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05/10/1994 | FRANCE | N°93-82700

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 octobre 1994, 93-82700


CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de garantie contre les accidents (FGA), partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, du 15 janvier 1993, qui, dans la procédure suivie contre Willis X... pour blessures involontaires, a interprété son arrêt du 14 juin 1991 ayant prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 486, 512, 710, 711 et 592 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué ne constate n

i la présence ni l'audition du ministère public à l'audience des débats " ;
At...

CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de garantie contre les accidents (FGA), partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, du 15 janvier 1993, qui, dans la procédure suivie contre Willis X... pour blessures involontaires, a interprété son arrêt du 14 juin 1991 ayant prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 486, 512, 710, 711 et 592 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué ne constate ni la présence ni l'audition du ministère public à l'audience des débats " ;
Attendu que si, contrairement à ce qui est allégué par le demandeur, la présence du ministère public lors des débats résulte de l'arrêt attaqué, rédigé en un seul contexte, aucune mention ne fait état de son audition ;
Attendu, toutefois, qu'il n'est ni établi ni même allégué, en l'espèce, que l'inobservation de cette formalité substantielle ait eu pour effet de porter atteinte aux intérêts civils, seuls en cause, du demandeur ; que, dès lors, par application de l'article 802 du Code de procédure pénale, cette omission ne saurait entraîner la nullité de la décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 710, 711 et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que, statuant sur une " requête en interprétation " d'un précédent arrêt qui avait évalué le préjudice de la victime et fixé les sommes revenant aux parties civiles et aux tiers payeurs, l'arrêt attaqué a modifié la chose jugée et ajouté au précédent dispositif, premièrement, en fixant les modalités de la répartition au marc le franc de la somme de 5 000 000 francs entre les créanciers et, deuxièmement, en fixant le contenu d'une obligation du Fonds de garantie " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 376-1 du Code de la sécurité sociale et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a " estimé que le Bureau central français devait répartir les 5 millions de francs entre les créanciers au marc le franc, c'est-à-dire au prorata de leurs créances respectives, en sorte que le Bureau central français doit régler, en deniers ou quittances, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, la somme de 1 182 389, 68 francs, et lui rembourser les arrérages à échoir, au fur et à mesure de leur échéance, si mieux il ne préfère régler immédiatement une somme globale de 2 307 775, 52 francs, soit au total la somme de 3 490 145, 20 francs " ;
" aux motifs que " la totalité des créances s'élève à la somme de 7 740 469, 71 francs se décomposant comme suit :
" créance de la caisse primaire dont 1 182 389 F échus
1 403 072, 68 F " société Lyonnaise
676 512, 79 F " Christian Y...

1 495 884, 24 F " Alix Y... (5 000 francs + 50 000 francs)
55 000, 00 F " Marie-France Y...

50 000, 00 F " Philippe Y...

