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03/10/1996 | FRANCE | N°95-85959

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 octobre 1996, 95-85959


REJET des pourvois formés par :
- X... Marc,
- Y... Karine, épouse X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 2 novembre 1995, qui a condamné le premier, pour organisation ou aggravation de son insolvabilité, à 1 an d'emprisonnement, la seconde, pour complicité de ce délit, à 10 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 404-1 de l

'ancien Code pénal, 314-7 à 314-9 du nouveau Code pénal, 184, 388, 591 et 593 du C...

REJET des pourvois formés par :
- X... Marc,
- Y... Karine, épouse X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 2 novembre 1995, qui a condamné le premier, pour organisation ou aggravation de son insolvabilité, à 1 an d'emprisonnement, la seconde, pour complicité de ce délit, à 10 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 404-1 de l'ancien Code pénal, 314-7 à 314-9 du nouveau Code pénal, 184, 388, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré les époux X...- Y... coupables d'organisation frauduleuse d'insolvabilité et complicité et les a condamnés à des peines d'emprisonnement ;
" 1° Aux motifs propres et adoptés qu'à l'époque de ces agissements délictueux, Marc X... avait acquis, le 17 avril 1985, un immeuble à Vitry-sur-Seine,... ; que 3 ans plus tard il constituait avec Karine Y... une SCI " CAP-C " au capital de 10 000 francs réparti à raison de 9 000 francs pour lui et 1 000 francs pour elle ; que, le 10 novembre 1988, Marc X... vendait à la SCI " CAP-C ", l'immeuble au..., à Vitry-sur-Seine ; que le 28 mars 1989, la SCI " CAP-C " acquérait un second immeuble sis à Vitry-sur-Seine, rue... ; qu'en l'espèce Marc X..., propriétaire d'un immeuble, l'a tout d'abord cédé à une société civile immobilière suffisamment in bonis pour acquérir 4 mois plus tard un autre immeuble pour le prix de 1 500 000 francs dont 300 000 francs comptant ; que la comptabilité de la SCI n'ayant aucune valeur probante il est pour le moins suspect que les associés aient, 17 mois après cet achat, constaté qu'il serait judicieux pour la bonne marche de la société de procéder à une augmentation de capital ; que Marc X... a organisé son insolvabilité en réduisant autant que possible ses droits sur 2 immeubles appartenant en définitive au couple ; que les premiers juges, en relatant dans les motifs du jugement, la cession réalisée le 10 novembre 1988 au profit de la SCI " CAP-C ", n'ont fait que préciser les circonstances, telles qu'elles avaient été établies par le dossier, dans lesquelles la décision incriminée d'augmenter le capital de la SCI avait été prise, et n'ont aucunement méconnu les limites de leur saisine ;
" alors que le juge correctionnel ne peut statuer légalement que sur les faits relevés par l'ordonnance qui l'a saisi ; qu'en l'espèce l'ordonnance rendue le 26 mars 1993, par le magistrat instructeur, a renvoyé les époux X...
Y... devant le tribunal correctionnel pour y répondre des délits d'organisation ou d'aggravation frauduleuse d'insolvabilité et complicité, délits qui auraient été commis à Vitry-sur-Seine " le 28 août 1990 ", en réduisant au moyen d'une augmentation de capital irrégulière la valeur des parts dont Marc X... était porteur dans la SCI " CAP-C " ; qu'en se fondant, pour retenir la culpabilité des demandeurs, sur des faits antérieurs au 28 août 1990 qui n'étaient pas visés par l'ordonnance de renvoi, ajoutant aux faits de la poursuite et, excédant ainsi leurs pouvoirs, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2° Et aux motifs propres qu'il est constant que l'augmentation de capital, en ramenant la participation de Marc X... dans le capital social de la SCI " CAP-C " de 90 % à 3 % a eu pour effet de réduire, dans la même proportion, les droits de ce dernier, sur les bénéfices et l'actif net de la société ; qu'il apparaît bien que l'augmentation de capital, sans utilité réelle pour la SCI à laquelle elle n'apportait pas de trésorerie, et l'attribution à Karine Y... de 2 900 parts nouvelles n'étaient qu'une opération destinée à transférer à Karine Y..., épouse séparée de biens, devenue propriétaire de 97 % des parts représentant le capital social, la presque totalité des droits sur l'actif social et à appauvrir corrélativement Marc X... ; que la concomitance du dépôt au greffe du procès-verbal d'assemblée générale décidant l'augmentation du capital et du jugement validant la saisie, démontre que l'opération n'avait d'autre but, en réduisant la valeur des parts saisies par la CIRICA, que de soustraire Marc X... à l'exécution du jugement de condamnation du 14 novembre 1989 ;
" alors, d'une part, que l'élément matériel de l'infraction prévu par l'article 404-1 du Code pénal, consiste, soit en une augmentation du passif du débiteur, soit en une diminution de son actif ayant pour but de le soustraire à l'exécution d'une condamnation pécuniaire ; qu'en l'espèce les demandeurs soutenaient que la valeur nominale des parts détenues par Marc X... (100 francs) n'a nullement été modifiée par la décision d'augmentation du capital, que ce dernier n'a nullement démembré, par l'augmentation du capital, la créance qu'il détenait sur la SCI, puisqu'il a intégralement conservé la disposition des 90 parts représentatives de la créance ; qu'ils démontraient qu'en effet la valeur vénale des parts de SCI se calcule en fonction de la valeur de l'actif et du montant du passif, que, dès avant l'augmentation du capital social, le passif était bien supérieur à l'actif réalisable ; que la valeur vénale des parts se réduisait donc à la valeur nominale soit 100 francs, l'augmentation du capital était dès lors insusceptible de diminuer la valeur vénale des parts de Marc X..., que cette opération n'avait donc pas pour effet de réduire l'actif de Marc X... ; que la cour d'appel, en ne recherchant pas si l'ensemble de ces circonstances, qui démontraient que la valeur des droits de Marc X... dans la SCI " CAP-C " n'a pas été réduite par l'augmentation du capital, n'étaient pas de nature à exclure en l'espèce l'élément matériel de l'infraction, a privé sa décision de base légale ;
" alors, d'autre part, que l'élément intentionnel de l'infraction consiste dans la conscience et la volonté d'organiser ou d'aggraver son insolvabilité afin de se soustraire à l'exécution d'une condamnation pécuniaire ; qu'en l'espèce les demandeurs soutenaient qu'à la date du 28 août 1990, la SCI " CAP-C " affichait déjà un passif largement excédentaire, résultant notamment des emprunts bancaires contractés pour l'achat de 2 immeubles en 1988 et 1989 figurant à l'actif de la société, et rendu indisponible du fait de l'inscription de créances privilégiées de la part des banques ; que, compte tenu des déficits antérieurs cumulés, les pertes comptables s'élevaient à près de 300 000 francs ; que la cour d'appel, en ne recherchant pas si l'augmentation de capital, par incorporation de la créance en compte courant de Karine Y..., faisant perdre à cette créance son caractère d'exigibilité et ayant pour effet d'assainir la trésorerie, d'éviter la liquidation à court terme de la SCI et d'augmenter la solvabilité de Marc X... vis-à-vis de la CIRICA, en diminuant ses engagements financiers vis-à-vis des tiers, ne permettait pas d'écarter toute volonté d'organiser l'insolvabilité de Marc X..., a privé sa décision de base légale " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, par jugement définitif du 14 novembre 1989, Marc X..., déclaré coupable de faux, escroquerie et recel, a été condamné à payer à la société CIRICA une indemnité de 2 500 000 francs ; que cette société a fait pratiquer une saisie-arrêt, validée par jugement du 27 novembre 1990, sur les 90 parts que Marc X... possédait dans la société civile immobilière constituée entre lui-même et son épouse, Karine Y..., titulaire des 10 autres parts du capital social ; que, dès le 1er décembre 1990, Marc X... a déposé au greffe du tribunal de commerce un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de la société, datée du 28 août 1990, décidant l'augmentation du capital social de 10 000 francs à 300 000 francs par création de 2 900 parts qui ont été intégralement souscrites par Karine Y... par voie d'abandon d'une créance sur la société ;
Attendu que, pour condamner Marc X... pour organisation ou aggravation de son insolvabilité et Karine Y... pour complicité de ce délit, les juges relèvent que l'augmentation de capital, en ramenant la participation du premier dans le capital social de 90 % à 3 %, a eu pour effet de réduire dans la même proportion ses droits sur les bénéfices et l'actif net de la société ; qu'ils retiennent que les modalités de cette opération, réalisée à une date incertaine et au moyen d'un abandon par Karine Y... d'une créance fictive, démontrent la volonté des prévenus, seuls associés de la société, de réduire le patrimoine de Marc X..., qui ne justifie pas être propriétaire d'autres biens mobiliers ou immobiliers ; qu'ils énoncent que cette augmentation de capital, sans utilité pour la société, n'a été destinée qu'à transférer à Karine Y..., épouse séparée de biens, la presque totalité des droits sur l'actif social, à appauvrir corrélativement Marc X... et, en réduisant la valeur des parts saisies, à soustraire ce dernier à l'exécution d'une condamnation pécuniaire prononcée par une juridiction répressive ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel, qui n'a en rien excédé les limites de sa saisine, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-85959
Date de la décision : 03/10/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSOLVABILITE FRAUDULEUSE - Eléments constitutifs - Elément intentionnel - Constatations suffisantes.

