Sur le moyen unique :
Vu les articles 13, 14 et 16 de la loi d'amnistie du 4 août 1981 ensemble l'article 1148 du Code civil ;
Attendu que Mme X... a été recrutée le 1er janvier 1977, en qualité de chirurgien-dentiste conseil, par la caisse de Mutualité sociale agricole du Lot-et-Garonne ; que, sur plainte en date du 8 avril 1981, du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, le conseil régional des chirurgiens-dentistes de la région Midi-Pyrénées a prononcé contre elle, le 19 juin 1981, la peine disciplinaire de l'interdiction temporaire d'exercice pour une durée de 3 années ; que, sur appel, la section disciplinaire du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, par décision du 17 décembre 1981, après avoir décidé que les faits reprochés à Mme X... n'étaient pas amnistiés, a confirmé la sanction ; que, saisi d'un recours, le Conseil d'Etat, par arrêt du 20 avril 1984, a jugé que les faits reprochés à Mme X... n'étaient pas de ceux exclus de l'amnistie et, ayant annulé la sanction, a renvoyé la cause devant la section disciplinaire du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes qui, par décision du 4 octobre 1984, a constaté que les faits reprochés à l'intéressée étaient amnistiés ;
Attendu que la caisse de Mutualité agricole, bien qu'elle ait été avertie par Mme X... du recours formé devant le Conseil d'Etat contre la sanction disciplinaire, l'a licenciée sans indemnités par lettre du 10 juin 1982 ; que Mme X... a, dès le 3 août 1982, saisi la juridiction prud'homale en demandant, à défaut de réintégration, la condamnation de son employeur à lui payer les indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, pour débouter Mme X... de ses demandes, l'arrêt infirmatif attaqué, rendu sur renvoi après cassation, a énoncé que le licenciement est intervenu le 10 juin 1982 sur le seul fondement de l'interdiction d'exercer, prononcée par la juridiction disciplinaire, soit à un moment où cette décision de nature disciplinaire était définitive ; qu'en cette matière, régie par le droit public, seul l'appel, et non le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat, est assorti de l'effet suspensif ; que si la sanction, du fait de l'annulation prononcée par le Conseil d'Etat, est réputée n'avoir jamais été prise, il n'en demeure pas moins qu'elle constituait pour l'employeur, tiers à cette procédure disciplinaire, un fait qui s'imposait à lui et dont il devait tirer les conséquences de droit ; que l'interdiction d'exercer frappant Mme X... constituait pour l'employeur une circonstance assimilable à la force majeure, entraînant l'impossibilité absolue d'exécution du contrat ;
Attendu, cependant, qu'en application de l'article 16 de la loi d'amnistie du 4 août 1981, l'exécution de la sanction disciplinaire est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête tendant à faire constater le bénéfice de l'amnistie ; que cet effet suspensif s'applique au recours formé devant le Conseil d'Etat contre la décision de la juridiction disciplinaire refusant le bénéfice de l'amnistie ;
Qu'en statuant, comme elle l'a fait, alors que la sanction était suspendue par l'effet du recours formé devant le Conseil d'Etat et ne constituait donc pas un obstacle à l'exécution du contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 avril 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.