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08/11/1994 | FRANCE | N°93-81274

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 novembre 1994, 93-81274


REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, en date du 23 février 1993, qui, pour blessures involontaires et infraction aux règles d'hygiène et de sécurité du travail, l'a condamné à 10 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 231-1, L. 233 et L. 263-2 du Code du travail, 319 et 320 et R. 40. 4° du Code pénal, 8 et 9 du décret du 29 novembr

e 1977, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base lég...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, en date du 23 février 1993, qui, pour blessures involontaires et infraction aux règles d'hygiène et de sécurité du travail, l'a condamné à 10 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 231-1, L. 233 et L. 263-2 du Code du travail, 319 et 320 et R. 40. 4° du Code pénal, 8 et 9 du décret du 29 novembre 1977, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Paul X... " coupable des faits qui lui sont reprochés " et " entièrement responsable de l'accident survenu à Jean-Charles Y... le 4 septembre 1989 " et a condamné le premier à payer une amende de 10 000 francs, une indemnité provisionnelle de 5 000 francs et la somme de 5 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs que " la société Egelec était chargée par Unimetal entreprise utilisatrice d'alimenter l'ensemble des pompes à eau et auxiliaires à partir d'une armoire de distribution électrique 380 volts et qu'à ce titre, en confiant des travaux sur ses installations à une autre société (Egelec) elle aurait dû disposer ou mettre en oeuvre un moyen de prévention permettant à tout intervenant interne ou externe d'opérer en toute sécurité ; qu'il s'ensuit que le non-respect des dispositions de l'article L. 233-1 du Code du travail est caractérisé à l'encontre de la victime d'Unimetal ; que ce défaut de précaution a entraîné des blessures sur la personne de Jean-Charles Y..., Guy Z... et Eric A... ;
" alors que l'arrêt qui précise que la société Egelec était chargée par Unimetal, entreprise utilisatrice, d'alimenter l'ensemble des pompes à eau à partir d'une armoire de distribution électrique de 380 volts ne pouvait, sans violer les articles 8 et 9 du décret du 29 novembre 1977 qui faisait peser la responsabilité de l'organisation des mesures de sécurité sur l'entreprise intervenante, décider qu'il incombait en l'occurence au directeur d'Unimetal de prendre toutes les mesures utiles sur les installations en cause et d'organiser la sécurité du personnel d'Egelec " ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 231-1, L. 233 et L. 253-2 du Code du travail, 319, 320 et R. 40. 4° du Code pénal, 50 du décret du 14 novembre 1988 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Paul X... " coupable des faits qui lui sont reprochés " et " entièrement responsable de l'accident survenu à Jean-Charles Y... le 4 septembre 1989 " et a condamné le premier à payer une amende de 10 000 francs, une indemnité personnelle de 5 000 francs et la somme de 5 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs, d'une part, que " l'expert conclut de la façon suivante : " la cause probable de l'accident paraît être un contact accidentel entre les bornes d'un disjoncteur et le panneau avant du tableau de distribution. Cet accident a eu lieu au moment où Y... désolidarisait le câble qu'il voulait récupérer du faisceau des autres conducteurs maintenus par des colliers en plastique. L'écrou de la borne était peut-être desserré ou bien la borne avait du jeu, toujours est-il que la cosse du conducteur a dû effleurer la tôle du panneau et qu'un arc a jailli et c'est là que la configuration de cette ancienne installation a largement contribué à intensifier les effets de ce contact accidentel. En bref, il manquait surtout un disjoncteur de départ à l'origine de cette ligne destinée, du fait de sa section, à supporter au plus 270 A. La présence d'un tel disjoncteur aurait eu pour effet de limiter le courant de court-circuit et de réduire, au minimum, le plus de métal en fusion qui a dû se produire avec la formidable intensité de court-circuit du transformateur de 630 kvA (environ 23 000 A aux bornes du transformateur) " ;
" alors qu'il résulte des conclusions de l'expert que les causes exactes de l'accident étaient demeurées indéterminées de sorte que la culpabilité de X... ne pouvait être retenue et qu'en se prononçant comme elle l'a fait, la cour d'appel prive sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;
" que de plus, en adoptant lesdites conclusions de l'expert qui ne faisaient que d'envisager des hypothèses, l'arrêt attaqué retient des motifs hypothétiques qui ne permettent pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle, de sorte que l'article 593 du Code de procédure pénale se trouve violé ;
" qu'il en est d'autant plus ainsi que, dans ses conclusions, le demandeur avait dénoncé l'indétermination des causes de l'accident et qu'en ne répondant pas, l'arrêt attaqué a derechef violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" et aux motifs, d'autre part, qu'il résulte de l'enquête de l'inspecteur du Travail : que la mise en oeuvre d'une mesure aurait permis d'assurer la sécurité de l'équipe d'intervention contre tous risques d'origine électrique : la mise hors tension de l'ensemble du tableau électrique ; que la direction d'Unimetal, entreprise utilisatrice, disposait d'un moyen de prévention dont elle avait connaissance permettant à ses propres salariés d'intervenir en toute sécurité au sein de l'armoire électrique et ce, sans perturber la production et qu'elle n'a pas respecté l'obligation générale de sécurité qui lui incombait ;