INSOLVABILITE FRAUDULEUSE - Eléments constitutifs - Elément matériel - Constatations suffisantes

INSOLVABILITE FRAUDULEUSE - Eléments constitutifs - Elément matériel - Agissements ayant pour objet d'organiser ou d'aggraver l'insolvabilité - Nature - Société - Augmentation de capital social - Réduction corrélative de la valeur des parts saisies

Caractérise le délit d'insolvabilité frauduleuse, prévu à l'article 404-1 ancien du Code pénal, devenu l'article 314-7 de ce Code, l'arrêt qui constate que, pour se soustraire à l'exécution d'une condamnation pécuniaire prononcée par une juridiction répressive, le prévenu qui, après la saisie de ses parts dans la société immobilière qu'il avait constituée avec son épouse séparée de biens, dépose au greffe du tribunal de commerce un procès-verbal d'une assemblée générale de la société qui se serait tenue à une date antérieure à celle de la saisie et qui aurait décidé l'augmentation du capital social par création de parts intégralement souscrites sans contrepartie réelle par son épouse, en transférant ainsi à cette dernière la presque totalité des droits sur l'actif social et en réduisant corrélativement la valeur des parts saisies.


Références :

Code pénal 404-1
nouveau Code pénal 314-7

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 novembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 oct. 1996, pourvoi n°95-85959, Bull. crim. criminel 1996 N° 347 p. 1031
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 347 p. 1031

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Perfetti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Schumacher.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Monod.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.85959
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