Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 92-45.059, 92-45.060, 92-45.061, 92-45.062, 92-45.063, 92-45.064, 92-45.065, 92-45.066, et 92-45.067 ;
Attendu, selon les neuf jugements attaqués, que MM. E..., D..., B..., F..., X..., A..., Y..., Z... et C..., exerçant les fonctions de convoyeur de fonds depuis plusieurs années au service de la société Brink's Nord-Est, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le moyen commun aux huit pourvois incidents autres que le n° 92-45.063 :
Attendu que MM. E..., D..., B..., F..., A..., Y..., Z... et C... font grief aux jugements d'avoir rejeté leurs demandes en paiement d'un complément de prime d'ancienneté, calculé en fonction des heures supplémentaires effectuées, et de l'indemnité de congés payés afférente à cette prime, alors, selon le moyen, que l'article 12 de l'annexe 1 de la convention collective applicable vise, non pas à garantir au salarié une rémunération globale, mais une rémunération effective, correspondant à la durée du travail effectif pendant la période considérée, ce qui lui permet de prétendre au paiement d'une prime d'ancienneté calculée sur le montant global de sa rémunération, y compris les heures supplémentaires ; qu'en statuant comme ils l'ont fait de ce chef, les juges du fond ont violé les dispositions des articles 12 et 13 de la Convention collective des transports routiers et des activités auxiliaires du transport ;
Mais attendu que les articles 12 et 13 de l'annexe 1 de la convention collective, alors applicables, instituant, non pas une prime d'ancienneté, mais une majoration de la rémunération globale minimum, les juges du fond, qui ont constaté que la rémunération perçue par les salariés était supérieure à celle correspondant au minimum garanti par la convention collective, ont justifié leur décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le moyen propre au pourvoi incident formé par M. E... :
Attendu que M. E... fait, en outre, grief au jugement le concernant d'avoir rejeté sa demande en paiement d'heures différentielles de chef de voiture, alors, selon le moyen, que l'article 4 de l'annexe 1 de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport n'exige pas que la période de 4 mois pendant laquelle le salarié est affecté à un poste autre que le sien soit continue ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, les juges du fond ont violé les dispositions de ce texte ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes a exactement énoncé que l'article 4 de l'annexe 1 de la convention collective, alors applicable, ne s'appliquait qu'au salarié affecté de manière continue à un poste différent de celui de son emploi habituel pendant plus de 4 mois ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique des neuf pourvois principaux :
Vu l'article 7 bis de l'annexe 1 de la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport et l'article 3 de l'Accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977, rendu obligatoire par la loi n° 78-49 du 19 janvie 1978 sur la mensualisation ;
Attendu que, pour condamner la société au paiement d'une rémunération afférente à des jours fériés chômés, d'heures supplémentaires subséquentes et du dimanche 14 juillet 1991, le jugement a énoncé que la loi du 19 janvier 1978 ne s'applique que s'il n'existe pas de dispositions conventionnelles plus favorables ; que l'article 7 bis de l'annexe 1 de la convention collective dispose que le personnel ouvrier mensualisé justifiant d'une année d'ancienneté bénéficie d'une indemnité pour chaque jour férié non travaillé ; qu'en raison du caractère explicite de la locution " pour chaque jour férié ", il convient de considérer que cet article renvoie seulement aux conditions d'attribution de la prime pour le personnel non mensualisé sans limiter le nombre de jours fériés ; que la disposition conventionnelle ainsi interprétée étant plus favorable que le régime légal, elle doit recevoir application ;
Attendu cependant que l'article 7 bis de l'annexe 1 de la convention collective, issu des avenants à cette convention en date des 13 novembre 1970 et 17 juillet 1975, visait au maintien de la rémunération intégrale du personnel ouvrier mensualisé, afin d'empêcher toute réduction de cette rémunération à l'occasion des jours fériés non travaillés ; qu'il avait donc le même objet que celui prévu ultérieurement par l'article 3 de l'accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977, rendu obligatoire par la loi du 19 janvier 1978 pour l'ensemble des salariés, dans la mesure où ces droits ne leur étaient pas reconnus antérieurement ; qu'il en résulte que ces deux avantages ne pouvaient se cumuler ;
Qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la Cour de Cassation est en mesure de mettre fin au litige en faisant application de la règle de droit appropriée ; que la cassation sera prononcée sans renvoi, en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois incidents ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans leurs dispositions relatives à la rémunération des jours fériés non travaillés, les jugements rendus le 7 octobre 1992, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Compiègne ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DEBOUTE les salariés de leurs demandes relatives à la rémunération des jours fériés non travaillés.