ANNULATION sur le pourvoi formé par :
- X... Gérard,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, 3e chambre, en date du 8 février 1994, qui, pour outrage aux bonnes moeurs en état de récidive légale et pour fraude commerciale, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et 180 000 francs d'amende, a prononcé contre lui l'interdiction d'exercer les fonctions de directeur de toutes entreprises d'impression et d'édition, et a ordonné la confiscation et la destruction des objets saisis.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 4 du code pénal, 227-24 du nouveau Code pénal, 6 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de la rétroactivité in mitius :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'outrage aux bonnes moeurs sur le fondement de l'article 283 du Code pénal dans sa rédaction applicable aux faits ;
" aux motifs que, en fabriquant et détenant en vue de leur commercialisation des films, ainsi que les matrices servant à la reproduction, essentiellement consacrés à la représentation de violences et perversions sexuelles dégradantes pour la personne humaine faisant appel aux appétits les plus grossiers, ainsi qu'en attestent leurs titres, et du fait que le prévenu ait déjà été condamné pour avoir commercialisé la plupart des films ci-dessus énumérés, le prévenu s'est rendu coupable du délit reproché ;
" alors, d'une part, que l'article 227-24 du nouveau Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994, qui a abrogé l'article 283 du Code pénal, est un texte moins sévère en ce que l'infraction qu'il définit n'est pénalement punissable que si le message à caractère violent ou pornographique est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur ; qu'ainsi l'arrêt attaqué, qui a prononcé une condamnation sur le fondement d'un texte plus sévère, doit être annulé ;
" alors, d'autre part, et subsidiairement, que la réglementation appliquée aux films pornographiques, notamment sur le plan fiscal, implique que sont devenues licites la production, y compris sur bandes magnétiques, et la distribution de ces films, et les exclut nécessairement du champ d'application de l'article 283 du Code pénal ; que, dès lors, l'infraction de fabrication et de détention de films pornographiques et leurs matrices n'est pas constituée ;
" alors, enfin, et toujours subsidiairement, que, en se bornant à affirmer que la représentation de violences et de perversions sexuelles était attestée par les titres, sans s'expliquer sur le contenu réel de ces films, cependant que la seule référence aux titres caractérise d'autant moins le délit que certains d'entre eux n'ont, en tant que tels, aucune connotation violente ou sexuelle (X... ; Y... sous le joug ; La 2e peau ; Doc ; etc.), la cour d'appel n'a donné aucune base légale à sa décision ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 112-1, alinéa 3, du Code pénal, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes ;
Attendu que par l'arrêt attaqué, Gérard X... a été déclaré coupable d'outrage aux bonnes moeurs et condamné de ce chef ;
Attendu que, si la cour d'appel n'encourt aucune censure pour avoir retenu que les faits déclarés constants entraient dans les prévisions de l'article 283 du Code pénal visé aux poursuites, en revanche, depuis le 1er mars 1994 l'application de l'article 227-24 du Code pénal exige que le message dont le film est le support, soit susceptible d'être vu ou perçu par un mineur ;
Que, dès lors, l'arrêt doit être annulé et l'affaire renvoyée devant les juges du fond, aux fins de procéder à un nouvel examen des faits au regard de celles des dispositions de l'article 227-24 du Code pénal qui, plus restrictives que les précédentes, définissent l'infraction poursuivie ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :
ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, en date du 8 février 1994, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse.