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11/01/1996 | FRANCE | N°95-80018

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 janvier 1996, 95-80018


CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- le département de la Guadeloupe, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Basse-terre, en date du 8 décembre 1994 qui, dans l'information suivie contre Maurice X..., Henriette Y..., épouse X..., José-Pierre Z..., Philippe A..., Serge B..., Jean C... et Philippe C..., des chefs de vol, escroqueries, complicité, abus de confiance, faux, usage de faux, abus de biens sociaux, recel, banqueroute et infractions aux lois sur les sociétés, a, pour rejeter sa requête tendant à l'accomplissement de

certains actes d'instruction, déclaré sa constitution de partie...

CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- le département de la Guadeloupe, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Basse-terre, en date du 8 décembre 1994 qui, dans l'information suivie contre Maurice X..., Henriette Y..., épouse X..., José-Pierre Z..., Philippe A..., Serge B..., Jean C... et Philippe C..., des chefs de vol, escroqueries, complicité, abus de confiance, faux, usage de faux, abus de biens sociaux, recel, banqueroute et infractions aux lois sur les sociétés, a, pour rejeter sa requête tendant à l'accomplissement de certains actes d'instruction, déclaré sa constitution de partie civile irrecevable.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 2o, du Code de procédure pénale en vertu duquel le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du département de la Guadeloupe et rejeté, en conséquence, sa requête tendant à voir accomplir certains actes d'information ;
" aux motifs que si le département de la Guadeloupe, en tant qu'associé majoritaire de la SODEG, s'est résolu pour assurer la survie de la société d'économie mixte, devenue AGAT, à prendre en charge une partie de son passif creusé essentiellement par les agissements délictueux des personnes mises en examen, voire de complices de ces dernières non encore mises en examen, il ne justifie pas d'un préjudice personnel spécifique distinct de celui de la société SODEG-AGAT ; qu'ainsi, faute de pouvoir établir qu'il a subi un préjudice direct des faits, objets de l'information (tant dans le cadre de la procédure 8 / 81 ou sa procédure de 36 / 84 jointe à la première), sa constitution de partie civile ne peut qu'être déclarée irrecevable et du même coup sa requête tendant à voir accomplir certains actes d'instruction rejetée ;
" 1o alors que les associés ou actionnaires d'une société sont recevables à agir, à titre individuel, en réparation du préjudice qui leur est personnellement causé par les délits d'abus de biens sociaux dont les dirigeants de cette société se sont rendus coupables ; qu'il en est de même pour tous les délits ayant eu pour objet ou pour effet de soustraire ou de dissiper tout ou partie du patrimoine social, au préjudice des actionnaires ; qu'en jugeant que le département de la Guadeloupe, associé majoritaire de la SODEG, ne justifiait pas d'un préjudice personnel susceptible de lui avoir été causé par les agissements commis par les prévenus, poursuivis, notamment, du chef d'abus de biens sociaux et d'autres délits ayant eu pour effet de dissiper tout ou partie du patrimoine social, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2o alors qu'en constatant que le département de la Guadeloupe avait accepté de prendre personnellement en charge une partie du passif résultant des agissements commis par les prévenus dans le but d'assurer la survie de la société, tout en déclarant qu'il ne justifiait pas d'un préjudice personnel distinct de celui causé à la société, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en évinçaient et violé les textes visés au moyen " ;
Vu lesdits articles, ensemble les articles 85 et 87 du Code de procédure pénale, 245 et 437 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu que, devant les juridictions d'instruction, il suffit pour que la constitution de partie civile soit recevable que les circonstances sur lesquelles elle se fonde permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du département de la Guadeloupe et rejeter en conséquence sa requête aux fins d'accomplissement de certains actes, la chambre d'accusation retient que si cette collectivité publique, en tant qu'actionnaire majoritaire de la SODEG, société d'économie mixte devenue " Agence Guadeloupéenne d'aménagement du territoire ", (AGAT), s'est résolue, pour assurer la survie de celle-ci, à prendre en charge une partie de son passif, creusé essentiellement par les agissements délictueux des personnes mises en examen, elle ne justifie pas d'un préjudice personnel distinct de celui de la SODEG-AGAT et en relation directe avec les infractions poursuivies ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les délits d'abus de biens sociaux sont de nature à causer un préjudice direct et personnel aux actionnaires de la société, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Basse-Terre, en date du 8 décembre 1994, en ce qu'il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du département de la Guadeloupe ;
Et attendu que l'opportunité d'ordonner des mesures d'instruction échappe au contrôle de la Cour de Cassation :
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-80018
Date de la décision : 11/01/1996
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Recevabilité - Conditions - Préjudice - Possibilité.

INSTRUCTION - Partie civile - Constitution - Constitution par voie d'intervention - Recevabilité - Conditions - Possibilité d'un préjudice

INSTRUCTION - Partie civile - Constitution - Constitution par voie d'intervention - Recevabilité - Conditions - Relation directe entre le préjudice allégué et les infractions poursuivies

SOCIETE - Société par actions - Société d'économie mixte - Abus de biens sociaux - Action civile - Recevabilité - Actionnaire

ACTION CIVILE - Recevabilité - Société - Société d'économie mixte - Actionnaire - Abus de biens sociaux

Devant les juridictions d'instruction, il suffit, pour qu'une constitution de partie civile soit recevable, que les circonstances sur lesquelles elle se fonde permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale. (1). Encourt la cassation l'arrêt qui déclare irrecevable faute de préjudice direct et personnel distinct du préjudice social, la constitution de partie civile, du chef d'abus de biens sociaux, d'un actionnaire qui a pris en charge partie du passif d'une société d'économie mixte résultant des agissements délictueux des personnes mises en examen(2).


Références :

Code de procédure pénale 85, 87
Loi 66-537 du 24 juillet 1966 art. 245, art. 437

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre (chambre d'accusation), 08 décembre 1994

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1980-11-20, Bulletin criminel 1980, n° 309 (3), p. 786 (rejet et cassation partielle), et les arrêts cités. CONFER : (1°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1964-04-23, Bulletin criminel 1964, n° 127, p. 282 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1971-02-16, Bulletin criminel 1971, n° 53, p. 133 (rejet)

arrêt cité ;

Chambre criminelle, 1971-04-24, Bulletin criminel 1971, n° 117, p. 303 (irrecevabilité) ;

Chambre criminelle, 1973-10-17, Bulletin criminel 1973, n° 365, p. 894 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1975-11-25, Bulletin criminel 1975, n° 257, p. 680 (rejet, et cassation partielle), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1975-12-16, Bulletin criminel 1975, n° 279, p. 735 (irrecevabilité et rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 jan. 1996, pourvoi n°95-80018, Bull. crim. criminel 1996 N° 16 p. 37
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 16 p. 37

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Amiel.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Culié.
Avocat(s) : Avocats : MM. Guinard, Foussard, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.80018
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