Attendu que M. Y..., reprochant à sa femme d'avoir méconnu ses engagements en adhérant aux Témoins de Jéhovah, et invoquant notamment de graves perturbations dans la vie familiale et l'opposition dans l'éducation des enfants, a demandé le divorce ; que, par arrêt du 29 juin 1992, confirmatif de l'ordonnance de non-conciliation, la résidence habituelle des enfants communs a été fixée chez le père ; que l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 novembre 1994) a prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de la femme et a maintenu la résidence des enfants chez le père ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'épouse, alors, selon le moyen, que, d'une part, la liberté de conscience et de religion qui implique celle de changer de religion postule la possibilité pour le croyant, fût-il converti, de satisfaire les exigences du culte choisi non seulement en public mais aussi de façon individuelle et privée ; qu'à cet égard l'appartenance à la communauté religieuse des Témoins de Jéhovah génère certaines obligations spécifiques, notamment lors des fêtes religieuses ; qu'en retenant comme unique grief de la cause du divorce imputable à l'épouse, le fait qu'à partir de 1989 celle-ci s'est refusée à participer aux fêtes de famille telles que les anniversaires des enfants, ainsi qu'aux fêtes religieuses en particulier de Noël et de Pâques, malgré le caractère aussi familial que religieux de ces dernières, la cour d'appel méconnaît ce qu'implique la liberté de conscience et de religion et partant viole l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble, l'article 242 du Code civil ; alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, le juge se devant de tenir compte des exigences de la liberté de conscience et de la liberté de religion, se devait par rapport à un manquement allégué, s'agissant des obligations nées du mariage, de vérifier si les exigences de la pratique de la religion des Témoins de Jéhovah, notamment en ce qui concerne les anniversaires et les fêtes religieuses, étaient compatibles avec la satisfaction des devoirs et obligations nés du mariage, et préciser en quoi ceux-ci prévaudraient sur ce qu'une pratique normale du culte des Témoins de Jéhovah postule, notamment en ce qui concerne les fêtes religieuses ; qu'en ne procédant pas à une telle recherche et à une telle comparaison qui s'imposaient, la cour d'appel ne permet pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle au regard de l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble au regard de l'article 242 du Code civil ; alors que, de troisième part, la liberté de religion postule celle d'exercer ladite religion selon ses préceptes, en sorte que, sauf circonstances exceptionnelles nullement caractérisées en l'espèce, et sauf atteinte à l'ordre public pas davantage caractérisé, celui qui appartient à une communauté religieuse ne peut se voir reprocher par le juge civil un manquement à ses obligations d'époux dans la mesure où le manquement imputé est excusé par le fait religieux qui s'impose et que tel est le cas s'agissant des Témoins de Jéhovah, spécialement pour les fêtes religieuses ; qu'en jugeant de façon abrupte le contraire, pour prononcer le divorce aux torts exclusifs de l'épouse Témoin de Jéhovah, la cour d'appel viole de plus fort les textes cités au précédent élément du moyen ; et alors, enfin, que la cour d'appel ne pouvait affirmer que la seule circonstance de s'être refusée à participer aux fêtes de famille telles que les anniversaires des enfants, ainsi qu'aux fêtes religieuses, en particulier de Noël, malgré le caractère aussi familial que religieux de ces dernières, caractérisait un grief au sens de l'article 242 du Code civil, sans se prononcer sur la nécessaire articulation entre
ces données et les exigences de l'appartenance à la communauté des Témoins de Jéhovah, spécialement en ce qui concerne les fêtes religieuses ; qu'en ne procédant pas à cette pesée, qui s'imposait pour satisfaire la nécessaire articulation susceptible d'être normalement trouvée entre la liberté de conscience et de religion qui constitue un pilier de notre droit substantiel, et le respect des devoirs et obligations nés du mariage, ensemble le respect et l'institution même du mariage, la cour d'appel ne met pas à même la Cour de Cassation d'exercer son contrôle au regard de l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la liberté de conscience et de religion, ensemble au regard de l'article 242 du Code civil ;
Mais attendu que c'est par une appréciation souveraine que la cour d'appel retient qu'à partir de 1989 Mme X... s'est refusée à participer aux fêtes de famille telles que les anniversaires des enfants, ainsi qu'aux fêtes de Noël, malgré le caractère aussi familial que religieux de ces dernières, et que ce comportement constitue une violation renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien du mariage ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.