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09/11/1994 | FRANCE | N°92-84233

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 novembre 1994, 92-84233


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 30 juin 1992, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Michel X... et Hans Y..., pour exercice illégal de la pharmacie, l'a débouté de sa demande après avoir relaxé les prévenus.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 511, L. 512, L. 517, L. 658-1 du Code de la santé publique, de la directive CE

E n° 65 / 65, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale, défa...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 30 juin 1992, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Michel X... et Hans Y..., pour exercice illégal de la pharmacie, l'a débouté de sa demande après avoir relaxé les prévenus.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 511, L. 512, L. 517, L. 658-1 du Code de la santé publique, de la directive CEE n° 65 / 65, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale, défaut de réponse aux conclusions et contradiction de motifs :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... et Y... du délit d'exercice illégal de la pharmacie et en conséquence débouté la partie civile de son action ;
" aux motifs que " les premiers juges ont déclaré que la solution Hansaplast devait être classée comme un médicament, du fait qu'elle contenait du digluconate de chlorhexidine ayant un pouvoir bactéricide puissant et qu'elle avait une fonction curative " ;
" que cette décision ne sera pas confirmée par la Cour ; qu'il convient de procéder à l'analyse concrète du produit ;
" que s'il est exact que la solution Hansaplast contient du digluconate de chlorhexidine, qui est un antiseptique, ce seul fait ne saurait lui conférer la qualité de médicament ; qu'il importe d'étudier plus précisément sa composition, et de rappeler son usage et ses conditions d'emploi ;
" qu'il s'agit d'une solution à usage externe, destinée à une application par pulvérisation sur la peau ; qu'elle est composée d'eau et de digluconate de chlorhexidine à faible concentration (1 %) ; qu'il ne s'agit pas d'un produit utilisé en vue de restaurer, corriger ou modifier les fonctions organiques et qu'il n'a pas d'effet significatif sur le métabolisme ; qu'il n'est pas établi qu'il présente des risques pour les consommateurs ; qu'en effet la lecture du dossier analytique joint au rapport d'expertise du professeur Z... et de l'annexe concernant la chlorhexidine, ainsi que la référence faite par la partie civile aux spécialités (mentionnées dans le Vidal) qui contiennent de la chlorhexidine, permettent de constater que les produits évoqués comme présentant des risques de toxicité ou de contre-indication et qui nécessitent des mises en garde particulières pour leur utilisation sont des solutions dont la teneur en digluconate de chlorhexidine est beaucoup plus élevée (ex. hibitane à 20 % de chlorhexidine, ou hibitane à 5 % de chlorhexidine et tension-actif), ou des produits destinés à un autre usage (bains de bouche) ;
" qu'il résulte de l'expertise du professeur A..., que c'est en raison de la faible teneur en digluconate de chlorhexidine de la solution Hansaplast que ce produit n'a pas été classé par lui dans la catégorie des médicaments par fonction ;
" que ses modalités d'emploi (application en pulvérisation sur la peau), que l'ampleur de sa diffusion et la connaissance qu'ont les consommateurs des propriétés de cette solution, qui est commercialisée depuis l'année 1984, comme produit d'hygiène corporelle ayant une action antiseptique, sont autant d'éléments à retenir pour exclure la qualification de médicament par fonction, au sens de l'article L. 511 du Code de la santé publique et de la directive n° 65 / 65 CEE du Conseil des Communautés européennes du 26 janvier 1965 ; que le jugement sera donc infirmé ;
" alors que le demandeur soutenait dans ses conclusions d'appel (page 13) que le produit litigieux, du fait qu'il contient uniquement du digluconate de chlorhexidine et de l'eau " ne peut donc avoir aucun autre effet que de corriger, modifier les tissus lésés pour prévenir ou soigner une infection locale " ce dont il résulte que ce produit ne peut avoir d'autre qualification que celle de médicament par fonction ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors que constitue un médicament au sens de la seconde définition communautaire et de l'article L. 511 du Code de la santé publique, tout produit pouvant être administré " en vue de " restaurer les fonctions organiques, c'est-à-dire qui est conçu spécialement pour un usage médical, que ses effets soient réels ou supposés, en sorte que le critère du médicament par " fonction " doit être recherché non dans la plus ou moins grande efficacité ou innocuité du produit considéré, mais dans l'usage médical ou non auquel il est destiné ; qu'en écartant la qualification de médicament tout en relevant que la solution antiseptique cutanée est expressément présentée comme destinée à " maintenir l'asepsie cutanée " (arrêt p. 7) et qu'elle contient exclusivement " du digluconate de chlorhexidine, qui est un antiseptique " (p. 8), la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient, violant ainsi les textes visés au moyen ;
