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11/06/1996 | FRANCE | N°94-16608

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juin 1996, 94-16608


Attendu que, le 3 novembre 1987, M. Roger Y... est décédé en laissant, pour lui succéder, six enfants, dont Corinne, épouse A..., et Marcelle, épouse Z... ; qu'un jugement du tribunal de grande instance de Lyon, en date du 8 septembre 1989, a ordonné la liquidation et le partage de la succession, et décidé l'attribution préférentielle en faveur de Mme Z... des droits indivis (50 / 72) dont l'indivision successorale était titulaire sur un immeuble de Tignes, dans lequel les époux Z... exploitaient un fonds de commerce de pâtisserie, qu'ils avaient acquis des époux X..., selon act

e du 30 janvier 1979 ; que l'arrêt confirmatif attaqué a entér...

Attendu que, le 3 novembre 1987, M. Roger Y... est décédé en laissant, pour lui succéder, six enfants, dont Corinne, épouse A..., et Marcelle, épouse Z... ; qu'un jugement du tribunal de grande instance de Lyon, en date du 8 septembre 1989, a ordonné la liquidation et le partage de la succession, et décidé l'attribution préférentielle en faveur de Mme Z... des droits indivis (50 / 72) dont l'indivision successorale était titulaire sur un immeuble de Tignes, dans lequel les époux Z... exploitaient un fonds de commerce de pâtisserie, qu'ils avaient acquis des époux X..., selon acte du 30 janvier 1979 ; que l'arrêt confirmatif attaqué a entériné le chiffre de 1 140 000 francs retenu par l'expert commis comme représentant la valeur des droits indivis sur l'immeuble de Tignes, et décidé que Mme Z... ne pouvait plus renoncer, comme elle l'avait sollicité à titre subsidiaire, à l'attribution préférentielle ordonnée par une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt d'avoir fixé à 1 140 000 francs la valeur des droits indivis sur l'immeuble de Tignes, alors, selon le moyen, d'une part, que lorsque le bénéficiaire de l'attribution préférentielle est également locataire du bien qui lui est attribué, la règle de l'égalité du partage n'impose d'estimer ce bien comme libre d'occupation qu'autant que le bail lui a été consenti par le de cujus ; que les locaux de Tignes n'ayant pas été loués par M. Roger Y... aux époux Z..., lesquels avaient acquis des époux X..., le 30 janvier 1979, le fonds de commerce de pâtisserie qui y était exploité, la cour d'appel, en évaluant ces locaux comme libres de toute occupation, a, loin de le respecter, méconnu le principe de l'égalité des co-partageants et violé l'article 832 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, dans des conclusions laissées sans réponse, Mme Z... avait fait valoir que l'expert n'avait pas tenu compte dans son évaluation de ce que l'attribution préférentielle portait sur des droits indivis dont la valeur vénale était nécessairement inférieure à celle de l'immeuble en cause ; qu'en omettant de répondre à ces conclusions l'arrêt attaqué n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que lorsque le bénéficiaire de l'attribution préférentielle est en même temps titulaire d'un bail grevant le bien, la réunion sur sa tête des qualités de propriétaire et de locataire aboutit à la disparition du contrat de location, de telle sorte que ce bien doit être estimé comme libre de tout bail, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que le bailleur est le de cujus lui-même ou un tiers ;

Attendu, ensuite, qu'ayant retenu que l'expert avait réfuté de façon pertinente les critiques adressées par Mme Z... à l'encontre de son évaluation, la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes ;

Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1351 du Code civil ;

Attendu que, pour interdire à Mme Z... de renoncer à son droit à l'attribution préférentielle, l'arrêt attaqué énonce, par motif adopté, que ce droit a été consacré par une décision de justice revêtue de l'autorité de la chose jugée, qu'il est ainsi entré dans son patrimoine, et qu'il ne peut désormais plus être remis en cause ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que l'héritier bénéficiaire d'une attribution préférentielle ne devient propriétaire du bien attribué qu'au jour du partage, et alors, d'autre part, que la décision qui l'accorde ne crée d'obligations qu'à l'égard des cohéritiers, le bénéficiaire demeurant libre de renoncer à cette attribution préférentielle tant qu'un partage définitif n'est pas intervenu, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé que l'attribution préférentielle à Mme Z... de l'immeuble de Tignes ne pouvait plus être remise en cause par celle-ci, l'arrêt rendu le 19 mai 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 94-16608
Date de la décision : 11/06/1996
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

SUCCESSION - Partage - Attribution préférentielle - Demande - Renonciation - Possibilité (non)

L'héritier bénéficiaire d'une attribution préférentielle ne devient propriétaire du bien attribué qu'au jour du partage, et la décision qui l'accorde ne crée d'obligations qu'à l'égard des cohéritiers, en sorte que le bénéficiaire demeure libre de renoncer à cette attribution préférentielle tant qu'un partage définitif n'est pas intervenu


Références :

2° :
Code civil 1351

Décision attaquée : La cour d'appel de Lyon, 19 mai 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 1996, pourvoi n°94-16608, Bull. civ. 1996, I, n° 252, p. 177
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996, I, n° 252, p. 177

Composition du Tribunal
Président : M. Lemontey (président)
Avocat général : M. Gaunet
Rapporteur ?: M. Thierry
Avocat(s) : Me Jacoupy

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.16608
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