Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu en référé (Rennes, 15 septembre 1992), que la société Timo Breiz a été conduite au mois de décembre 1991 à envisager le licenciement pour motif économique de 15 salariés ; qu'elle a mis en oeuvre la procédure d'information consultation du comité d'entreprise dont la première réunion a été fixée au 18 décembre ; que les représentants du personnel lui ont alors reproché de n'avoir pas établi de plan social et ont estimé que la réunion du 18 décembre ne pouvait tenir lieu de première réunion au sens de la loi, appréciation confirmée par l'inspecteur du Travail ; que la société a néanmoins poursuivi la procédure de consultation et a provoqué une deuxième réunion du comité d'entreprise le 9 janvier 1992, en ramenant le nombre de salariés dont le licenciement était envisagé à onze ; que finalement 9 salariés ont été licenciés le 17 avril 1992 ; que MM. X..., Le Moal et Rosmorduc, qui étaient compris dans le projet de licenciement et font partie des salariés licenciés, ont, avant d'être licenciés, demandé à la formation des référés du conseil de prud'hommes d'ordonner la suspension des licenciements ; que la cour d'appel a décidé que les juges auraient dû ordonner la reprise de la procédure de licenciement et la suspension des licenciements et a condamné la société aux dépens et à une somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la société Timo Breiz fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que la formation de référé prud'homal a le pouvoir soit d'ordonner des mesures conservatoires ou de remise en état ou qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse, soit d'accorder une provision ou ordonner l'exécution de l'obligation qui n'est pas sérieusement contestable, même s'il s'agit d'une obligation de faire ; qu'en l'espèce, ayant constaté, d'une part, que les salariés avaient saisi la formation de référé prud'homal pour voir ordonner à la société " de surseoir à leur licenciement et de reprendre la procédure légale de licenciement à son début en respectant l'ensemble des dispositions prévues par la loi ", d'autre part, qu'en cause d'appel les procédures de licenciement étaient à leur terme, la cour d'appel, statuant en référé, avait épuisé ses pouvoirs qu'elle détient des articles R. 516-30 et R. 516-31 du Code du travail et devait en déduire n'y avoir lieu à statuer ; qu'en réformant l'ordonnance, pour statuer à nouveau et dire que les premiers juges auraient dû faire droit à la demande initiale des salariés, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ; alors, d'autre part, que, en toute hypothèse, la formation de référé prud'homal trouve la limite de ses pouvoirs dans celle de la compétence des conseils de prud'hommes, lesquels en cas de licenciement collectif pour motif économique, quand la procédure requise à l'article L. 321-2 n'a pas été respectée par l'employeur, doit accorder au salarié une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, sans pouvoir imposer à l'employeur d'accomplir la procédure prévue ; qu'en déclarant que le juge des référés aurait pu en l'espèce ordonner à la société de reprendre la procédure de licenciement en respectant la procédure légale, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-4, R. 516-30 et R. 516-31 du Code du travail ; alors, enfin, que, et au surplus, l'existence d'une contestation sérieuse sur l'étendue des pouvoirs des juges des référés excluait qu'ils puissent ordonner à la société de reprendre la procédure de licenciement en respectant la procédure légale ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 516-31, alinéa 2, du Code du travail ;
Mais attendu que si le référé était devenu sans objet au moment où la cour d'appel a statué, il ne peut être reproché à celle-ci d'avoir, pour déterminer la partie tenue aux frais de l'instance, examiné si la demande était justifiée lorsqu'elle avait été soumise au premier juge ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a exactement décidé que l'absence de plan social et de mesures de reclassement constituait un trouble manifestement illicite, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.