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21/05/1996 | FRANCE | N°94-85029

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 mai 1996, 94-85029


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Salomon,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 3 octobre 1994, qui l'a condamné, pour travail clandestin, à 10 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que les mentions de l'arrêt attaqué établissent qu'à l'

audience publique du 5 septembre 1994, les débats se sont déroulés comme suit :...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Salomon,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 3 octobre 1994, qui l'a condamné, pour travail clandestin, à 10 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que les mentions de l'arrêt attaqué établissent qu'à l'audience publique du 5 septembre 1994, les débats se sont déroulés comme suit :
" Ont été entendus :
" Mme le président Simon en son rapport, le prévenu en ses interrogatoire et moyens de défense,
" le ministère public en ses réquisitions,
" Me Benhamou, conseil du prévenu, en ses conclusions et sa plaidoirie,
" à nouveau, le prévenu et son conseil qui ont eu la parole en dernier,
" alors qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 ; qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public ; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt établissent que le prévenu a présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public ; que le fait que le prévenu et son conseil se soient vu donner la parole en dernier ne suffit pas à réparer l'atteinte portée aux intérêts du prévenu et résultant de l'obligation qui lui a été imposée en l'espèce de présenter sa défense le premier ; qu'il s'ensuit que les textes et principe susvisés ont été méconnus " ;
Attendu que l'arrêt attaqué mentionne que le prévenu et son conseil ont eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 du Code de procédure pénale a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas porté atteinte aux intérêts du demandeur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 362-3, alinéa 1, L. 324-9, L. 324-10, L. 143-3, L. 143-5, L. 620-3 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, de la directive européenne n° 91-533 du 14 octobre 1991, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir employé 2 salariés sans avoir effectué de déclarations aux organismes de protection sociale et l'administration fiscale ;
" aux motifs qu'aucune attestation d'embauche n'avait été délivrée à ces 2 salariés lors de leur mise au travail ; que leur dissimulation était matériellement établie ; qu'il résultait des déclarations de Mohammet Y... que c'étaient Yusuf Z... et Salomon X... qui décidaient des salaires et que c'était Salomon X... qui s'occupait de la tenue des registres obligatoires et de la comptabilité ; qu'il avait reconnu s'occuper de toute l'administration, la correspondance et des relations avec les administrations, notamment des déclarations sociales et fiscales ; qu'il avait précisé au cours de l'enquête qu'il passait à l'atelier une fois par semaine et avait admis que c'était lui qui tenait le registre du personnel ; qu'il résultait suffisamment de ces éléments qu'il exerçait des fonctions de gestion et qu'il avait dissimulé ces 2 salariés, dont il avait nécessairement eu connaissance puisqu'ils travaillaient dans cet atelier depuis plus d'une semaine ;
" alors, d'une part, que la prévention reprochait au prévenu de n'avoir pas effectué de déclarations aux organismes de protection sociale et l'administration fiscale ; que le fait que les 2 salariés, à le supposer établi, n'aient pas été inscrits sur le registre unique du personnel et sur le registre des salaires, ne caractérise nullement l'omission de déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale, seule reprochée au prévenu ; qu'en se déterminant par ces motifs, la cour d'appel a excédé sa saisine et n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité ;
" alors, d'autre part, qu'en vertu de la directive n° 91-533 du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat qui les unit, l'employeur est tenu de remettre au salarié, 2 mois au plus tard après le début du travail, un document constatant l'établissement du rapport contractuel et comportant certaines mentions ; qu'en l'espèce où le contrôle a eu lieu moins de 15 jours après l'embauche de Ali A... et moins de 1 mois après celle de B..., l'absence de délivrance de ce document ou d'une attestation d'embauche n'établit nullement l'élément matériel de l'infraction poursuivie, à savoir l'omission de déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale ; qu'il s'ensuit que cette énonciation inopérante ne donne aucune base légale à la déclaration de culpabilité ;
" alors, de troisième part, que seul peut être déclaré coupable d'une infraction à la réglementation du travail le gérant de droit ou de fait d'une personne morale ou les personnes auxquelles une délégation de pouvoirs a été expressément consentie ; que le fait d'exercer des fonctions de gestion dans une entreprise n'équivaut pas à assurer la gérance ni de droit ni de fait de la personne morale, c'est-à-dire, à définir les orientations destinées à la mise en oeuvre de la politique et de l'activité de l'entreprise ; que, faute d'avoir constaté que le prévenu exerçait au moins la gérance de fait de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à la déclaration de culpabilité ;
" alors, enfin, que l'omission des déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale est un délit volontaire ; qu'en l'espèce, le gérant de droit, Mohammet Y..., avait déclaré, au cours de l'enquête, que le prévenu était absent au cours de la période correspondant au début du contrat de travail des 2 salariés (rapport de synthèse du 18 novembre 1992) ; qu'en affirmant, sans s'en expliquer autrement et contre les éléments établis par l'enquête, que Salomon X... avait nécessairement eu connaissance de leur présence dans l'entreprise où ils travaillaient depuis plus d'une semaine, la cour d'appel n'a pas caractérisé légalement l'infraction reprochée à celui-ci ; qu'il s'ensuit que la déclaration de culpabilité n'est pas légalement justifiée " ;
Sur la première branche ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 388 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits dont ils sont saisis ;
Attendu que, pour déclarer Salomon X... coupable, les juges du second degré relèvent que 2 ouvriers travaillaient sans être inscrits sur le registre du personnel, qu'aucune attestation d'embauche ne leur avait été délivrée et que le registre de paye ne comportait pas les indications relatives aux salaires du mois d'avril 1992 ;
Mais attendu qu'en caractérisant ainsi les éléments constitutifs de l'infraction prévue par l'article L. 324-10. 3o, du Code du travail, alors qu'elle n'était saisie par la citation que de celle prévue par l'article L. 324-10. 2°, du même Code, la cour d'appel a prononcé sur des faits non visés à la prévention et excédé ses pouvoirs ;
Que dès lors la cassation est encourue ;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen proposé :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 3 octobre 1994, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-85029
Date de la décision : 21/05/1996
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Saisine - Etendue - Pouvoirs des juges.

TRAVAIL - Travail clandestin - Activités professionnelles visées par l'article L. 324-10 du Code du travail - Incriminations distinctes

Les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits dont ils sont saisis. Ainsi, la juridiction correctionnelle, saisie par la citation de la seule infraction de travail clandestin prévue par l'article L. 324-10.2°, du Code du travail, excède ses pouvoirs en retenant la culpabilité du prévenu pour des faits, non visés à la prévention, caractérisant l'infraction à l'article L. 324-10.3°.


Références :

Code du travail L324-10.2°, 3°

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 octobre 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 mai. 1996, pourvoi n°94-85029, Bull. crim. criminel 1996 N° 208 p. 588
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 208 p. 588

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Libouban.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Fossaert-Sabatier.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lesourd et Baudin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.85029
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