Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie a refusé, à compter du 4 avril 1990, de rembourser aux patients de MM. Y... et X..., respectivement médecin conventionné anesthésiste et médecin conventionné ORL, les actes nécessitant une anesthésie générale aux motifs que ceux-ci avaient été réalisés dans une structure non autorisée d'hospitalisation de jour ; que, sur le recours des praticiens, la cour d'appel a rejeté l'exception d'incompétence opposée par la Caisse au profit des juridictions de l'ordre administratif et l'a condamnée à prendre en charge sous astreinte les actes litigieux ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait s'abstenir, sans violer l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, de répondre aux conclusions de la Caisse faisant valoir qu'à travers leur assignation, les demandes des docteurs X... et Y... tendaient à faire reconnaître la nullité de la décision de la Caisse de ne plus prendre en charge les actes de chirurgie et d'anesthésie effectués par le cabinet, pour violation des règles conventionnelles, et notamment des articles 30 et 32 de la convention, ces articles étant applicables aux règles de déconventionnement ; que, dès lors, seule la juridiction administrative était compétente pour connaître de ce litige ; alors, d'autre part, que l'arrêt est entaché d'un manque de base légale caractérisé au regard de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III en ce qu'il se prononce sur la compétence en fonction de la seule qualité des parties en présence, et d'une des conséquences de la demande, sans analyser précisément le fondement juridique de l'action introduite par les praticiens ; alors, enfin, et en toute hypothèse, que seule la juridiction administrative était compétente pour connaître d'un différend opposant deux praticiens soumis à la convention nationale à une caisse à l'occasion d'un différend portant sur la possibilité pour cette dernière de refuser de rembourser certains actes effectués en méconnaissance de la loi du 31 décembre 1970 imposant un agrément des autorités pour procéder à la chirurgie ambulatoire ; qu'en se reconnaissant compétente, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs la loi du 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, les articles L.162-2 et suivants, D.162-7 du Code de la sécurité sociale et la loi du 31 décembre 1970 ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a décidé à bon droit que le litige dont elle était saisie, qui opposait des praticiens à une caisse sur la prise en charge de certains de leurs actes médicaux, relevait de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L.162-21 et D.162-7 du Code de la sécurité sociale, 32 de la loi modifiée n° 70-1318 du 31 décembre 1970, alors, en vigueur, ensemble l'article 31.3o de cette loi, dans sa rédaction issue de la loi n° 79-1140 du 29 décembre 1979 ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des trois premiers de ces textes que les assurés n'ont droit au remboursement de leurs frais de traitement dans les établissements de soins de toute nature que si ces établissements sont autorisés à dispenser des soins aux assurés sociaux ; que, selon le dernier de ces textes, la création ou l'extension de centres ou services privés d'hospitalisation de jour sont soumises à autorisation ; que ces dispositions sont applicables même en l'absence d'un décret définissant cette modalité d'hospitalisation ;
Attendu que, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel énonce qu'à défaut de texte précis, la structure médicale créée par MM. X... et Y... ne peut être assimilée à un établissement pratiquant l'hospitalisation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé, d'une part, que la structure mise en place par ces deux praticiens, qui disposent d'une installation de gaz médical, permettait la réalisation programmée d'anesthésies générales, actes nécessitant une surveillance prolongée du malade après leur achèvement, ce dont il résultait que MM. X... et Y... avaient créé un centre privé d'hospitalisation de jour, et, d'autre part, que ces praticiens n'avaient pas obtenu l'autorisation exigée par l'article 31.3. de la loi du 31 décembre 1970, en sorte que la Caisse n'était pas tenue de rembourser les actes ayant nécessité une anesthésie générale réalisée dans ces conditions, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Caisse à prendre en charge, sous astreinte, les actes médicaux effectués par MM. X... et Y... et à payer des dommages-intérêts à MM. X... et Y..., l'arrêt rendu le 16 novembre 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.