La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/1995 | FRANCE | N°94-40775

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 mai 1995, 94-40775


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par la SNCF depuis le 23 juin 1965 et devenu agent administratif spécialisé, soutenant ne pas avoir perçu pendant ses congés payés une rémunération équivalente à celle qu'il aurait dû percevoir s'il avait travaillé, diverses primes et indemnités s'ajoutant à sa rémunération mensuelle n'ayant pas été prises en considération dans le calcul des indemnités de congés payés, en violation de l'article L. 223-11 du Code du travail, a saisi la juridiction prud'homale, le 3 mars 1992, d'une demande en paiement d'une somme à ti

tre d'indemnité pour les 5 dernières années ; que la SNCF a soulevé l'in...

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par la SNCF depuis le 23 juin 1965 et devenu agent administratif spécialisé, soutenant ne pas avoir perçu pendant ses congés payés une rémunération équivalente à celle qu'il aurait dû percevoir s'il avait travaillé, diverses primes et indemnités s'ajoutant à sa rémunération mensuelle n'ayant pas été prises en considération dans le calcul des indemnités de congés payés, en violation de l'article L. 223-11 du Code du travail, a saisi la juridiction prud'homale, le 3 mars 1992, d'une demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité pour les 5 dernières années ; que la SNCF a soulevé l'incompétence de cette juridiction au profit du Conseil d'Etat ; que, par jugement rendu le 4 janvier 1993, le conseil de prud'hommes de Beaune s'est déclaré incompétent ; que M. X... a interjeté appel ;

Sur le moyen unique, en tant qu'il porte sur le refus d'application de l'article L. 223-11 du Code du travail : (sans intérêt) ;

Mais sur le moyen unique, en tant qu'il porte sur l'exception d'incompétence :

Vu l'article L. 511-1, dernier alinéa, du Code du travail ;

Attendu que, pour confirmer le jugement d'incompétence, la cour d'appel a énoncé que le règlement PS 2 élaboré par la SNCF constitue un élément du statut de son personnel qui constitue lui-même un élément de l'organisation du service public exploité par la SNCF, de telle sorte que ce règlement est un acte réglementaire dont la légalité ne peut, en vertu de la séparation des pouvoirs, être contestée que devant les juridictions administratives ; que les salariés soutiennent qu'ils ne contestent pas la légalité de ce règlement, se limitant à solliciter l'application d'une disposition de droit commun, qu'ils considèrent plus favorable ; que, cependant, il n'est pas possible de revendiquer le bénéfice des dispositions extérieures au règlement relatif à la rémunération, sans invoquer l'illégalité de celui-ci, qui leur est normalement applicable ; que, pour soutenir une telle demande, l'intéressé invoque l'application à son profit de l'article L. 223-11 du Code du travail dans la mesure où ce texte, étant plus favorable que les dispositions correspondantes du statut, doit prévaloir ; que, toutefois, la motivation évoquée à l'appui de cette prétention ne concerne que l'application préférentielle des dispositions d'ordre public du droit du travail, lorsqu'elles sont plus favorables aux salariés ; qu'en l'espèce, il n'est pas invoqué que les dispositions réglementaires relatives aux congés payés des agents SNCF soient d'ordre public ; que, d'autre part, il ne peut être tiré argument d'une comparaison avec le régime des conventions collectives qui doivent s'effacer lorsque les dispositions d'un contrat individuel de travail sont plus favorables en application du principe selon lequel les diverses sources du droit du travail jouent successivement à sens unique au profit des salariés ; qu'en effet, il convient de replacer le mode de calcul des congés payés des agents de la SNCF dans le contexte plus général des dispositions réglementaires et statutaires du personnel de la SNCF dont l'élaboration est soumise aux exigences du service public confié à la SNCF ; qu'à ce titre, la SNCF souligne au titre des particularités du service public que les congés payés sont payés sous forme de rémunération et non pas d'indemnité et que certains éléments, tels que la prime de fin d'année, ne sont pas affectés par la prise de congés, que, d'autre part, ils peuvent être pris par anticipation, la modulation des effectifs en service devant tenir compte des fluctuations saisonnières du trafic ; qu'ainsi, les contraintes du service public justifient tant à la fois l'existence d'un statut du personnel spécifique et l'impossibilité d'invoquer le bénéfice de clause plus favorable, chaque fois qu'une disposition réglementaire est plus restrictive que le droit commun ; qu'un tel régime dérogatoire a été consacré par la loi n° 82-1153 du 30 octobre 1982 qui a notamment transformé la SNCF en un établissement public à caractère industriel et commercial, qui a pour objet l'exploitation , selon les principes du service public, du réseau ferré national et qui, en conséquence, a précisé dans son article 23 qu'elle ne porte pas atteinte aux dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles régissant les situations des personnels de la société et de ses filiales ; que, dès lors, la revendication de disposition plus favorable ne peut se faire qu'au travers d'une contestation du règlement PS 2 dont l'appréciation ne relève pas de la compétence des tribunaux de

l'ordre judiciaire ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en application de l'article L. 511-1, dernier alinéa, du Code du travail, il appartient aux juridictions judiciaires de se prononcer au fond sur le litige opposant la SNCF à l'un de ses agents, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la cassation encourue n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur la compétence, la Cour de Cassation étant en mesure de mettre fin à cette partie du litige, par application des règles relatives à la compétence ; qu'il convient, dans ces conditions, de faire application de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile et de décider, comme la cour d'appel aurait dû le faire, que le dossier de la procédure sera renvoyé devant le conseil de prud'hommes de Beaune, compétent pour statuer sur le fond ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

DECLARE la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur la demande formée par M. X... ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi devant une autre cour d'appel pour qu'il soit statué sur la compétence.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 94-40775
Date de la décision : 22/05/1995
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

PRUD'HOMMES - Compétence - Compétence matérielle - SNCF - Règlement PS 2 - Litige sur l'application d'une disposition de droit commun plus favorable .

SEPARATION DES POUVOIRS - Chemin de fer - SNCF - Statut du personnel - Règlement PS 2 - Litige sur l'application d'une disposition de droit commun plus favorable - Compétence judiciaire

CHEMIN DE FER - SNCF - Personnel - Règlement PS 2 - Congés payés - Indemnité - Litige sur l'application d'une disposition de droit commun plus favorable - Compétence judiciaire

TRAVAIL REGLEMENTATION - Congés payés - Indemnité - Agents de la SNCF - Règlement PS 2 - Litige sur l'application d'une disposition de droit commun plus favorable - Compétence judiciaire

Lorsqu'un agent de la SNCF demande l'application d'une disposition de droit commun qu'il considère plus favorable que la disposition correspondante du règlement élaboré par la SNCF, les juridictions judiciaires ne peuvent décliner leur compétence mais doivent, en application de l'article L. 511-1, dernier alinéa, du Code du travail, se prononcer au fond sur le litige l'opposant à la SNCF.


Références :

Code du travail L511-1 dernier alinéa

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 15 décembre 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 mai. 1995, pourvoi n°94-40775, Bull. civ. 1995 V N° 165 p. 120
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 V N° 165 p. 120

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Kuhnmunch .
Avocat général : Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Desjardins.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Odent.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:94.40775
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award