ARRÊT N° 1
Vu leur connexité, joint les pourvois n° 94-60.592 et 94-60.593 ;
Sur la fin de non-recevoir du pourvoi n° 94-60.593 formé par le syndicat textile FO de Tourcoing et environs, soulevée par la défense ; (sans intérêt) ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident n° 94-60.592 formé par les syndicats Hacuitex CFDT de Roubaix-Tourcoing et de la Vallée de la Lys ainsi que huit autres personnes, et du pourvoi n° 94-60.593 formé par le syndicat textile FO de Tourcoing et environs, réunis :
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que le chef d'entreprise des sociétés Tissavel, Flipo tapis, Customagic, UTTI, Tapisift, Cotonnerie du Touquet, Bonduel et X... Colbert, avait la faculté de décider que les délégués du personnel constituaient la délégation du personnel au comité d'entreprise, alors, selon le pourvoi incident des syndicats CFDT, que dans la mesure où, dans le cadre de la délégation unique du personnel, les deux institutions, délégués du personnel et comité d'entreprise, coexistent, une comparaison chiffrée des avantages respectifs de la loi nouvelle et de la convention collective ne peut s'effectuer que par rapport au nombre de sièges au comité d'entreprise et au nombre de sièges de délégués du personnel conventionnellement reconnus ; qu'en se livrant néanmoins à une comparaison sans prendre en considération le nombre de délégués du personnel et membres du comité d'entreprise pour conclure au caractère moins favorable de la convention collective, le tribunal d'instance a violé les articles L. 431-1-1, R. 423-1-1 du Code du travail, 10 et 29 de la convention collective ; et alors, selon le pourvoi du syndicat FO, que les organisations syndicales soutenaient dans leurs conclusions que la faculté offerte au chef d'entreprise de constituer une délégation unique du personnel n'était pas d'ordre public absolu et ne pouvait être exercée en présence d'une convention collective plus favorable ; que tel était le cas de la convention collective précitée ;
Mais attendu que, si dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à deux cents salariés, le chef d'entreprise a la faculté, après avoir consulté les délégués du personnel et, s'il existe le comité d'entreprise, de décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d'entreprise (délégation unique), le nombre de ces délégués peut être augmenté par des conventions ou accords collectifs ; que, dès lors, pour déterminer le nombre des délégués du personnel de la délégation unique, le juge du fond doit comparer le nombre de ces délégués, tel qu'il figure à l'article R. 423-1-1 du Code du travail, avec celui des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise conventionnels, et retenir le nombre le plus élevé des trois ;
Et attendu que le tribunal d'instance, qui a procédé à cette comparaison, a exactement retenu que le nombre des membres de la délégation unique devait être déterminé par l'article R. 423-1-1 dont les dispositions étaient plus favorables ; que les pourvois ne sont pas fondés ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal n° 94-60.592 formé par les sociétés Filature des archers et Loridant :
Vu l'article L. 431-1-1 du Code du travail, ensemble les articles L. 132-4, L. 426-1 et L. 438-10 du même Code ;
Attendu que, pour décider que le chef d'entreprise des sociétés Filature des archers et Loridant n'avait pas la faculté de mettre en place une délégation unique du personnel, et ordonner l'élection de délégués du personnel et de représentants du personnel au comité d'entreprise, le jugement a retenu que l'article L. 431-1-1 du Code du travail n'avait pas de caractère d'ordre public absolu et que la convention collective prévoyait un siège de plus au comité d'entreprise que l'article R. 423-1-1 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, pour déterminer le nombre des délégués du personnel de la délégation unique, le juge du fond doit comparer le nombre de ces délégués tel qu'il figure à l'article R. 423-1-1 du Code du travail, avec celui des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise conventionnels, et retenir le nombre le plus élevé des trois, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant décidé que les sociétés Filature des archers et Loridant devaient organiser des élections de délégués du personnel et membres du comité d'entreprise, le jugement rendu le 20 octobre 1994, entre les parties, par le tribunal d'instance de Tourcoing ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Lille .