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11/07/1995 | FRANCE | N°93-10385

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 juillet 1995, 93-10385


Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 20 octobre 1992, n° 91-006466) que la société Codec a été mise en redressement judiciaire sans avoir payé diverses marchandises que lui avait livrées la compagnie Marseillaise d'importation Amazone ; que cette dernière, invoquant une clause de réserve de propriété, en a demandé la restitution ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Codec reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la demande alors, selon le pourvoi, que l'acceptation d'une clause de réserve de propriété, dérogatoire du droit commun et modifiant l'éco

nomie du contrat de vente, doit émaner d'un représentant de l'acheteur ayant la qual...

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 20 octobre 1992, n° 91-006466) que la société Codec a été mise en redressement judiciaire sans avoir payé diverses marchandises que lui avait livrées la compagnie Marseillaise d'importation Amazone ; que cette dernière, invoquant une clause de réserve de propriété, en a demandé la restitution ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Codec reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la demande alors, selon le pourvoi, que l'acceptation d'une clause de réserve de propriété, dérogatoire du droit commun et modifiant l'économie du contrat de vente, doit émaner d'un représentant de l'acheteur ayant la qualité nécessaire pour conclure le contrat de vente lui-même ; qu'en retenant la validité de la signature du salarié préposé à la réception matérielle des marchandises, sans relever aucune circonstance qui, en l'espèce, aurait autorisé le fournisseur à croire qu'un tel préposé à de simples opérations matérielles eût été qualifié pour modifier au nom de la société les conditions juridiques de la vente, la cour d'appel a violé les articles 121 de la loi du 25 janvier 1985 et 1984 et suivants du Code civil ;

Mais attendu que l'opposabilité à l'acheteur d'une clause de réserve de propriété n'est pas subordonnée à l'existence d'une acceptation écrite de sa part ; que la cour d'appel, qui a constaté, par des motifs non critiqués, que cette clause, stipulée par écrit par le vendeur et adressée à l'acheteur, avait été acceptée par celui-ci par l'exécution du contrat en connaissance de cause, n'avait pas à effectuer la recherche inopérante visée au pourvoi ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Codec reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à restituer le prix des marchandises revendiquées, majoré des intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 1990, date de la requête en revendication présentée au juge-commissaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'acheteur d'une chose grevée d'une clause de réserve de propriété n'est pas débiteur d'une somme d'argent, mais d'un corps certain ; que si la mise en demeure d'exécuter cette obligation de donner a pour conséquence de mettre à sa charge les risques de perte, elle ne constitue pas le point de départ d'intérêts légaux ; que la cour d'appel ne pouvait donc faire produire à l'indemnité représentant la contre valeur des marchandises, pour le cas où elles ne pourraient être restituées en nature, des intérêts légaux moratoires à dater du jour de la requête en revendication, sans violer ensemble les articles 1138 et 1153 du Code civil ; et alors, d'autre part, que la clause de réserve de propriété constitue une garantie du seul prix de vente, dont le bénéfice ne peut s'étendre au-delà du solde encore dû sur ce prix lui-même ; que dès lors que ce solde ne produit pas d'intérêts légaux en raison de la suspension du cours des dits intérêts par l'ouverture du redressement judiciaire, la non-restitution de la valeur des marchandises ne peut avoir pour effet de conférer au fournisseur le bénéfice des intérêts suspendus ; que la cour d'appel a donc violé l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 ne s'applique qu'aux intérêts des créances dont l'origine est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective ; que tel n'est pas le cas de la créance du vendeur, titulaire d'une clause de réserve de propriété, lorsque les marchandises, qui existaient en nature à la date du jugement d'ouverture, ont été revendues par la suite ;

Attendu, en second lieu, qu'en fixant, à une date autre que celle de sa décision, le point de départ des intérêts de la créance d'indemnité allouée en réparation du dommage causé par la non-restitution des marchandises revendiquées, la cour d'appel n'a fait qu'user de la faculté remise à sa discrétion par l'article 1153-1 du Code civil ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 93-10385
Date de la décision : 11/07/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Revendication - Clause de réserve de propriété - Opposabilité à la procédure collective - Conditions - Acceptation - Acceptation écrite par le débiteur - Nécessité (non).

1° L'opposabilité à l'acheteur d'une clause de réserve de propriété n'est pas subordonnée à l'existence d'une acceptation écrite de sa part. Dès lors, ayant constaté que cette clause, stipulée par écrit par le vendeur et adressée à l'acheteur, avait été acceptée par celui-ci par l'exécution du contrat en connaissance de cause, la cour d'appel n'avait pas à rechercher si tel salarié de l'acheteur avait qualité pour apposer sa signature sous la clause de réserve de propriété.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Effets - Intérêts des créances - Suspension - Créances ayant une origine antérieure au jugement d'ouverture - Caractère limitatif.

2° L'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 ne s'applique qu'aux intérêts des créances dont l'origine est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective. Tel n'est pas le cas de la créance du vendeur, titulaire d'une clause de réserve de propriété, lorsque les marchandises, qui existaient en nature à la date du jugement d'ouverture, ont été revendues par la suite.

3° INTERETS - Intérêts moratoires - Intérêts de l'indemnité allouée - Point de départ - Intérêts à compter d'une date différente de celle de la décision - Pouvoirs des juges.

3° INTERETS - Intérêts moratoires - Intérêts de l'indemnité allouée - Point de départ - Intérêts à compter d'une date différente de celle de la décision - Motivation - Nécessité (non) 3° POUVOIRS DES JUGES - Pouvoir discrétionnaire - Intérêts - Intérêts de l'indemnité allouée - Point de départ - Fixation.

3° En fixant, à une date autre que celle de sa décision, le point de départ des intérêts de la créance d'indemnité allouée en réparation du dommage causé par la non-restitution des marchandises revendiquées par le bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété, la cour d'appel n'a fait qu'user de la faculté remise à sa discrétion par l'article 1153-1 du Code civil.


Références :

1° :
2° :
Code civil 1153-1
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 55

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 octobre 1992

DANS LE MEME SENS : (2°). Assemblée plénière, 1992-07-03, Bulletin 1992, Assemblée plénière, n° 7, p. 15 (rejet) ; Chambre sociale, 1993-06-15, Bulletin 1993, V, n° 168 (2), p. 114 (rejet). A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1989-06-13, Bulletin 1989, IV, n° 186, p. 124 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 jui. 1995, pourvoi n°93-10385, Bull. civ. 1995 IV N° 210 p. 196
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 IV N° 210 p. 196

Composition du Tribunal
Président : Président : Mme Pasturel, conseiller le plus ancien faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Mourier.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Tricot.
Avocat(s) : Avocats : M. Barbey, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.10385
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