Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du Code civil :
Attendu que, par acte notarié du 22 juillet 1989, Mme Y..., mère de trois enfants, Daniel, Claude et Andrée X..., épouse Z..., a fait donation, en avancement d'hoirie, à son fils Daniel de la nue-propriété d'un ensemble immobilier comprenant une maison d'habitation, des bâtiments à usage rural et un terrain, le tout évalué dans l'acte à la somme de 800 000 francs ; que, le même jour, Mme Y... a déposé chez le notaire un testament olographe ainsi conçu : " Au cas où une contestation s'élèverait sur ma donation du 22 juillet 1989, je lègue à mon fils Daniel X... la quotité disponible de mes biens et (il) ne doit et ne devra aucun loyer " ; que la testatrice est décédée le 5 mars 1990 ; que, par une première assignation du 21 janvier 1991, Claude et Andrée X..., épouse Z... (les consorts X...) ont demandé en référé la désignation d'un expert pour évaluer les biens donnés en avancement d'hoirie à leur frère Daniel ; qu'ayant fait procéder à la radiation de cette première assignation, ils ont fait délivrer, le 4 février 1991, à ce dernier une seconde assignation tendant à l'estimation de l'ensemble des biens successoraux, y compris les biens donnés, et à obtenir acte de ce qu'ils n'entendaient pas contester la validité de la donation, ni exiger le versement d'une soulte, sauf si la valeur des biens donnés excédait la quotité disponible ; qu'après dépôt du rapport de l'expert, qui a estimé la valeur totale des biens successoraux à 2 761 833 francs, dont 981 500 francs pour les biens donnés, les consorts X... ont assigné leur frère Daniel en liquidation-partage de la succession ;
Attendu que, pour faire application de la clause d'exhérédation de la quotité disponible, l'arrêt attaqué énonce que les consorts X... ont contesté la donation en émettant des réserves sur la valeur des biens donnés, telle que fixée dans l'acte notarié, et qu'ils ont ajouté au texte du testament en prétendant établir une distinction entre l'attribution de ces biens et leur évaluation ;
Attendu que l'arrêt attaqué ayant constaté que la donation consentie à M. Daniel X... l'avait été en avancement d'hoirie, il était nécessaire d'évaluer le bien donné pour que le donataire en rapporte la valeur à la succession ; que, dès lors, la condition prévue par Mme Y... pour que le legs de la quotité disponible profite à son fils Daniel, ne pouvait être remplie par la demande d'évaluation présentée par les consorts X..., dont l'arrêt constatait qu'ils ne contestaient pas la validité de la donation ; qu'en faisant néanmoins produire effet au testament, la cour d'appel a dénaturé celui-ci et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.