Attendu, selon le jugement déféré, que M. X... est propriétaire d'un véhicule de marque Chevrolet d'une puissance fiscale de 33 chevaux mis en circulation le 24 novembre 1978 ; qu'il a réclamé la restitution de la taxe différentielle acquittée au titre des années 1985 à 1990 ; que cette demande a été accueillie ;
Sur l'irrecevabilité partielle du pourvoi, soulevée par la défense :
Attendu que M. X... fait valoir l'irrecevabilité du pourvoi en tant que relatif aux taxes acquittées pour les années 1985 à 1988, son action étant sur ce point une action de droit commun en répétition de l'indu et le jugement étant dès lors, à cet égard, susceptible d'appel ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 190, deuxième alinéa, du Livre des procédures fiscales, tel qu'il résulte de la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 applicable à tous les litiges engagés par des réclamations présentées après son entrée en vigueur, sont instruites et jugées selon les règles du même Livre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure ; que ces dispositions générales, qui ne réduisent pas spécifiquement, postérieurement à un arrêt de la Cour de justice constatant l'incompatibilité d'une taxe nationale déterminée, les possibilités d'agir en répétition de l'indu, ont pour effet de rendre applicable l'article L. 199, deuxième alinéa, du même Livre, aux termes duquel les jugements des tribunaux de grande instance ne peuvent être attaqués que par voie de cassation ; que le pourvoi est donc recevable ;
Au fond :
Sur le premier moyen :
Attendu que le Directeur général des Impôts fait grief au jugement d'avoir accueilli la demande de M. X... pour les années 1985 à 1988, alors, selon le pourvoi, qu'aux termes de l'article L. 190, alinéa 2, du Livre des procédures fiscales, seules les règles de la procédure fiscale, et plus précisément celles relatives à la présentation d'une réclamation et aux délais y afférents stipulées par les articles R. 190-1 et R. 196-1 du même Livre, sont applicables aux actions en répétition de l'indu visées par ce texte introduites par réclamation déposée après l'entrée en vigueur de la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 ; qu'en vertu des articles 5 et 12 du nouveau Code de procédure civile, issus du décret n° 71-740 du 9 septembre 1971, le juge du fond doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il ne saurait dès lors s'abstenir, dans l'exercice de son office, d'examiner les circonstances de l'espèce à la lumière des dispositions légales la régissant ; qu'au cas particulier, le point de départ du délai ouvert au redevable, auteur d'une réclamation en date du 27 mai 1991, correspondait, s'agissant des taxes relatives aux années 1985 à 1988, aux décisions de la Cour de justice des Communautés européennes des 9 mai 1985 et 17 septembre 1987 ayant révélé le caractère indu de l'impôt, constitutives d'un événement au sens de l'article R. 196-1, c, précité ; qu'ainsi, en écartant la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande du redevable, soulevée par l'Administration, le Tribunal a violé, par refus d'application, les dispositions susvisées ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 2 du Code civil que, lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure ; que l'article 36 de la loi du 29 décembre 1989, modifiant l'article L. 190, deuxième alinéa, du Livre des procédures fiscales, a eu pour effet de rendre applicable aux actions en répétition de l'indu le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 de ce Livre, tandis que ces actions étaient auparavant soumises à la seule prescription trentenaire de droit commun, que ces nouvelles dispositions sont applicables, aux termes de la loi, à tous les litiges engagés par des réclamations présentées après l'entrée en vigueur de la loi et qu'il en résulte que le délai institué à l'article R. 196-1 du Livre des procédures fiscales ne commence à courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1989 ; que, par ce motif de pur droit, le jugement se trouve justifié ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 95 du Traité instituant la Communauté européenne ;
Attendu que, pour accueillir la demande, le jugement retient que la seule modification du plafonnement du facteur K dans le mode de calcul de la puissance fiscale ne permet pas de remédier aux critiques formulées par la Cour de justice des Communautés européennes, puisqu'un véhicule Renault 21 Turbo, d'une puissance de 175 CV CEE, est considéré comme d'une puissance fiscale de 9 chevaux, tandis qu'un véhicule Mercédès 190 E-6 automatique de 160 CV CEE est considérée comme d'une puissance fiscale de 18 chevaux ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que, dans son arrêt du 17 septembre 1987 (Feldain), la Cour de justice des Communautés européennes a jugé qu'il n'apparaît pas que les modalités de calcul du facteur K pour les véhicules à boîte de vitesses automatiques aient un quelconque effet discriminatoire ou protecteur en faveur des véhicules de fabrication française, ceux-ci étant tout autant affectés que les véhicules importés d'autres Etats membres, et sans vérifier si, à compter du 12 janvier 1988, le système de taxe en cause connaissait encore la limitation du facteur K visée par la Cour de Justice dans son arrêt Feldain, le Tribunal n'a pas justifié sa décision au regard des dispositions susvisées du Traité instituant la Communauté européenne ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné la restitution à M. X... de la taxe différentielle acquittée aux titres des années 1989 et 1990, le jugement rendu le 22 septembre 1993, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Strasbourg ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Colmar .