Donne acte à M. X... de sa reprise d'instance tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs ; met hors de cause sur sa demande la CPAM du Havre ;
Attendu que Mme X... a été contaminée par le virus d'immunodéficience humaine (VIH) à l'occasion de transfusions de sang et de plasma frais congelé faites en mai 1983 et novembre 1986, les produits sanguins ayant été fournis par l'Association pour la gestion du poste de transfusion sanguine du Havre (l'Association) ; que Mme X... a saisi le Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH (le Fonds), qui, le 6 juillet 1992, lui a proposé une somme de 1 646 000 francs " correspondant à l'intégralité de son préjudice spécifique de contamination " défini, dans la proposition même du Fonds, comme étant " un préjudice personnel et non économique qui recouvre l'ensemble des troubles dans les conditions d'existence entraînées par la séropositivité puis, s'il y a lieu, par la survenance du Sida déclaré " ; que Mme X... a accepté cette proposition le 30 juillet 1992, puis, en novembre 1992, a engagé une procédure judiciaire contre l'Association et une clinique en demandant la réparation, d'une part, de son préjudice moral, sous déduction de la somme versée par le Fonds, d'autre part, de son préjudice économique, l'évolution de son état de santé l'ayant contrainte à cesser son activité professionnelle d'infirmière ; que Mme X... étant décédée en cours de procédure de cassation, son époux a repris l'instance ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Attendu que l'Association reproche d'abord à la cour d'appel d'avoir retenu sa responsabilité pour manquement à son obligation de fournir des produits sanguins exempts de vice alors que, d'une part, le vice interne du sang présenterait pour elle le caractère d'extériorité de la force majeure, alors que, d'autre part, l'arrêt n'aurait donné aucun effet à l'inaction des pouvoirs publics quand à l'information sur l'existence de lots sanguins contaminés, et alors que, enfin, les dommages n'étaient pas prévisibles, de sorte qu'auraient été violés les articles 1147, 1148 et 1150 du Code civil ;
Mais attendu que les organismes de transfusion sanguine sont tenus de fournir aux receveurs des produits exempts de vices et qu'ils ne peuvent s'exonérer de cette obligation de sécurité que par la preuve d'une cause étrangère ; que le vice interne du sang, même indécelable, pas plus que des fautes imputées aux pouvoirs publics en raison d'une information insuffisante, ne constituent une cause exonératoire de leur responsabilité ; qu'ainsi les griefs ne sont pas fondés ;
Mais sur les trois dernières branches du moyen, réunies :
Vu les articles 47 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991, 1147 du Code civil et 31 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la cour d'appel a accueilli la demande de Mme X... en ce qu'elle portait sur son préjudice moral aux motifs que l'article 47 de la loi du 31 décembre 1991 n'y faisait pas obstacle ; qu'elle a évalué ce préjudice à la somme de 1 800 000 francs, constaté que Mme X... avait perçu du même chef une indemnité de 1 646 000 francs allouée par le Fonds et condamné en conséquence l'Association à verser à la victime la différence, soit 154 000 francs ;
Attendu, cependant, que l'acceptation par la victime d'une offre d'indemnisation correspondant, conformément aux dispositions de l'article 47-III, de la loi du 31 décembre 1991, à la réparation intégrale de son préjudice spécifique de contamination, la prive d'intérêt à solliciter une autre indemnité du même chef ; que la cour d'appel, qui a constaté que le préjudice moral qu'elle retenait correspondait au préjudice spécifique de contamination n'a, dès lors, pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;
Et attendu que la cassation prononcée par voie de simple retranchement n'implique pas qu'il y ait lieu à renvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais en ses seules dispositions déclarant la demande de Mme X... recevable en ce qui concerne son préjudice moral et lui allouant de ce chef la somme de 154 000 francs, l'arrêt rendu le 26 janvier 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.