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04/09/1996 | FRANCE | N°93-83764

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 septembre 1996, 93-83764


REJET du pourvoi formé par :
- La Société Sadis, partie civile,
contre l'arrêt n° 641 de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 29 juillet 1993, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Michel X... du chef de refus d'insertion de réponse, a relaxé le prévenu et débouté la partie civile.
LA COUR,
Vu l'article 21 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 32, 486 et 593 du Code de procédure pénale, violation de la

loi et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué ne fait état de la pré...

REJET du pourvoi formé par :
- La Société Sadis, partie civile,
contre l'arrêt n° 641 de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 29 juillet 1993, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Michel X... du chef de refus d'insertion de réponse, a relaxé le prévenu et débouté la partie civile.
LA COUR,
Vu l'article 21 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 32, 486 et 593 du Code de procédure pénale, violation de la loi et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué ne fait état de la présence du ministère public qu'à l'audience des débats et non à celle du prononcé de l'arrêt, de sorte qu'en l'état de ces énonciations, il n'est nullement établi que le ministère public, partie intégrante et nécessaire des juridictions répressives, ait été présent à l'audience du 29 juillet 1993, où a été rendu l'arrêt attaqué, ainsi que l'exigent les dispositions d'ordre public de l'article 32 du Code de procédure pénale " ;
Attendu que l'arrêt attaqué constate la présence et l'audition du représentant du ministère public à l'audience des débats, sans préciser qu'il assistait également à sa lecture ;
Qu'en cet état, le grief allégué n'est pas fondé ;
Qu'en effet, si les articles 32, 486 et 510 du Code de procédure pénale exigent que le ministère public, partie nécessaire au procès pénal, soit présent à chaque audience des juridictions de jugement, il résulte de l'article 592 du même Code qu'à l'instar des magistrats composant la juridiction, il est présumé avoir assisté à toutes les audiences de la cause, dès lors qu'il a été entendu en ses réquisitions à celle des débats ; que, selon l'alinéa 2 de ce texte, la nullité de la décision n'est encourue qu'à défaut de cette audition ; qu'il n'importe que la minute ne mentionne pas la présence du ministère public au prononcé ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 13 de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, contradiction de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Jean-Michel X... du chef de refus d'insertion et a débouté la société Sadis de sa constitution de partie civile ;
" aux motifs qu'il est constant que le texte adressé par la société Sadis de sa constitution de partie civile ;
" aux motifs qu'il est constant que le texte adressé par la société Sadis au journal La Charente Maritime, au titre du droit de réponse, n'a pas été intégralement publié, 2 phrases ayant été supprimées à l'initiative de la direction du journal ; que cette publication incomplète du texte de la réponse de la société Sadis à l'article du 26 septembre 1992 s'analyse en un refus d'insertion ; que le refus d'insérer n'est punissable qu'autant que la réponse ne porte pas atteinte à l'honneur ou à la considération du journaliste et n'est pas disproportionnée à la mise en cause ; qu'en l'espèce, la Cour a décidé, par arrêt rendu ce jour, que l'article du 26 septembre 1992, mettant en cause les résultats économiques du centre Leclerc de Royan (société Sadis), n'était pas diffamatoire ; que les 2 phrases de la réponse de la société Sadis qui n'ont pas été publiées sont les suivantes : "le centre Leclerc oppose un démenti formel aux allégations mensongères contenues dans cet article, au-delà du présent exercice de son droit de réponse prévu par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, il est bien évident que le centre Leclerc, compte tenu du caractère diffamatoire et mensonger des affirmations contenues à l'article précité, entend engager une procédure à l'encontre des responsables" ; qu'en qualifiant de mensongères et diffamatoires au lieu de se borner à les dire inexactes les affirmations ou "allégations" contenues dans l'article du 26 septembre 1992, la réponse porte atteinte à l'honneur et à la considération du journaliste et de la direction du journal dans des conditions que ne peut excuser la nature, désagréable mais non diffamatoire, de la mise en cause ; que le refus d'insertion était dès lors justifié ;
" alors, d'une part, que l'annonce faite par la personne visée dans un article de presse, de sa volonté de poursuivre pour injures et diffamation les responsables de l'article incriminé, ne porte pas atteinte à l'honneur ou à la considération de ces derniers ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; qu'en effet, faute de comporter l'imputation d'un fait susceptible de porter atteinte aux intérêts protégés du journaliste, l'existence d'une telle annonce dans le texte de la réponse de la personne mise en cause ne pouvait, à elle seule, justifier le refus d'insertion ;
" alors, d'autre part, que l'arrêt auquel la cour d'appel se réfère, par lequel elle a estimé que l'article auquel il a été répondu n'était pas diffamatoire, n'a pas, par ailleurs, jugé que les allégations avancées dans l'article en cause n'étaient pas non plus mensongères, alors au demeurant que les prévenus, dans l'instance en diffamation, n'avaient pas offert de prouver la vérité des faits imputés ; que les juges du second degré ne pouvaient, dès lors, sans se contredire ou mieux s'expliquer, estimer que le refus d'insertion de la réponse selon laquelle "le centre Leclerc oppose un démenti formel aux allégations mensongères contenues dans cet article", était justifié, aux motifs que les allégations critiquées n'étaient pas diffamatoires ;
" alors, enfin, que la réponse de celui qui use de ce droit absolu doit être publiée intégralement sans rien y ajouter et sans rien retrancher ; que, faute de s'être expliquée sur la modification par ajout et retranchement des divers autres articulations de la réponse de la partie civile à l'article incriminé, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le journal " La Charente Maritime ", dont Jean-Michel X... est le directeur de la publication, a fait paraître un article de Jean-Pierre Y..., intitulé " Grande surface : gifle économique ", mettant en cause le centre Leclerc exploité par la société Sadis, à Saintes ; que ladite société a réclamé l'exercice de son droit de réponse, et adressé au journal une réponse qui a été insérée, amputée de sa phrase introductive et de son paragraphe conclusif ; que la société Sadis a fait assigner Jean-Michel X... devant la juridiction répressive, sous la prévention de refus d'insertion ;
Attendu que, pour relaxer le prévenu et débouter la partie civile de sa demande, l'arrêt énonce que, si la publication incomplète de la réponse s'analyse en un refus d'insertion, celui-ci n'est pas punissable, dès lors qu'en qualifiant de mensongères et diffamatoires les allégations ou affirmations contenues dans l'article incriminé, la réponse portait atteinte à l'honneur et à la considération du journaliste, dans des conditions que ne justifiait pas la mise en cause ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui procèdent de l'exacte appréciation de la teneur de l'article incriminé et de la réponse, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, aucune disposition légale n'interdit au journaliste de publier en partie la lettre dont l'insertion intégrale aura été légitimement refusée par lui ;
Qu'une telle publication, n'ayant pas alors sa cause dans l'obligation mise à la charge du journaliste par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, ne saurait constituer une violation de ce texte ni par suite engager de ce chef la responsabilité pénale de son auteur ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-83764
Date de la décision : 04/09/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Composition - Ministère public - Présence - Audiences successives - Régularité - Présomption.

1° JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Composition - Audiences successives - Ministère public - Présence - Régularité - Présomption 1° MINISTERE PUBLIC - Présence - Juridictions correctionnelles - Audiences successives - Présomption de régularité.

1° Si les articles 32, 486 et 510 du Code de procédure pénale exigent que le ministère public, partie nécessaire au procès pénal, soit présent à chaque audience des juridictions de jugement, il résulte de l'article 592 du même Code qu'à l'instar des magistrats composant la juridiction, il est présumé avoir assisté à toutes les audiences de la cause, dès lors qu'il a été entendu en ses réquisitions à celle des débats(1).

2° JUGEMENTS ET ARRETS - Mentions - Mentions obligatoires - Lecture de la décision - Présence du ministère public - Nécessité (non).

2° MINISTERE PUBLIC - Présence - Juridictions correctionnelles - Audience de lecture de la décision - Nécessité (non).

2° Selon l'alinéa 2 de l'article 592 du Code de procédure pénale, la nullité de la décision n'est encourue qu'à défaut de l'audition du ministère public à l'audience des débats. Il n'importe que la minute ne mentionne pas la présence du ministère public au prononcé(2).

3° PRESSE - Droit de réponse - Insertion - Refus - Infraction à l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 - Publication partielle de la réponse dont l'insertion intégrale a été légitimement refusée (non).

3° PRESSE - Droit de réponse - Insertion - Refus - Légitimité - Contrôle de la Cour de Cassation.

3° Si la réponse est, en principe, indivisible, le refus d'insertion n'est pas constitué par une insertion partielle, qui n'a pas sa cause dans l'obligation imposée par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors que le directeur de la publication est fondé à refuser l'insertion intégrale d'une lettre portant atteinte à la loi, aux bonnes moeurs, à l'intérêt légitime des tiers ou à l'honneur du journaliste(3).


Références :

1° :
2° :
3° :
Code de procédure pénale 32, 486, 510, 592
Code de procédure pénale 592, al. 2
Loi du 29 juillet 1881 art. 13

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers (chambre correctionnelle), 29 juillet 1993

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-03-26, Bulletin criminel 1996, n° 134 (1), p. 384 (action publique éteinte et rejet) et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1996-03-26, Bulletin criminel 1996, n° 134 (2), p. 384 (action publique éteinte et rejet). CONFER : (3°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1970-04-30, Bulletin criminel 1970, n° 151, p. 348 (cassation et amnistie).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 sep. 1996, pourvoi n°93-83764, Bull. crim. criminel 1996 N° 313 p. 943
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 313 p. 943

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Guerder, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Amiel.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Boré et Xavier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:93.83764
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