| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 février 1995, 93-82808
ARRÊT N° 1 REJET du pourvoi formé par : - le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, contre l'arrêt de cette juridiction, chambre correctionnelle, en date du 13 avril 1993, qui, dans les poursuites exercées contre Jean-Claude X... du chef d'infractions à l'article 1er du décret du 15 avril 1912 et aux articles 1er et 4 de la loi du 1er août 1905, a prononcé la relaxe du prévenu. LA COUR, Vu le mémoire produit ; Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1er, 4, 13 de la loi du 1er août 1905 et 1er du décret du 15 avri
l 1912, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ...
ARRÊT N° 1
REJET du pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
contre l'arrêt de cette juridiction, chambre correctionnelle, en date du 13 avril 1993, qui, dans les poursuites exercées contre Jean-Claude X... du chef d'infractions à l'article 1er du décret du 15 avril 1912 et aux articles 1er et 4 de la loi du 1er août 1905, a prononcé la relaxe du prévenu.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1er, 4, 13 de la loi du 1er août 1905 et 1er du décret du 15 avril 1912, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la cour d'appel a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite ;
" aux motifs que la partie poursuivante ne rapportait pas la preuve que l'adjonction des conservateurs retrouvés dans les produits importés par le prévenu, autorisée dans le pays de production et par la réglementation communautaire, faisait courir un risque à la santé du consommateur ;
" alors, d'une première part, que la procédure d'autorisation imposée par la réglementation française licite au regard de la directive n° 64-54 CEE n'avait pas été respectée ;
" et alors, d'une deuxième part, que si la Cour s'estimait insuffisamment informée sur la toxicité des produits en cause, il lui appartenait d'ordonner un supplément d'information " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme qu'à la suite du contrôle de fromages et de gâteaux en provenance d'Italie et de la mise en évidence d'acide sorbique et d'acide benzoïque utilisés comme agents conservateurs, Jean-Claude X..., gérant de la société X..., importateur de ces produits, a été poursuivi devant la juridiction correctionnelle, sur le fondement des articles 1er et 4 de la loi du 1er août 1905 devenus L. 213-1 et L. 213-4 du Code de la consommation et 1er du décret du 15 avril 1912 alors applicable, pour détention de denrées falsifiées et tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise ;
Attendu que, pour renvoyer Jean-Claude X... des fins de la poursuite, la cour d'appel relève que l'emploi d'acide sorbique et d'acide benzoïque pour la conservation de telles denrées alimentaires, autorisée en Italie, est conforme à la directive n° 64-54 CEE du 5 novembre 1963 ; qu'en conséquence, l'interdiction dont ces produits font l'objet en France, n'est admissible qu'à la condition que soit démontrée qu'une telle mesure a pour but un niveau de protection de la santé supérieur à celui déjà fixé par ce texte ; que l'éventuelle surconsommation d'additifs dénoncée par l'Administration ne saurait, en l'absence d'éléments établissant l'existence d'un risque pour la santé, constituer une telle justification ; que les juges en concluent que l'élément matériel des infractions visées à la prévention fait défaut et ajoutent qu'en toute hypothèse, la mauvaise foi du prévenu n'est pas établie ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que le prévenu n'était pas tenu, en présence d'une réglementation non conforme aux articles 30 et 36 du Traité et à la directive n° 64-54 CEE, de solliciter une autorisation administrative préalable pour l'emploi des additifs considérés, la cour d'appel a, sans encourir les griefs allégués, justifié sa décision ;
Qu'en effet, en l'état de l'harmonisation intervenue au sein de la Communauté européenne à la suite de l'entrée en vigueur de la directive n° 64-54 CEE, un Etat membre ne pouvait interdire la commercialisation d'une denrée comportant un des additifs visés par ce texte qu'à la double condition que cette interdiction fût justifiée compte tenu des résultats de la recherche scientifique internationale ainsi que des habitudes alimentaires du pays et, en outre, qu'elle pût faire l'objet, le cas échéant, de dérogations éventuelles, à la demande des importateurs de ces produits, selon des modalités accessibles et dans un délai raisonnable ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
1°
Selon les dispositions combinées des articles 30 et 36 du traité des Communautés européennes, les restrictions à l'importation, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les Etats membres. Si certaines interdictions sont cependant admises, notamment pour des raisons tenant à la protection de la santé publique, c'est à la condition que ces interdictions ne constituent ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre Etats membres. Dans le cas contraire, il appartient au juge répressif d'écarter les dispositions de droit interne (arrêts n°s 2 et 3)(1).
2°
En l'état de l'harmonisation qui existait au sein de la Communauté européenne à la suite de l'entrée en vigueur de la directive n° 64-54 CEE, un Etat membre ne pouvait interdire la commercialisation d'une denrée comportant un des additifs autorisés par ce texte qu'à la double condition que cette interdiction fût justifiée compte tenu des résultats de la recherche scientifique internationale ainsi que des habitudes alimentaires du pays et, en outre, qu'elle pût faire l'objet, le cas échéant, de dérogations éventuelles à la demande des importateurs de ces produits, selon des modalités accessibles et dans un délai raisonnable (arrêts n°s 1, 2 et 3)(2).
Donne ainsi une base légale à sa décision la cour d'appel qui, pour écarter les dispositions de la loi du 1er août 1905 et du décret du 15 avril 1912, relève que la partie poursuivante, à qui incombe la charge de la preuve, ne démontre pas, au regard des habitudes alimentaires des consommateurs, que l'interdiction d'utiliser de l'acide sorbique et de l'acide benzoïque pour la conservation de " mozzarela " ou de " pannetone " importés d'Italie où ces denrées sont légalement fabriquées a pour but un niveau de protection de la santé supérieur à celui déjà fixé par la directive précitée qui autorise l'emploi de ces additifs (arrêt n° 1).
Encourt en revanche la censure la cour d'appel qui, pour refuser d'écarter l'application des dispositions de droit interne, se borne à affirmer que l'interdiction d'utiliser de l'acide sorbique pour la conservation de salades composées importées d'Allemagne où elles sont légalement fabriquées est justifiée par la protection de la santé publique (arrêt n° 3).
Encourt également la censure la cour d'appel qui, aux mêmes fins, se borne à justifier l'interdiction d'utiliser ce même additif dans le fourrage de confiseries chocolatées, importées de Belgique, par les seuls résultats de la recherche scientifique nationale et qui fait grief à l'importateur de ne pas s'être soumis à la procédure d'autorisation existante, sans rechercher si celle-ci, alors aménagée par une circulaire du 8 août 1980, présentait les garanties d'accessibilité et de célérité nécessaires (arrêt n° 2).
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Références :
2° : Directive CEE 64-54 du 05 novembre 1963 Décret du 15 avril 1912 art. 1 Loi du 01 août 1905 art. 1, art. 4
Date de l'import : 14/10/2011 Fonds documentaire : Legifrance Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.82808
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