" qu'en retenant, pour écarter la qualification de médicament, la circonstance qu'il s'agit d'une " solution à usage externe " et que sa faible concentration en digluconate de chlorhexidine la rend sans risque de toxicité, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de la définition légale du médicament, violant ainsi derechef les textes visés au moyen ;
" alors que selon l'article L. 658-1 du Code de la santé publique, lui-même issu de la directive n° 76-768 du Conseil des Communautés européennes, constituent des produits d'hygiène corporelle les substances ou préparations " autres que les médicaments " destinées à être mises en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain ou encore les muqueuses en vue de les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d'en modifier l'aspect, de les parfumer ou d'en corriger l'odeur, que lorsqu'un produit répond concurremment à cette définition et à celle du médicament, c'est le régime juridique du médicament qui doit s'appliquer par préférence, que le seul fait qu'un produit soit à usage externe et ne comporte qu'une faible concentration de principe actif ne suffit pas à le caractériser comme un simple produit d'hygiène ; qu'en ne recherchant pas en quoi le produit litigieux avait pour usage exclusif la protection ou le nettoyage de la peau et en se bornant à se référer à l'usage externe du produit, à sa composition et à la manière dont il était présenté commercialement, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu, d'une part, que, selon l'article L. 511 du Code de la santé publique, sont considérés comme médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ainsi que tout produit pouvant être administré à l'homme en vue de restaurer, corriger ou modifier ses fonctions organiques ;
Attendu, d'autre part, que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le centre de distribution, dont Jean-Michel X... est directeur, a mis en vente notamment une solution antiseptique Hansaplast qui lui était fournie par la société BDF Nivéa dont Hans Y... est le directeur ; que ce dernier, de même que Jean-Michel X... qui, ni l'un ni l'autre, n'ont la qualité de pharmacien ont été poursuivis pour exercice illégal de la pharmacie, sur plainte avec constitution de partie civile du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens ;
Attendu que pour décider que le produit mis en vente n'est pas un médicament, relaxer les prévenus et débouter la partie civile de sa demande, la juridiction du second degré, qui relève que le produit mis en vente est présenté comme une solution antiseptique et qu'il contient du digluconate de chlorhexidine, substance antiseptique et désinfectante, retient cependant qu'il n'est pas utilisé en vue de restaurer, corriger ou modifier les fonctions organiques et qu'il ne s'agit pas d'un médicament par fonction ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui ne pouvait, sans se contredire, à la fois constater que le produit incriminé contenait une substance antiseptique désinfectante et énoncer qu'il n'était pas utilisé en vue de restaurer, modifier ou corriger les fonctions organiques, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 30 juin 1992, mais seulement en ce qu'il a statué sur l'action civile relative à la vente de la solution antiseptique Hansaplast, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 92-84233
Date de la décision : 09/11/1994
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Pharmacie - Spécialités pharmaceutiques - Médicament - Médicament par présentation ou par fonction - Médicament par fonction - Définition.

Sont considérées comme médicament au sens de l'article L. 511 du Code de la santé publique les substances et compositions pouvant être administrées en vue de restaurer, corriger ou modifier les fonctions organiques. Est entaché de contradiction et encourt la censure l'arrêt qui, après avoir constaté que la solution mise en vente contient du digluconate de chlorhexidine, substance antiseptique et désinfectante, énonce cependant que ce produit n'est pas utilisé en vue de restaurer, corriger ou modifier les fonctions organiques. (1).


Références :

Code de la santé publique L511

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 juin 1992

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1989-05-02, Bulletin criminel 1989, n° 174, p. 449 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1994-05-25, Bulletin criminel 1994, n° 202, p. 468 (rejet et cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 nov. 1994, pourvoi n°92-84233, Bull. crim. criminel 1994 N° 359 p. 879
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1994 N° 359 p. 879

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Souppe, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Galand.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Jean Simon.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Célice et Blancpain, la SCP Vier et Barthélemy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.84233
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