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24/01/1996 | FRANCE | N°93-40455

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 janvier 1996, 93-40455


Sur les deux premiers moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Versailles, 10 novembre 1992), que M. X... a exercé les fonctions de chef de secteur réacteur auprès de la compagnie Aigle Azur transports aériens (Aigle Azur) ; que, commandant de bord de l'avion desservant la ligne Deauville Londres Gatwick, il a annulé trois vols le 17 août 1990 à la suite de la panne de l'un des deux appareils de radioguidage survenue le 15 août 1990 ; qu'ayant été licencié, il a saisi le conseil de prud'hommes afin d'obtenir le paiement des indemnités dues en cas de rupt

ure du contrat de travail tandis que la compagnie aérienne a demandé...

Sur les deux premiers moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Versailles, 10 novembre 1992), que M. X... a exercé les fonctions de chef de secteur réacteur auprès de la compagnie Aigle Azur transports aériens (Aigle Azur) ; que, commandant de bord de l'avion desservant la ligne Deauville Londres Gatwick, il a annulé trois vols le 17 août 1990 à la suite de la panne de l'un des deux appareils de radioguidage survenue le 15 août 1990 ; qu'ayant été licencié, il a saisi le conseil de prud'hommes afin d'obtenir le paiement des indemnités dues en cas de rupture du contrat de travail tandis que la compagnie aérienne a demandé reconventionnellement la réparation du préjudice financier et moral subi à la suite de l'annulation des vols ;

Attendu que la compagnie Aigle Azur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer l'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés ainsi que l'indemnité contractuelle de licenciement alors, suivant le premier moyen d'une part, que, selon l'article L. 422-2, alinéa premier du Code de l'aviation civile, le commandant de bord est responsable de la mission et que, dans les limites définies par les règlements et les instructions des autorités compétentes et de l'exploitant, il choisit l'itinéraire, l'altitude du vol et détermine la répartition du chargement de l'aéronef ; qu'en l'espèce, le 17 août 1990, si l'un des deux appareils de radio VHF de l'aéronef confié à M. X... était défaillant, la réglementation aéronautique autorisait expressément la poursuite des vols ; qu'en effet, compte tenu des conditions météorologiques favorables, selon l'arrêté du 5 novembre 1987, il était possible au commandant de bord de procéder à des vols à vue (vols en VFR) à moyenne altitude au lieu des vols aux instruments (vols en IFR) à haute altitude ; qu'il s'ensuit que, si l'alinéa 2 de l'article L. 422-2 du Code de l'aviation civile prévoit que le commandant de bord " peut différer ou suspendre le départ... chaque fois qu'il l'estime indispensable à la sécurité ", M. X... ne pouvait se prévaloir de ce texte pour annuler des vols au seul motif de la défaillance de l'un des appareils de radio VHF ; que, pour avoir admis que le commandant de bord avait pu prendre l'initiative d'annuler les vols litigieux sur le fondement de ce dernier texte au motif que les conditions de ces vols auraient été nécessairement plus précaires, l'arrêt attaqué a violé les textes précités ; que, de plus, l'article L. 422-2 du Code de l'aviation civile prévoyant que le commandant de bord est responsable de l'exécution de sa mission et qu'il choisit l'itinéraire et l'altitude de vol dans les limites définies par les règlements et par les instructions des autorités compétentes et de l'exploitant, il appartenait en propre à M. X... d'appliquer la réglementation concernant le vol à vue sans que la compagnie ait à la lui rappeler, ni à avertir les clients de l'usage d'une possibilité de vol réglementaire, de sorte que viole le texte précité l'arrêt attaqué qui considère que la compagnie exposante aurait dû donner des instructions formelles à M. X... d'effectuer les trajets litigieux en vol à vue et faire avertir son client et les usagers que l'avion volerait à vue ; alors, d'autre part, qu'en l'espèce il était constant que l'un des deux appareils de radio VHF étant défaillant, M. X... pouvait, compte tenu des bonnes conditions météorologiques non contestées, effectuer les vols à vue (VFR) ; que ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 422-2, alinéa 2, et L. 423-3 du Code de l'aviation civile ainsi que 1382 du Code civil l'arrêt attaqué qui admet que M. X... avait pu légitimement annuler les vols litigieux du 17 août 1990, faute d'avoir vérifié si l'intéressé n'avait pas commis un abus de droit, caractérisé notamment par le fait qu'il avait annoncé à l'avance, dès le 15 août, qu'" il laisserait l'avion au sol " le 17 août, sans savoir quelles seraient les conditions météorologiques et par le fait qu'aucun changement dans les circonstances de fait et de droit n'était intervenu l'empêchant de poursuivre, à compter du 17 août à 10 heures, les vols qu'il effectuait depuis le 15 août avec un seul appareil radio VHF en fonctionnement et par le fait également qu'il

avait divulgué aussitôt auprès de tiers les reproches erronés qu'il croyait pouvoir formuler contre la compagnie ; alors, selon le deuxième moyen, que l'article L. 422-2 du Code de l'aviation civile prévoit seulement que le commandant de bord " peut différer ou suspendre le départ... chaque fois qu'il l'estime indispensable à la sécurité " ; que viole ce texte et ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 122-14-4, L. 122-8, L. 222-9 et L. 223-11 du Code du travail l'arrêt attaqué qui admet qu'en l'espèce M. X..., commandant de bord, avait pu " légitimement... annuler les vols ", l'intéressé n'ayant pas, comme l'avaient relevé les premiers juges, le pouvoir d'annuler de sa propre initiative des vols auprès des autorités aéroportuaires sans en avoir reçu délégation de son employeur, seul habilité à prendre cette décision ou à la lui déléguer ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu que, si les conditions météorologiques permettaient le vol à vue et en moyenne altitude et si la réglementation en vigueur n'interdisait pas expressément de procéder ainsi au transport de passagers en cas de panne de l'un des appareils de radioguidage, le commandant de bord, seul juge des conditions de sécurité aux termes de l'article L. 422-2 du Code de l'aviation civile, pouvait dès lors estimer que les conditions de sécurité n'étaient pas remplies, et en conséquence refuser de poursuivre les vols ; qu'elle a ainsi fait une exacte application du texte susmentionné, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche du premier moyen ; que l'abus de droit mentionné dans la troisième branche de ce moyen est invoqué pour la première fois devant la Cour de sorte que, mélangé de fait et de droit, ce grief est irrecevable ; que les deux premiers moyens doivent être rejetés ;

Sur les troisième et quatrième moyens : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 93-40455
Date de la décision : 24/01/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRANSPORTS AERIENS - Pilote - Faute - Refus de poursuivre les vols - Appréciation des conditions de sécurité - Portée .

Si les conditions météorologiques permettaient le vol à vue et en moyenne altitude et si la réglementation en vigueur n'interdisait pas expressément de procéder ainsi au transport de passagers en cas de panne de l'un des appareils de radioguidage, le commandant de bord, seul juge des conditions de sécurité aux termes de l'article L. 422-2 du Code de l'aviation civile, pouvait dès lors estimer que les conditions de sécurité n'étaient pas remplies et en conséquence refuser de poursuivre les vols.


Références :

Code de l'aviation civile L422-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 novembre 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jan. 1996, pourvoi n°93-40455, Bull. civ. 1996 V N° 29 p. 18
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 V N° 29 p. 18

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. Chauvy.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Aubert.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Célice et Blancpain, Mme Luc-Thaler.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:93.40455
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