Attendu que, leur reprochant, au cours d'un mouvement de grève, d'avoir envahi les salles de commande de plusieurs postes de transformation et d'être intervenus sur les réseaux électriques et les systèmes de téléconduite qui concourent à la gestion du système production, les services nationaux Electricité de France et Gaz de France ont infligé une sanction disciplinaire de mise à pied à MM. Z..., A..., X... et Y... ; que ces derniers ont demandé à la juridiction prud'homale d'annuler cette sanction et de condamner leur employeur au paiement des salaires perdus ;
Sur le second moyen, qui est préalable :
Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt d'avoir écarté l'existence d'une faute lourde, alors que, selon le moyen, dans leurs conclusions d'appel, EDF-GDF qualifiait expressément de faute lourde les faits reprochés aux quatre agents ; qu'ainsi, en se déterminant comme elle l'a fait, au motif que les faits n'auraient jamais été qualifiés de faute lourde par l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les conclusions dont elle était saisie et a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, de surcroît, il appartient aux juges du fond de rechercher si les faits reprochés aux salariés grévistes, indépendamment de leur qualification juridique par l'employeur, sont constitutifs d'une faute lourde ; qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, au motif inopérant que les faits imputés aux agents n'auraient prétendument pas été qualifiés de faute lourde par EDF-GDF, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-45 et L. 521-1 du Code du travail, alors que le seul fait pour un salarié gréviste d'avoir participé à des actes illicites susceptibles d'être qualifiés de faute lourde suffit à justifier le prononcé d'une sanction ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments constants du dossier et des propres constatations de l'arrêt que les quatre agents poursuivis ont participé à l'occupation illicite des postes de commande au cours de laquelle des coupures de télé-signalisations ont été perpétrées ; qu'ainsi, en considérant qu'il n'était pas possible de déduire de ces circonstances la participation des intéressés aux faits incriminés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 122-45 et L. 521-1 du Code du travail, alors qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les faits incriminés, de par leur incidence sur le fonctionnement et la continuité du service public de distribution d'énergie et sur la sécurité des personnes et des biens, n'étaient pas constitutifs d'une faute lourde, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-45 et L. 521-1 du Code du travail ;
Mais attendu qu'ayant écarté toute participation personnelle des quatre salariés, même sous forme d'incitation ou d'encouragement, aux faits illicites d'entrave au fonctionnement et à la continuité du service public, la cour d'appel a pu, abstraction faite de tous autres motifs, décider que leur seule présence dans les postes de commande ne constituait pas une faute lourde ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le premier moyen :
Attendu que EDF-GDF fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer le salaire correspondant à la mise à pied et d'avoir annulé celle-ci, alors que, selon le moyen, si un salarié gréviste ne peut être licencié qu'à raison de fautes constitutives d'une faute lourde, il peut, en revanche, en l'absence de faute lourde et à raison de faits fautifs insusceptibles de se rattacher à l'exercice normal du droit de grève, faire l'objet d'une sanction disciplinaire plus légère, laquelle est uniquement soumise au droit commun du contrôle judiciaire et au principe de proportionnalité entre les gravités respectives de la faute du salarié et de la sanction prononcée par l'employeur ; qu'ainsi, en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 521-1, L. 122-43 et L. 122-15 du Code du travail, alors qu'en s'abstenant de rechercher si les faits reprochés aux salariés étaient de nature à justifier une sanction et d'apprécier la proportionnalité entre les gravités respectives des fautes commises et des sanctions prononcées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-43 du Code du travail ;
Mais attendu qu'un salarié gréviste ne peut être licencié ou sanctionné à raison d'un fait commis à l'occasion de la grève à laquelle il participe que si ce fait est constitutif d'une faute lourde ;
D'où il suit qu'ayant écarté la faute lourde, la cour d'appel ne pouvait qu'annuler les sanctions prononcées ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.