ARRÊT N° 2
Donne acte à M. Z..., Mme C..., Mme B..., M. Y... de leur désistement de pourvoi envers M. le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Pontoise ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. D..., E..., F... et X..., désignés par l'" Entente des écologistes : Les Verts et Génération écologie " comme candidats dans des circonscriptions du Val-d'Oise aux élections législatives des 21 et 28 mars 1993, ont assigné en référé M. A..., Mmes C... et B... et M. Y..., également candidats dans ces circonscriptions, en soutenant que l'utilisation par ces derniers du titre " Génération verte " était de nature à entraîner, dans l'esprit des électeurs, une confusion, qui, préjudiciable à leur mouvement, risquait de nuire gravement au bon déroulement des opérations électorales ;
Attendu que, pour dire que le juge des référés de l'ordre judiciaire est compétent et que le graphisme " Génération verte " utilisé constitue un trouble manifestement illicite, l'arrêt énonce qu'il entre dans les pouvoirs du juge des référés de l'ordre judiciaire, en vertu de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile, de prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent au regard d'un trouble dont le caractère manifestement illicite exige qu'il doive cesser immédiatement pour garantir le libre choix du corps électoral et, par là, l'exercice des libertés publiques ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'appartient pas aux tribunaux de l'ordre judiciaire d'interférer dans les opérations électorales législatives dont le contentieux ressortit au Conseil constitutionnel, la cour d'appel, qui a prononcé une mesure portant sur les documents électoraux, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, la cassation encourue n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mars 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT le juge des référés incompétent.
MOYEN ANNEXE
Moyen produit par la SCP Coutard et Mayer, avocat aux Conseils pour M. Z..., Mme C..., Mme B... et M. Y....
MOYEN UNIQUE DE CASSATION :
PRIS DE CE QUE l'arrêt infirmatif attaqué a dit que le juge des référés de l'ordre judiciaire est compétent en vertu de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ; dit que le graphisme " Génération Verte ", utilisé par les intimés, candidats du mouvement du même nom dans leurs documents électoraux, et notamment bulletin de vote, constitue un trouble manifestement illicite qu'il y a lieu de faire cesser immédiatement ;
AUX MOTIFS QUE le contentieux des opérations électorales de nature politique, ou des préliminaires qui s'y rattachent appartient aux juges de l'élection et que saisis a posteriori, ils décident de la validité du scrutin au vu des éléments de fait qui leur sont soumis ; mais qu'il n'entre pas moins dans les pouvoirs du juge des référés de l'ordre judiciaire, en vertu de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile, de prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent au regard d'un trouble dont le caractère manifestement illicite exige qu'il doit cesser immédiatement pour garantir le libre choix du corps électoral et par là, l'exercice des libertés publiques ;
ALORS QUE, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans une décision du 15 juin 1993, précisément sur la requête de Mme Lucette C... afin d'annulation des opérations électorales : " Mme C... fait valoir devant le Conseil constitutionnel que cette décision de l'autorité judiciaire (arrêt présentement frappé de pourvoi), qui n'avait pas compétence pour intervenir dans le déroulement des opérations préliminaires à une élection législative, l'a privé des suffrages d'un nombre important d'électeurs et a été par suite de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
" Considérant que les décisions de la commission de propagande d'assurer la diffusion des circulaires et des bulletins de vote des candidats à une élection législative qui répondent aux conditions légales, en application des dispositions combinées des articles L. 166, R. 34 et R. 38 du Code électoral, constituent des actes préliminaires aux opérations électorales qui, en l'état de la législation, ne peuvent être contestés que devant le Conseil constitutionnel, juge de l'élection, à l'occasion du contentieux des opérations électorales ; qu'il suit de là qu'il n'appartient pas aux juridictions de l'ordre judiciaire d'enjoindre à un candidat de cesser d'utiliser une dénomination figurant sur les bulletins de vote diffusés par la commission de propagande ou de faire obstacle directement ou indirectement à l'utilisation de ces bulletins par les électeurs " ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 809 du nouveau Code de procédure civile.