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24/01/1996 | FRANCE | N°95-81210

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 janvier 1996, 95-81210


REJET du pourvoi formé par :
- X... Saïd,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 19 janvier 1995, qui l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour arrestation et détention de personnes comme otage, vols et tentatives de vols aggravés, viol aggravé, vol et port prohibé d'armes de la 6e catégorie.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 231, alinéa 2, et 349 du Code de procédure pénale, ensemble violation de l

'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des ...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Saïd,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 19 janvier 1995, qui l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour arrestation et détention de personnes comme otage, vols et tentatives de vols aggravés, viol aggravé, vol et port prohibé d'armes de la 6e catégorie.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 231, alinéa 2, et 349 du Code de procédure pénale, ensemble violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que la cour d'assises a déclaré Saïd X... coupable d'arrestation illégale dans les termes des questions nos 36, 37 et 39 ;
" alors, de première part, que la cour d'assises ne peut connaître d'autres accusations que celles contenues dans l'arrêt de renvoi ; que le fait d'arrestation illégale n'était pas compris dans le dispositif de l'arrêt de renvoi et que, dès lors, l'arrêt attaqué a ajouté à la nature des faits imputés à l'accusé et a modifié la substance de l'accusation, méconnaissant ainsi les articles 231, alinéa 2, et 349 du Code de procédure pénale ;
" alors, de deuxième part, que l'arrestation illégale, d'une part et la détention illégale et la séquestration, d'autre part, constituent des crimes distincts dont la nature et les éléments essentiels sont différents et que, par conséquence, lorsqu'un accusé a été comme en l'espèce renvoyé devant la cour d'assises pour détention illégale et séquestration, la question portant sur l'arrestation illégale constitue une addition prohibée ;
" alors, de troisième part, que l'arrêt attaqué comportant une double déclaration de culpabilité des chefs d'arrestation illégale aggravée et de séquestration illégale aggravée, la méconnaissance par la cour d'assises ne peut qu'avoir eu une incidence sur la peine prononcée à l'encontre de l'accusé ;
" alors enfin qu'en ajoutant à l'accusation une infraction qu'elle ne comportait pas, la cour d'assises a méconnu les principes élémentaires du procès équitable au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;
Attendu qu'il ressort, de l'arrêt de la chambre d'accusation, que Saïd X... a été renvoyé devant la cour d'assises sous l'accusation de détention et de séquestration d'une personne comme otage ; que c'est, dès lors, à tort que la Cour et le jury ont été interrogés sur le point de savoir s'il s'était également rendu coupable d'arrestation illégale ;
Qu'en effet, l'arrestation illégale, d'une part, la détention illégale et la séquestration, d'autre part, constituent deux crimes distincts dont la nature et les éléments constitutifs sont différents ;
Qu'ainsi, ont été méconnues les dispositions de l'article 231 alinéa 2 du Code de procédure pénale ;
Que, cependant, la personne détenue comme otage ayant été libérée avant le 7e jour accompli depuis celui de son appréhension, les faits, aux termes de l'article 224-4 du Code pénal, sont délictuels ;
Qu'il en résulte que l'irrégularité commise n'a pu avoir pour effet de porter atteinte aux intérêts du demandeur, la peine prononcée trouvant son seul support légal dans les réponses affirmatives de la Cour et du jury aux questions régulièrement posées, conformément à l'arrêt de renvoi, et le déclarant coupable de faits qualifiés crimes ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 332 et 333-1 de l'ancien Code pénal, des articles 111-4, 112-1 et 222-26 du nouveau Code pénal, de l'article 349 du Code de procédure pénale et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question n° 91 ainsi libellée : "lesdits viols commis le 28 septembre 1991 sur la personne de X... spécifiés à la question n° 88 ont-ils été précédés ou accompagnés de tortures ou d'actes de barbarie ?" ;
" alors, d'une part, que la cour d'assises ne peut valablement être interrogée sur une question qui implique une application rétroactive de la loi défavorable à l'accusé, quand bien même cette question serait conforme au dispositif de l'arrêt de renvoi ; qu'à l'époque des faits poursuivis, les circonstances aggravantes du crime de viol étaient limitativement énumérées par l'article 332 de l'ancien Code pénal et que la circonstance aggravante, fondée sur la concomitance d'actes de tortures ou de barbarie, s'appliquait au seul attentat à la pudeur, visé par l'article 333 à l'exclusion du viol ; que cette circonstance aggravante n'a concerné le viol qu'à compter de l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal, postérieur aux faits déférés à la cour d'assises et que, dès lors, la déclaration de la Cour et du jury est manifestement irrégulière ;
" alors, d'autre part, que la circonstance aggravante ainsi retenue par la cour d'assises entraînant, tant aux termes de l'article 331-1 de l'ancien Code pénal applicable au seul attentat à la pudeur, qu'aux termes de l'article 222-26 du nouveau Code pénal, l'application de la réclusion criminelle à perpétuité, la question en cause a porté gravement atteinte aux droits de l'accusé et au principe du procès équitable au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;
Attendu que, contrairement à ce qui est allégué, la circonstance aggravante, fondée sur la concomitance de tortures ou d'actes de barbarie, ne s'appliquait pas, à l'époque des faits poursuivis, au seul attentat à la pudeur visé par l'article 333 ancien du Code pénal ;
Qu'en effet, aux termes de l'article 303 ancien dudit Code, étaient punis comme coupables d'assassinat, tous malfaiteurs, quelle que soit leur dénomination, qui, pour l'exécution de leurs crimes, employaient des tortures ou commettaient des actes de barbarie ;
Qu'ainsi c'est à bon droit que la Cour et le jury ont été interrogés, par la question n° 91, sur le point de savoir si les viols commis sur la personne de X... ont été précédés ou accompagnés de tortures ou d'actes de barbarie, les faits de cette nature étant prévus tant par les articles 303 et 332 anciens que par l'article 222-26 nouveau du Code pénal et le maximum de la peine privative de liberté encourue étant, dans l'un et l'autre cas, le même ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-81210
Date de la décision : 24/01/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Questions - Question relative à un fait principal non retenu par l'arrêt de renvoi.

