Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 93-41.281 et 93-41.292 ;
Sur les moyens :
Vu les articles 1134 du Code civil, 4 du nouveau Code de procédure civile, 621 du même Code et R. 517-4 du Code du travail ;
Attendu qu'en application des deux premiers de ces textes il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que, d'après le troisième, lorsque la Cour de Cassation constate la déchéance d'un pourvoi, la partie qui l'a formé n'est plus recevable à en former un nouveau contre le même jugement ; que, selon le quatrième, le jugement du conseil de prud'hommes n'est pas susceptible d'appel si la seule demande reconventionnelle en dommages-intérêts, lorsqu'elle est fondée exclusivement sur la demande initiale, dépasse le taux de la compétence en dernier ressort ;
Attendu, selon la procédure, que M. X... et M. Y..., après leurs démission, ont respectivement attrait leur employeur, la société Structures industrielles 2000 (la société) devant la juridiction prud'homale, en lui réclamant la restitution de cotisations retenues sur les salaires et le paiement de dommages-intérêts ; que dans chaque instance, l'employeur a formé une demande reconventionnelle en réparation du préjudice, évalué à 25 000 francs, causé par les agissements concurrentiels de son salarié ; que par jugements qualifiés en dernier ressort le conseil de prudh'ommes a condamné la société à indemniser le préjudice moral respectif des salariés et rejeté ses demandes reconventionnelles ; que les pourvois formés contre ces décisions par la société ont fait l'objet d'ordonnances de déchéance ;
Attendu que, pour déclarer irrecevables les appels des mêmes jugements interjetés par la société, la cour d'appel énonce, d'une part, que le pourvoi en cassation étant une voie de recours extraordinaire qui ne peut coexister avec une voie de recours ordinaire, il ne peut plus être statué par la voie de l'appel après déchéance du pourvoi, d'autre part, que la demande reconventionnelle, bien que non rattachable à la demande initiale, ne relevait pas du conflit prud'homal dès lors que les faits concurrentiels invoqués par l'employeur devant les premiers juges étaient postérieurs à la rupture du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la déchéance du pourvoi en cassation est sans effet sur l'exercice du droit d'appel, les juges du fond, après avoir dénaturé les conclusions de l'employeur faisant état d'agissements concurrentiels des salariés durant l'exécution du contrat de travail, n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations relatives à l'absence de lien exclusif entre la demande initiale et la demande reconventionnelle en dommages-intérêts, qui dépassait le taux de la compétence en dernier ressort, et ont ainsi violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, les arrêts rendus le 22 octobre 1992, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims.