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24/09/1996 | FRANCE | N°95-84632

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 septembre 1996, 95-84632


ACTION PUBLIQUE ETEINTE ET CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la commune de X..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 15 juin 1995, qui, dans la procédure suivie contre Y..., du chef de refus d'insertion de réponse, a relaxé le prévenu, débouté la partie civile et condamné celle-ci pour abus de constitution de partie civile.
LA COUR,
1o Sur l'action publique :
Attendu que, selon l'article 2, alinéa 2-5 de la loi du 3 août 1995, sont amnistiés, lorsque, comme en l'espèce, ils sont antérieurs au 18 mai 1995

, les délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la press...

ACTION PUBLIQUE ETEINTE ET CASSATION sur le pourvoi formé par :
- la commune de X..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 15 juin 1995, qui, dans la procédure suivie contre Y..., du chef de refus d'insertion de réponse, a relaxé le prévenu, débouté la partie civile et condamné celle-ci pour abus de constitution de partie civile.
LA COUR,
1o Sur l'action publique :
Attendu que, selon l'article 2, alinéa 2-5 de la loi du 3 août 1995, sont amnistiés, lorsque, comme en l'espèce, ils sont antérieurs au 18 mai 1995, les délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ; qu'ainsi l'action publique est éteinte à l'égard du prévenu ;
Attendu cependant que, selon l'article 21 de la loi d'amnistie précitée, la juridiction de jugement saisie de l'action publique reste compétente pour statuer sur les intérêts civils ;
2o Sur l'action civile :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 13, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1881, L. 122-11 et L. 122-19.8° du Code des communes, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, ayant renvoyé le prévenu Y..., directeur de publication, des fins de la poursuite du chef de refus d'insertion d'un droit de réponse, a débouté la commune de X..., partie civile, de ses demandes ;
" aux motifs que le droit de réponse, dont le refus de mise en oeuvre, s'il est régulièrement sollicité, constitue le délit de refus d'insertion prévu par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, est un droit strictement personnel, ne pouvant être exercé que par la personne physique ou morale mise en cause ou par son représentant légal s'il s'agit d'un incapable ou d'une personne morale ;
" qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce, c'est la commune de X... qui était visée dans les différents passages dans la lettre d'information ;
" qu'en application de l'article 132-19.8° du Code des communes, le maire, sous le contrôle du conseil municipal, représente la commune soit en demandant, soit en défendant ;
" que, dans ces conditions, le prévenu n'était pas tenu aux insertions sollicitées par une personne autre que le représentant légal de la personne mise en cause, se contentant de mentionner sa qualité d'adjoint délégué au maire, qualité insuffisante à elle seule, en l'absence de toute justification, à le faire apparaître comme ayant qualité pour exercer le droit de réponse (arrêt page 6, al. 1 à 4) ;
" 1° Alors que, sans habiliter le délégataire à agir en justice au nom de la commune en lieu et place du maire, la délégation de fonctions visée à l'article L. 122-11 du Code des communes permet à un adjoint, dans les domaines visés par l'acte de délégation, d'effectuer, pour la commune, tous les actes d'administration, au nombre desquels figure, notamment, la demande d'insertion d'un droit de réponse à une information concernant l'activité de la commune dont l'administration est déléguée à cet adjoint, sans que celui-ci soit tenu, pour exercer ce droit, d'être investi des fonctions visées à l'article L. 122-19.8° du même code, réservé aux actions en justice diligentées au nom de la commune ;
" qu'en l'espèce il est constant que Z..., qui bénéficiait d'une délégation de fonctions en ce qui concerne l'urbanisme et le logement, s'est borné à solliciter un droit de réponse auprès de Y..., directeur de la publication ayant diffusé un article mettant précisément en cause la politique de la commune en matière d'urbanisme et de logement, tandis que l'action en justice elle-même a été diligentée par le maire, A..., représentant légal de la ville de X... ;
" qu'ainsi, en se déterminant par la circonstance que faute, pour Z..., d'avoir été régulièrement investi des fonctions de représentant légal de la commune, au sens de l'article L. 122-19.8° du Code des communes, le prévenu n'était pas tenu aux insertions sollicitées par l'adjoint délégué, sans rechercher si, comme le soutenait la partie civile, l'intéressé n'était pas habilité à accomplir tous les actes d'administration dont l'objet était compris dans la délégation de fonctions à lui délivrée, la cour d'appel, qui se fonde sur un motif inopérant, a privé sa décision de toute base légale ;
" 2° Alors que le droit de réponse appartient également à celui qui est implicitement mis en cause ;
" qu'ainsi, en se bornant à énoncer que c'est la commune de X... qui était visée dans l'écrit litigieux, sans rechercher si, par sa teneur et son objet, la publication n'était pas implicitement dirigée contre la gestion municipale en matière d'urbanisme, c'est-à-dire contre le maire adjoint qui en avait la responsabilité, et si, par conséquent, celui-ci, titulaire d'une délégation de fonctions à l'urbanisme et qui avait établi la demande de réponse sur papier à en-tête de la ville de X..., n'avait pas en toute hypothèse qualité pour exercer le droit de réponse tant au nom du maire dont les pouvoirs lui avaient été délégués que de la commune dont il était le responsable en matière d'urbanisme que de lui-même en tant qu'adjoint à l'urbanisme, la Cour a privé son arrêt de base légale " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, d'une part, les appréciations relatives à la teneur d'une réponse dont l'insertion a été refusée, comme celles de l'écrit qui a provoqué cette réponse, sont soumises au contrôle de la Cour de Cassation ;
Attendu que, d'autre part, l'exercice du droit de réponse prévu par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, qui n'est pas une action en justice, entre dans la catégorie des actes susceptibles d'être accomplis par le maire ou son adjoint, en application des articles L. 122-11, L. 122-19 et L. 316-4 du Code des communes, dont les dispositions sont reprises aux articles L. 2122-18, L. 2122-21 et L. 2132-3 du Code général des collectivités territoriales ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que, par 8 lettres recommandées datées du 9 septembre 1993, Z..., adjoint au maire de la ville de X..., a adressé des demandes d'insertion de réponses à Y..., président de l'association " Information et défense de X... Ouest ", éditrice d'une lettre d'information dont le n° 5, daté du 11 juin 1993, comportait 8 articles de mise en cause ; que les réponses n'ayant pas été insérées dans le numéro suivant de la lettre d'information, la commune de X..., représentée par son maire, a fait citer directement Y..., par 8 actes d'huissier, devant le tribunal correctionnel, du chef de refus d'insertion de réponses ; qu'après jonction des procédures le tribunal a relaxé le prévenu et débouté la partie civile ;
Attendu que, pour confirmer cette décision, sur les appels de la partie civile et du ministère public, l'arrêt attaqué, après avoir précisé que la commune était mise en cause par les articles incriminés et que les demandes d'insertion étaient signées " pour le maire, l'adjoint délégué ", se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en se bornant à ces seules énonciations, qui ne reproduisent ni la teneur des réponses, ni celle des articles les ayant suscitées, alors que ni les réponses ni les articles ne figurent parmi les pièces de la procédure, et en omettant de surcroît de rechercher les modalités de la délégation de compétence consentie à Z..., et si la commune était mise en cause à raison d'actes ressortissant aux fonctions d'administration déléguées à l'adjoint par le maire, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle ;
Que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen proposé :
1o Sur l'action publique :
La DÉCLARE ÉTEINTE ;
2o Sur l'action civile :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions civiles, l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 15 juin 1995, et, pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-84632
Date de la décision : 24/09/1996
Sens de l'arrêt : Action publique éteinte et cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° PRESSE - Droit de réponse - Insertion - Refus - Validité - Contrôle de la Cour de Cassation.

