Donne acte à Mme Y... du désistement de son pourvoi en ce qu'il concerne MM. Régis, Michel X... et Mme Marie-José X... ;
Attendu qu'à la suite de l'incendie survenu le 10 octobre 1986 d'un immeuble appartenant en partie à Mme Y... et assuré par les Assurances générales de France (AGF), l'Union de crédit pour le bâtiment (UCB), qui avait prêté à la propriétaire une certaine somme remboursable par échéances avec garantie hypothécaire, a, le 6 mai 1988, formé opposition par lettre recommandée avec avis de réception auprès de l'assureur sur le fondement de l'article L. 121-13 du Code des assurances ; qu'un litige s'étant élevé entre Mme Y... et les AGF sur la garantie de l'assureur, un premier arrêt rendu le 8 juillet 1992 a condamné ce dernier à payer une indemnité d'assurance à Mme
Y...
, sous réserve du montant dû à l'UCB qui n'avait pas été appelée dans cette procédure ; que, par assignation délivrée le 8 octobre 1992 à Mme Y..., l'UCB a formé une tierce opposition contre cet arrêt ; que, par un second arrêt rendu le 19 janvier 1994, la cour d'appel a admis la recevabilité de la tierce opposition, fixé la créance de l'UCB à un certain montant et dit que les AGF devraient le lui payer sur l'indemnité d'assurance due à Mme
Y...
;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches :
Attendu que Mme Y... reproche au second arrêt d'avoir ainsi statué alors que, d'une part, un créancier ne peut former tierce opposition qu'à un jugement rendu en fraude de ses droits où s'il invoque un moyen qui lui est propre, de sorte qu'aurait été violé l'article 583, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, et alors que, d'autre part, l'exigence d'un procès équitable résultant de l'article 6.1, de la Convention européenne des droits de l'homme impliquerait un droit au double degré de juridiction dont aurait été privée Mme Y..., dès lors qu'à l'occasion de la tierce opposition l'UCB invoquait pour la première fois la déchéance du terme du prêt ;
Mais attendu, d'abord, que l'article L. 121-13 du Code des assurances confère au créancier privilégié ou hypothécaire un droit personnel sur l'indemnité d'assurance due en raison de l'incendie de la chose assurée et que cette indemnité ne tombe pas dans le patrimoine du débiteur ; que ce créancier peut invoquer des moyens propres pour faire valoir son droit personnel sur l'indemnité d'assurance et est recevable à former tierce opposition à un jugement, dès lors qu'il y a intérêt ;
Attendu, ensuite, que les dispositions de l'article 6.1, de la Convention européenne des droits de l'homme n'impliquent pas un droit au double degré de juridiction en matière civile ;
Sur le second moyen pris en ses deux premières branches : (sans intérêt) ;
Mais sur la troisième branche du second moyen ;
Vu l'article 2244 du Code civil ;
Attendu que la prescription ainsi que le délai pour agir sont interrompus par une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire ; que cette énumération est limitative ;
Attendu que Mme Y... avait opposé à l'UCB la prescription quinquennale, résultant de l'article 2277 du Code civil, des intérêts du prêt pour la période antérieure de plus de 5 ans à l'assignation en tierce opposition ; que la cour d'appel a écarté ce moyen au motif que la prescription avait été interrompue par l'opposition faite à l'assureur le 6 mai 1988 par lettre recommandée avec avis de réception ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'une lettre recommandée ne peut être assimilée à une citation, commandement ou saisie et qu'un acte n'est interruptif de prescription que s'il est adressé à la personne qu'on veut empêcher de prescrire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de Mme Y... tendant à l'application de la prescription quinquennale des intérêts du prêt, l'arrêt rendu le 19 janvier 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que les intérêts échus depuis plus de cinq ans avant l'assignation en tierce oppostion du 8 octobre 1992 sont prescrits.