" alors qu'en se contentant d'affirmer, avec l'inspecteur du Travail, " que la mise en oeuvre d'une mesure aurait permis d'assurer la sécurité " et " que la direction d'Unimetal, entreprise utilisatrice, disposait d'un moyen de prévention ", sans indiquer en quoi une telle " mesure " s'imposait au regard de la réglementation applicable et, par conséquent, sans s'expliquer valablement sur le motif de la décision infirmée d'où il résultait au contraire que les branchements litigieux avaient été entrepris en toute conformité avec l'article 50, paragraphe 1er, du décret du 14 novembre 1988 relatif à la protection des travailleurs dans les établissements qui mettent en oeuvre des courants électriques, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 320 du Code pénal " ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 231-1, L. 233 et L. 263-2 du Code du travail, 319, 320 et R. 40. 4° du Code pénal, 1134 du Code civil, 8 et 9 du décret du 29 novembre 1977 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Paul X... coupable des faits qui lui sont reprochés " et " entièrement responsable de l'accident survenu à Jean-Charles Y... le 4 septembre 1989 " et a condamné le premier à payer une amende de 10 000 francs, une indemnité provisionnelle de 5 000 francs et la somme de 5 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs que les allégations de X... selon lesquelles les sociétés sous-traitantes agissaient sous leur propre responsabilité ne peuvent être retenues, s'agissant d'une installation ne présentant pas de garanties suffisantes pour les tiers ;
" alors que le contrat conclu entre Unimetal et Egelec mentionnait que les travaux sont à réaliser sous l'entière responsabilité d'Egelec, tant dans leur exécution que dans la conduite de personnel, de sorte qu'en se prononçant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé ledit contrat ;
" qu'au surplus, l'entreprise Egelec n'avait pas la qualité de sous-traitante mais celle d'entreprise intervenante au sens du décret du 29 novembre 1977 qui répartit impérativement les fonctions des chefs d'entreprise concernées " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du procès-verbal de l'inspection du Travail, base de la poursuite, que la société Unimétal, ayant décidé de modifier les installations électriques de la station de pompage assurant l'alimentation en eau d'une mine de fer exploitée par elle, a confié à la société Egelec les travaux de branchement du nouveau tableau de distribution installé par EDF ; qu'avant de commencer les travaux, Jean Y..., salarié de la société Egelec, a procédé, sur autorisation de Guy Z..., contremaître chef du service électrique Unimétal, responsable du suivi des opérations, à la mise hors tension de la pompe dont le câble d'alimentation devait être détourné ; que pendant la manoeuvre de débranchement de celui-ci, un amorçage entre les bornes restées sous tension a provoqué des arcs électriques occasionnant des brûlures aux deux salariés précités, ainsi qu'à un autre ouvrier de la société Egelec ;
Attendu que Jean-Paul X..., dirigeant de la société Unimétal, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel sur le fondement de l'article L. 233-1 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi du 31 décembre 1991, et dont les dispositions sont pour partie reprises dans l'article L. 233-5-1 dudit Code, pour avoir omis d'aménager les locaux de manière à garantir la sécurité des travailleurs, ainsi que pour délit et contraventions de blessures involontaires ; qu'il a été relaxé par les premiers juges ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et déclarer le prévenu coupable de blessures involontaires à l'égard des trois victimes, et en outre, par application de l'article L. 233-1 précité à l'égard de son préposé, la cour d'appel retient qu'il ressort de l'enquête menée par l'inspecteur du Travail et des conclusions de l'expert désigné en cours de procédure que la mise hors tension de l'ensemble du tableau de distribution aurait permis, sans perturber la production des laminoirs, d'assurer la sécurité de l'équipe d'intervention contre tous les risques d'origine électrique ; que les juges ajoutent que l'absence de mise en oeuvre de cette procédure caractérise l'infraction aux règles de sécurité visée à la prévention, et que ce défaut de précaution présente un lien direct de causalité avec les blessures subies tant par le salarié de la société Unimétal que par les deux autres victimes ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de caractère hypothétique, et procédant d'une appréciation souveraine par les juges du second degré des faits et circonstances de la cause ainsi que de la valeur des éléments de preuve contradictoirement débattus, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ;
Que les prescriptions du décret du 29 novembre 1977, abrogé et remplacé par le décret du 20 février 1992, ne faisant pas obstacle à l'application des dispositions générales du Code du travail relatives à l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail, la cour d'appel n'avait pas à rechercher l'existence éventuelle d'infractions au décret susvisé dont elle n'était pas saisie ; qu'il n'importe qu'elle ait répondu par un motif erroné au moyen de défense invoqué par le prévenu et pris de ce que les travaux devaient être exécutés sous la seule responsabilité de la société Egelec, dès lors qu'il se déduit des motifs de l'arrêt que la mise hors tension de l'installation électrique constituait une opération préalable auxdits travaux dépendant de la seule initiative de la société Unimétal ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-81274
Date de la décision : 08/11/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Responsabilité pénale - Chef d'entreprise - Travaux effectués dans un établissement par une entreprise extérieure - Dispositions applicables.

RESPONSABILITE PENALE - Chef d'entreprise - Hygiène et sécurité des travailleurs - Travaux effectués dans un établissement par une entreprise extérieure - Dispositions applicables

Les prescriptions du décret du 29 novembre 1977, abrogé et remplacé par le décret du 20 février 1992, relatif aux mesures d'hygiène et de sécurité applicables aux travaux effectués dans un établissement par une entreprise extérieure, ne font pas obstacle à l'application des dispositions générales du Code du travail relatives à l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail.


Références :

Code du travail L233-1 (loi 91-1406 du 31 décembre 1991), L233-5-1
Décret 77-1321 du 29 novembre 1977
Décret 92-158 du 20 février 1992

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy (chambre correctionnelle), 23 février 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 nov. 1994, pourvoi n°93-81274, Bull. crim. criminel 1994 N° 355 p. 867
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1994 N° 355 p. 867

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Galand.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Batut.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Célice et Blancpain, M. Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:93.81274
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