréciée lors de la signature de ladite transaction ; qu'ainsi celle signée fait apparaître qu'elle reposait bien sur des concessions réciproques ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel viole l'article 2044 du code civil ; et alors que, d'autre part, c'est au jour de la signature de la transaction qu'il importe de se placer pour vérifier si les parties ont fait des concessions réciproques ; qu'en ne se plaçant pas à la date de la signature de la transaction pour se prononcer sur ses éléments générateurs et laissant place à un doute quant à ce, la cour d'appel ne permet pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle au regard de l'article 2044 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que Mme X... n'avait pas été licenciée pour faute grave et qu'elle avait donc droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement, qu'ayant constaté que celle-ci s'élevait à la somme de 12 496,66 francs, alors que la somme allouée en vertu de la transaction s'élevait à 15 000 francs, la cour d'appel a pu décider que la transaction était nulle, faute d'une concession appréciable ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors que, selon le moyen, d'une part, une modification de contrat de travail fondée sur l'intérêt de l'entreprise relève du pouvoir de direction de l'employeur, que la société appelante insistait dans ses écritures d'appel sur la circonstance qu'il n'est pas contesté que l'ensemble des horaires des caissières a été mis en place dans l'intérêt de l'entreprise pour permettre de mieux répondre aux besoins de la clientèle, car il était apparu qu'aux heures d'affluence le nombre de caissières en service était insuffisant et qu'aux heures creuses il y avait un nombre de caissières présentes à leur poste de travail disproportionné par rapport à la clientèle à servir ; que, d'ailleurs, la salariée écrivait à l'employeur qu'elle comprenait très bien que la nouvelle direction souhaitait réorganiser l'ensemble du personnel et qu'elle ne pouvait accepter les nouveaux horaires pour des raisons personnelles et de santé ; qu'à aucun moment ce motif de santé n'a été justifié, étant encore souligné que la modification des horaires rendue possible par le contrat de travail lui-même concernant la susnommée n'affectait en rien les conditions de son emploi au sein de l'établissement, pas plus que sa rémunération ; qu'en ne répondant pas à cet ensemble convergent d'éléments de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la cour d'appel méconnaît les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, en ne tenant pas compte de données de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la cour d'appel omet d'user des pouvoirs qu'elle tire de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, partant violé ; alors que, de troisième part, il ne résulte ni de l'arrêt, ni du jugement, ni des écritures d'appel qu'un débat ait pu porter sur l'incidence de la convention nationale des magasins de vente d'alimentation sur la solution du litige, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'une discussion ait pu s'instaurer sur la saisine du comité d'entreprise, sur l'existence ou non d'une concertation avec les représentants du personnel ou/et avec les caissières, que cependant la cour d'appel a inscrit dans son arrêt que, s'agissant d'un contrat à temps partiel, la société Euromarché ne pouvait, en application des articles 3 à 7 de l'annexe V de la convention collective nationale des magasins de vente d'alimentation, modifier la répartition des heures de travail de Mme X... sans un avenant écrit constatant l'accord de la salariée et fait état de l'absence de justificatifs de la saisine du comité d'entreprise, des représentants des salariés et de concertation ; qu'ainsi la cour d'appel retient des moyens de droit et mélangés de fait et de droit qui n'ont pas été préalablement soumis au feu de la contradiction et partant méconnaît les exigences de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

et alors que, par ailleurs, en retenant ainsi d'office des moyens sans que les parties aient été à même d'en discuter, la cour d'appel méconnaît les exigences d'un procès équitable, d'un procès à armes égales, au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une procédure orale ne pouvant en aucun cas dispenser le juge de respecter lui-même le principe de la contradiction et la décision devant à cet égard se suffire à elle-même ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant estimé qu'en voulant imposer un travail nocturne à la salariée l'employeur avait modifié le contrat de travail de celle-ci, a constaté que cette modification n'était justifiée par aucun motif économique ; qu'elle a, par ces seuls motifs, et sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne saurait être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 95-41207
Date de la décision : 19/02/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° TRANSACTION - Nullité - Cause - Absence de concession appréciable.

1° TRANSACTION - Définition - Accord comportant des concessions réciproques pour mettre fin au litige - Concessions réciproques - Concession appréciable - Défaut - Portée.

1° Ayant relevé qu'une salariée avait droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement, et constaté que celle-ci s'élevait à la somme de 12 496,66 francs, alors que la somme allouée en vertu de la transaction s'élevait à 15 000 francs, une cour d'appel a pu décider que la transaction était nulle, faute d'une concession appréciable.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification de nature à priver le licenciement de tout caractère réel et sérieux - Modification de l'horaire de travail - Travail nocturne - Absence de motif économique.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification du contrat de travail - Modification de l'horaire de travail - Travail nocturne - Absence de motif économique 2° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Modification par l'employeur du contrat de travail - Modification de l'horaire de travail - Travail nocturne - Absence de motif économique.

2° A justifié légalement sa décision de condamner l'employeur à payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse une cour d'appel ayant estimé qu'en voulant imposer un travail nocturne à la salariée l'employeur avait modifié le contrat de travail de celle-ci et constaté que cette modification n'était justifiée par aucun motif économique.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 janvier 1995

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1992-05-13, Bulletin 1992, V, n° 307, p. 192 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 fév. 1997, pourvoi n°95-41207, Bull. civ. 1997 V N° 74 p. 51
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 V N° 74 p. 51

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Lebée.
Avocat(s) : Avocats : M. Blondel, la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.41207
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