1° ARRESTATION ET SEQUESTRATION ARBITRAIRES - Crimes distincts - Eléments constitutifs 1° CASSATION - Moyen - Recevabilité - Défaut d'intérêt.

1° Selon l'article 231 du Code de procédure pénale, la cour d'assises ne peut connaître d'aucune autre accusation que celle qui est contenue dans le dispositif de l'arrêt de renvoi ; sous réserve des dispositions de l'article 351 dudit Code, la Cour et le jury ne peuvent sans excès de pouvoir, être interrogés par une question substituant ou ajoutant un fait principal nouveau aux faits retenus par l'arrêt de mise en accusation(1). L'arrestation illégale et la séquestration illégale constituant des crimes distincts, excède en conséquence ses pouvoirs, le président qui pose la question de savoir si un accusé, renvoyé sous la seule accusation de séquestration illégale, est coupable d'arrestation illégale. Cependant la personne séquestrée l'ayant été comme otage et ayant été libérée volontairement avant le 7e jour accompli depuis celui de son appréhension, les faits, aux termes de l'article 224-4 du nouveau Code pénal, sont délictuels. Il en résulte que l'irrégularité commise n'a pu avoir pour effet de porter atteinte aux intérêts du demandeur, la peine prononcée trouvant son seul support légal dans les réponses affirmatives de la Cour et du jury aux questions régulièrement posées conformément à l'arrêt de renvoi, le déclarant coupable, par ailleurs, de faits qualifiés crimes(1).

2° LOIS ET REGLEMENTS - Application dans le temps - Loi pénale de fond - Loi réprimant l'emploi de tortures ou d'actes de barbarie pour l'exécution d'un viol.

2° VIOL - Circonstances aggravantes - Torture ou acte de barbarie - Nouveau Code pénal - Application dans le temps.

2° Selon l'article 112-1 nouveau du Code pénal, sont punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. C'est, dès lors, à bon droit que la Cour et le jury ont été interrogés sur le point de savoir si des viols commis avant l'entrée en vigueur de l'article 222-26 nouveau du Code pénal, ont été précédés ou accompagnés de tortures ou d'actes de barbarie. En effet, aux termes de l'article 303 ancien dudit Code, étaient punis comme coupables d'assassinat, tous malfaiteurs, quelle que soit leur dénomination, qui, pour l'exécution de leurs crimes, employaient des tortures ou commettaient des actes de barbarie. Ainsi ce texte réprimait-il l'emploi de tortures ou d'actes de barbarie pour l'exécution d'un viol, antérieurement au 1er mars 1994(2).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 231, 351
Code pénal 303
nouveau Code pénal 112-1, 222-26
nouveau Code pénal 224-4

Décision attaquée : Cour d'assises des Bouches-du-Rhône, 19 janvier 1995

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1983-11-09, Bulletin criminel 1983, n° 297, p. 757 (cassation), et les arrêts cités. CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1975-11-18, Bulletin criminel 1975, n° 248, p. 655 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1986-10-09, Bulletin criminel 1986, n° 280, p. 713 (irrecevabilité), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1977-06-09, Bulletin criminel 1977, n° 211, p. 525 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 jan. 1996, pourvoi n°95-81210, Bull. crim. criminel 1996 N° 42 p. 102
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 42 p. 102

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Guilloux.
Avocat(s) : Avocat : M. Parmentier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.81210
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