Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'en décembre 1986, janvier et novembre 1989, la caisse ORGANIC a notifié à la société Romann et compagnie trois mises en demeure l'invitant à acquitter le montant, fixé d'office à titre provisionnel, des contributions sociales de solidarité échues respectivement en 1984, 1985 et 1986, en 1987 et 1988, et en 1989, outre les majorations ; que, pour obtenir le recouvrement de sa créance totale, la Caisse a, en novembre 1990, délivré une contrainte à laquelle la société a fait opposition, en se prévalant de la nullité des mises en demeure, de la prescription des contributions antérieures à 1987, et de l'incompatibilité de l'institution de la contribution sociale de solidarité avec le droit communautaire ; que la cour d'appel l'a déboutée et a validé la contrainte ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Colmar, 23 février 1993) d'avoir ainsi statué, alors, de première part, qu'en application des articles L. 244-2 et R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, toute action en recouvrement est obligatoirement précédée d'une mise en demeure adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation et cette mise en demeure doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de l'auteur de l'acte comme de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; que la cour d'appel qui, pour déclarer régulières les mises en demeure reçues par la société Romann, s'est déterminée par le fait que la volonté de recouvrement de l'ORGANIC ne peut être mise en doute, mais qui s'est abstenue de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de la société Romann, si, en l'absence de signature du directeur de la Caisse, le débiteur était en mesure d'identifier l'auteur de la mise en demeure et d'en apprécier le bien-fondé, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ; alors, de deuxième part que, la nullité d'une mise en demeure n'est pas subordonnée à la preuve d'un grief ; qu'en énonçant que la société Romann n'invoque au soutien de la prétendue nullité aucun grief ou préjudice, la cour d'appel a derechef violé les mêmes textes ; alors, de troisième part, qu'en application de l'article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale, la mise en demeure adressée par un organisme de sécurité sociale ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les 3 années qui précèdent son envoi ; que la cour d'appel, qui s'est bornée à relever les dates des mises en demeure et le fait qu'elles aient visé les chiffres d'affaires des différents exercices, sans constater que chaque mise en demeure a bien interrompu la prescription de chaque dette de cotisation et a toutefois déclaré qu'aucune prescription n'est encourue, a privé sa décision de base légale au regard de la disposition précitée ; alors, enfin, que conformément à l'article 33 de la sixième directive européenne du 17 mai 1977, l'interdiction faite aux Etats membres d'instituer des impôts, droits et taxes sur le chiffre d'affaires doit s'étendre à la contribution sociale de solidarité qui, assise sur le chiffre d'affaires, présente les caractères d'un impôt ou d'une taxe ; que la cour d'appel qui, pour décider que la contribution sociale de solidarité ne peut être assimilée à une taxe sur le chiffre d'affaires, s'est déterminée en considération de l'arrêt rendu le 27 novembre 1985 par la Cour de justice des Communautés européennes, mais qui s'est abstenue de rechercher si la taxe litigieuse présentait, en raison de son assiette, du caractère obligatoire de son prélèvement, de son affectation à des dépenses publiques et de l'absence de contrepartie de son paiement, le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;
Mais attendu, d'abord, que si la mise en demeure doit préciser la dénomination de l'organisme social qui l'a émise, aucun texte, en revanche, n'exige qu'elle soit signée par le directeur de cet organisme ; qu'ayant exactement énoncé que l'absence d'une telle signature n'affectait pas la validité des mises en demeure litigieuses, et relevé que celles-ci contenaient, par ailleurs, toutes précisions permettant à la société de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante, a, abstraction faite d'une motivation erronée mais surabondante, légalement justifié sa décision ;
Attendu, ensuite, qu'étant constant que chaque mise en demeure se rapportait à une contribution exigible dans les 3 années ayant précédé l'envoi, donc non prescrite, la cour d'appel énonce exactement que ces mises en demeure ont interrompu la prescription et que la Caisse, en notifiant une contrainte en 1990, a respecté le délai de 5 ans, dont le point de départ était en 1986, pour les contributions les plus anciennes, dans lequel devait être exercée son action en recouvrement ; que sa décision est donc légalement justifiée ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel énonce que la contribution sociale de solidarité, instituée au profit de régimes de sécurité sociale, qui n'est pas recouvrée par le Trésor public, ni versée à son bénéfice, est dépourvue de caractère fiscal ; qu'elle a dès lors estimé à bon droit que cette contribution n'était pas de nature fiscale au sens de la sixième directive du Conseil des Communautés et qu'elle entrait dans la notion de droits et taxes n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires au maintien desquels cette directive, en son article 33, ne fait pas obstacle ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.