1° Leurs appréciations étant soumises au contrôle de la Cour de Cassation, il appartient aux juges de préciser la teneur de la réponse dont l'insertion a été refusée, comme celle de l'écrit qui a provoqué cette réponse, lorsque ces documents ne figurent pas parmi les pièces de la procédure(1).

2° PRESSE - Droit de réponse - Exercice - Personne nommée ou désignée - Personne morale - Commune - Adjoint au maire - Conditions.

2° MAIRE - Pouvoirs - Droit de réponse - Exercice - Conditions.

2° L'exercice du droit de réponse prévu par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, qui n'est pas une action en justice, entre dans la catégorie des actes susceptibles d'être accomplis par le maire ou son adjoint, en application des articles L. 122-11, L. 122-19, L. 316-4 du Code des communes, dont les dispositions sont reprises aux articles L. 2122-18, L. 2122-21 et L. 2132-3 du Code général des collectivités territoriales. Encourt la cassation l'arrêt qui omet de rechercher les modalités de la délégation de compétence consentie à un adjoint par le maire, et si la commune était mise en cause à raison d'actes ressortissant aux fonctions d'administration déléguées à cet adjoint(2).


Références :

2° :
2° :
Code des communes L122-11, L122-19, L316-4
Code général des collectivités territoriales L2122-18, L2122-21, L2132-3
Loi du 29 juillet 1881 art. 13

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 juin 1995

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1969-01-16, Bulletin criminel 1969, n° 36, p. 81 (cassation partielle), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1972-06-14, Bulletin criminel 1972, n° 205, p. 534 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1988-02-02, Bulletin criminel 1988, n° 54, p. 148 (cassation partielle), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1989-12-16, Bulletin criminel 1989, n° 493, p. 1211 (cassation partielle), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) A comparer : Chambre criminelle, 1956-11-06, Bulletin criminel 1956, n° 712, p. 1257 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 sep. 1996, pourvoi n°95-84632, Bull. crim. criminel 1996 N° 330 p. 984
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 330 p. 984

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Cotte.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Guerder.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Nicolay et de Lanouvelle.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.84632
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