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16/04/1996 | FRANCE | N°94-14660

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 avril 1996, 94-14660


Attendu que, selon les juges du fond, Laurent X..., infirme moteur cérébral, alors âgé de dix-neuf ans, confié au Centre d'accueil et de soins (CAS) Foyer Jean-Marie Marichez, a été victime d'un accident le 16 juin 1987 alors que, participant à des activités de loisirs dans une propriété louée au CAS par la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières (CCAS), il cheminait sous la conduite d'un moniteur sur un pont suspendu, la corde retenant le filet de sécurité s'étant rompue sous le poids de l'adolescent, entraînant une chute et

de graves blessures ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ...

Attendu que, selon les juges du fond, Laurent X..., infirme moteur cérébral, alors âgé de dix-neuf ans, confié au Centre d'accueil et de soins (CAS) Foyer Jean-Marie Marichez, a été victime d'un accident le 16 juin 1987 alors que, participant à des activités de loisirs dans une propriété louée au CAS par la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières (CCAS), il cheminait sous la conduite d'un moniteur sur un pont suspendu, la corde retenant le filet de sécurité s'étant rompue sous le poids de l'adolescent, entraînant une chute et de graves blessures ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses trois branches :

Attendu que le CAS Foyer Jean-Marie Marichez fait grief à l'arrêt attaqué (Douai, 10 mars 1994) de l'avoir déclaré contractuellement responsable de l'accident, en retenant à tort une faute de sa part alors que les circonstances de la chute excluaient toute prévisibilité raisonnable, d'autant plus qu'il était établi que Laurent X... coordonnait ses mouvements de façon satisfaisante ; qu'en outre la cour d'appel n'aurait pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient légalement au regard du rapport nécessaire de causalité entre la faute retenue et le dommage subi, et aurait à tort omis de caractériser la rupture du filet de sécurité en événement de force majeure ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu qu'en raison de l'état de santé de Laurent X..., rendant son équilibre instable, il était dangereux de le faire monter sur un pont suspendu et de le laisser cheminer sans appui efficace ni possibilité pour le moniteur, qui le précédait, de surveiller sa progression ; qu'ayant ainsi exclu que la rupture de la corde puisse constituer un événement irrésistible, la cour d'appel, qui a caractérisé le manquement du centre à son obligation de sécurité envers l'adolescent qui lui était confié, ainsi que le lien de causalité entre cette faute et le dommage, a légalement justifié sa décision sur ce point ;

Et sur le moyen unique, pris en ses quatre branches, du pourvoi incident :

Attendu que la CCAS reproche à la cour d'appel de l'avoir déclarée responsable de l'accident sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, en qualité de gardienne de la chose qui a provoqué le dommage, alors que, d'une part, elle aurait privé sa décision de motifs en imputant la rupture de la corde à la vétusté, alors que, d'autre part, il résultait de ses constatations que cette rupture était due à une utilisation anormale des installations prévues pour des enfants, par un adolescent de quatre-vingts kilos, alors qu'ensuite elle aurait dû rechercher si le CAS, en sa qualité de professionnel de l'encadrement des handicapés, n'était pas seul en mesure d'apprécier l'adaptation des installations à leur utilisation par de jeunes adultes infirmes, et alors, enfin, qu'elle devait également rechercher si le contrat de location des installations au CAS ne comportait pas, en raison de la clause exigeant que le CAS contracte une assurance de responsabilité pour l'utilisation des lieux, un transfert contractuel de la garde de ces installations ;

Mais attendu que les juges du second degré ont exactement retenu que l'accident était dû, non seulement à la faute contractuelle du CAS, mais également à la rupture de la corde servant de protection contre les chutes, élément faisant partie des installations dont la CCAS avait, en qualité de propriétaire, conservé la garde ; qu'ayant ainsi, par un arrêt motivé, caractérisé la responsabilité propre de la CCAS, cumulativement avec celle attribuée au CAS sur un fondement juridique distinct, elle a, sur ce point encore, légalement justifié sa décision, sans avoir à examiner la portée de l'obligation d'assurance souscrite par le CAS, qui ne concernait que l'utilisation des installations, et non les dommages pouvant résulter de ces installations elles-mêmes, sur lesquelles le propriétaire avait conservé ses pouvoirs de direction et de contrôle ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 94-14660
Date de la décision : 16/04/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de sécurité - Centre d'accueil et de soins - Infirme moteur cérébral - Cheminement sur un pont suspendu sans appui efficace ni possibilité pour le moniteur de surveiller sa progression - Portée.

1° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de sécurité - Manquement - Centre d'accueil et de soins - Infirme moteur cérébral - Cheminement sur un pont suspendu sans appui efficace ni possibilité pour le moniteur de surveiller sa progression 1° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Lien de causalité - Centre d'accueil et de soins - Infirme moteur cérébral - Cheminement sur un pont suspendu sans appui efficace ni possibilité pour le moniteur de surveiller sa progression - Portée.

1° Caractérise le manquement d'un centre d'accueil et de soins à son obligation contractuelle de sécurité envers l'adolescent qui lui était confié, ainsi que le lien de causalité entre cette faute et le dommage, la cour d'appel qui retient qu'en raison de l'état de santé de l'intéressé, infirme moteur cérébral, rendant son équilibre instable, il était dangereux de le faire monter sur un pont suspendu et de le laisser cheminer sans appui efficace ni possibilité pour le moniteur, qui le précédait, de surveiller sa progression.

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Choses dont on a la garde - Garde - Gardien - Propriétaire - Propriétaire d'une installation louée - Centre d'accueil et de soins locataire de l'installation - Accident dû partiellement à la défaillance de l'installation - Effets - Responsabilité propre du propriétaire cumulativement avec la responsabilité contractuelle du centre auquel était confiée la victime.

2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Non-cumul des deux ordres de responsabilité - Domaine de la responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle - Choses dont on a la garde - Gardien - Propriétaire d'une installation louée - Centre d'accueil et de soins locataire de l'installation - Accident dû partiellement à la défaillance de l'installation - Portée.

2° En retenant qu'un accident était dû, non seulement à la faute contractuelle du centre auquel était confiée la victime, mais aussi à la rupture d'une corde servant de protection contre les chutes d'un pont suspendu, élement faisant partie des installations dont le propriétaire avait conservé la garde, une cour d'appel caractérise la responsabilité propre de ce propriétaire, cumulativement avec celle attribuée au centre, locataire des installations, sur un fondement juridique distinct.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 10 mars 1994

A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 1, 1993-02-10, Bulletin 1993, I, n° 66, p. 43 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 avr. 1996, pourvoi n°94-14660, Bull. civ. 1996 I N° 185 p. 129
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 I N° 185 p. 129

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Lemontey .
Avocat général : Avocat général : M. Gaunet.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Ancel.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Célice et Blancpain, la SCP Boré et Xavier, MM. Hennuyer, Le Prado, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.14660
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