Joint, en raison de leur connexité, les pourvois n° 93-20.544, 93-20.579, 93-20.786 ;
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que l'enfant mis au monde par Mme Y... à la Clinique du Château dans la nuit du 13 au 14 avril 1986 a subi des lésions cérébrales irréversibles ; que l'arrêt attaqué (Besançon, 14 septembre 1993), retenant que cet état d'infirmité cérébro-moteur total et définitif était la conséquence de souffrances foetales passées inaperçues lors de l'accouchement, a retenu la responsabilité de la clinique à raison de 30 %, de la sage-femme, Mme X..., dans la même proportion, de deux gynécologues, MM. A... et B..., à raison de 10 % chacun, et d'un pédiatre, Mme Z..., à concurrence de 20 %, et les a condamnés in solidum à réparer les divers préjudices subis par l'enfant, sa mère et sa grand-mère, Mme C... ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi incident formé par la société Clinique du Château :
Attendu, d'abord, que la cour d'appel, statuant par motifs propres ou adoptés, a constaté que la Clinique de gynécologie-obstétrique du Château comportait vingt-six lits et que la nuit des faits une seule sage-femme était en fonction pour les différents services ; qu'elle en a exactement déduit que la clinique avait ainsi contrevenu aux dispositions des articles 33 et 35 du décret n° 72-162 du 21 février 1972, qui imposaient un minimum de deux sages-femmes pour la salle de travail et une pour le service des suites de couches ;
Attendu, ensuite, que les juges du fond ont relevé que cette inobservation des dispositions légales avait eu pour conséquence de surcharger la sage-femme, qui ne disposait pas du temps nécessaire pour soigner ses patientes ; qu'elle a pu en déduire que la Clinique du Château, liée par un contrat d'hospitalisation et de soins avec Mme Y..., avait commis une faute contractuelle en relation avec le dommage subi par cette dernière, tant à titre personnel qu'en qualité de représentante légale de l'enfant dont elle était accouchée, et une faute délictuelle vis-à-vis de Mme C... ;
Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, du pourvoi principal formé par Mme X... :
Attendu que Mme X..., qui exerçait les fonctions de sage-femme salariée de la Clinique du Château, reproche à la cour d'appel d'avoir retenu sa responsabilité partielle, alors que, d'une part, il n'aurait pas été répondu à ses conclusions faisant valoir qu'ayant agi dans le cadre de ses fonctions de préposée sa responsabilité personnelle ne pouvait être engagée, mais seulement celle de la clinique ; et alors que, d'autre part, elle était au moment des faits sous la subordination salariale de son employeur, qui avait commis une faute dans l'organisation du service, de sorte qu'il ne pouvait y avoir lieu à condamnation in solidum entre employeur et employé et qu'aurait été violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 10 du décret n° 49-1351 d 30 septembre 1949 portant code de déontologie des sages-femmes, alors en vigueur, que la sage-femme doit disposer d'une " complète indépendance professionnelle " ; que la cour d'appel a décidé à bon droit qu'une sage-femme, alors même qu'elle est liée par un contrat de travail, dispose d'une telle indépendance dans l'exercice de son art ; que l'arrêt attaqué, ayant retenu que Mme X... avait commis des fautes personnelles à l'occasion des soins donnés à Mme Y... en ne procédant à aucun " monitorage " et en négligeant d'appeler l'obstétricien de garde malgré la durée anormale de la phase d'expulsion, a pu décider que la sage-femme était tenue d'en réparer les conséquences dommageables in solidum avec la Clinique du Château, dont les fautes avaient aussi concouru au dommage ; qu'ainsi l'arrêt, qui a répondu aux moyens, est légalement justifié ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de la Clinique du Château, qui reproche à la cour d'appel d'avoir rejeté son recours en garantie contre la sage-femme :
Attendu que l'arrêt attaqué ayant retenu que les fautes commises par la Clinique du Château et par Mme X... avaient, chacune, concouru à la réalisation du dommage des victimes dans une proportion déterminée, en a exactement déduit que ce partage de responsabilité excluait nécessairement que la Clinique du Château pût être garantie en outre de sa part de responsabilité par Mme X... ; qu'ainsi, abstraction faite d'un motif surabondant critiqué par le moyen, l'arrêt est légalement justifié ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de M. A... et de son assureur, l'UAP : (sans intérêt) ;
Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal formé par Mme Z... : (sans intérêt) ;
Sur le second et le troisième moyens du pourvoi principal de Mme X... et du pourvoi incident de la Clinique du Château, ainsi que sur le second moyen du pourvoi incident de M. A... et de l'UAP et le moyen unique du pourvoi incident de M. B... : (sans intérêt) ;
Et sur le moyen unique du pourvoi principal formé par Mmes Y... et C... : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principaux et incidents.