50 000, 00 F " Consorts Y... (article 700)
10 000, 00 F
7 740 469, 71 F
" que le Bureau central français doit donc répartir la somme de 5 millions de francs de la façon suivante (et en deniers ou quittances) :
" 1o caisse primaire des Alpes-Maritimes :
" (5 000 000 F 5 403 072, 68 F) r3 490 145, 20 F
7 740 469, 71 F
" dont 1 182 389, 68 F
" 2o société Lyonnaise :
" (5 000 000 F 676 512, 79 F) = 436 997, 25 F
7 740 469, 71 F
" 3o Christian Y... :
" (5 000 000 F 1 495 884, 24 F) r966 274, 82 F
7 740 469, 71 F
" 4o Alix Y... :
" (5 000 000 F 55 000 F) = 35 527, 56 F
7 740 469, 71 F
" 5o Marie-France Y... :
" (5 000 000 F 50 000 F) = 32 297, 78 F
7 740 469, 71 F
" 6o Philippe Y... :
" (5 000 000 F 50 000 F) = 32 297, 78 F
7 740 469, 71 F
" 7o consorts Y... :
" (5 000 000 F 10 000 F) r6 459, 61 F
7 740 469, 71 F
5 000 000, 00 F
" que le Bureau central français doit régler d'ores et déjà à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, en deniers ou quittances, la somme de 1 182 389, 68 francs, et lui rembourser les arrérages à échoir, au fur et à mesure de leur échéance, et les frais futurs au fur et à mesure de leur dépense, si, mieux, il ne préfère régler immédiatement la somme complémentaire de :
" 3 490 145, 20 F 1 182 389, 68 F = 2 307 755, 52 F soit, au total, la somme de 3 490 145, 20 F " ;
" alors que la caisse de sécurité sociale ne peut poursuivre contre le tiers responsable (ou son assureur) que le remboursement de ses dépenses au fur et à mesure de leur échéance ; qu'en tenant compte dans le calcul des droits des divers créanciers contre l'assureur, dont l'engagement était limité à 5 000 000 de francs, des frais futurs de la Caisse et des arrérages à échoir d'une pension d'invalidité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, L. 421-5, R. 421-15 du Code des assurances et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a, en son dispositif, fait observer que le Fonds de garantie automobile devra remboursement à chaque créancier, à l'exclusion de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, le solde de sa créance impayée par le Bureau central français ;
" alors, d'une part, qu'à supposer que le chef de dispositif ci-dessus cité ne crée pas d'obligation à la charge du Fonds de garantie, il n'appartient pas à une cour d'appel de délivrer, en dispositif de ses décisions, des consultations juridiques, au reste non sollicitées par les parties, et erronées ; que la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;
" alors, d'autre part, qu'à supposer que le chef de dispositif ci-dessus cité crée une obligation à la charge du Fonds de garantie, celui-ci, simple partie intervenante, ne pouvait être condamné par l'arrêt attaqué ;
" alors, de surcroît, que l'employeur de la victime n'est pas un ayant droit de celle-ci bénéficiaire du Fonds de garantie " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que si les juges peuvent interpréter leurs décisions lorsque des difficultés s'élèvent sur le sens de celles-ci, il leur est interdit d'en restreindre ou d'en étendre les dispositions et de modifier ainsi la chose jugée ;
Attendu, en outre, qu'en aucun cas, l'intervention du Fonds de garantie ne peut motiver sa condamnation ;
Attendu que, se prononçant sur les réparations des conséquences dommageables de l'accident dont Willis X..., reconnu coupable de blessures involontaires sur la personne de Christian Y..., a été déclaré entièrement responsable, la juridiction du second degré, par arrêt du 14 juin 1991, devenu définitif, a condamné le premier et son assureur celui-ci à concurrence de 5 millions de francs, limite de sa garantie à rembourser aux tiers payeurs le montant de leurs prestations échues et, au fur et à mesure de leur échéance, celui de leurs prestations à échoir, et à payer une indemnité complémentaire à la victime, outre diverses indemnités aux consorts Y... ;
Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, s'opposant alors aux prétentions du Fonds de garantie tendant, dans la limite de la garantie de l'assureur, à voir restreindre entre elle-même et l'employeur de la victime la répartition des sommes dues par cet assureur au prorata des seules créances prioritaires échues, a présenté à cet effet une requête en interprétation de la décision ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, les juges énoncent que la cour d'appel a " estimé, à l'évidence, que le Bureau central français devait répartir la somme de 5 millions de francs entre les différents créanciers au marc le franc, c'est-à-dire au prorata de leurs créances respectives " ; qu'ils indiquent que cet organisme doit régler d'ores et déjà à la Caisse précitée, en deniers ou quittances, le montant de ses prestations échues et lui rembourser, au fur et à mesure de leur échéance, tant les arrérages à échoir de la pension d'invalidité servie à Christian Y... que les dépenses pour frais futurs, " si mieux il ne préfère régler immédiatement leur capital représentatif, dans la limite ci-dessus fixée " ; qu'ils ajoutent que le Fonds de garantie devra rembourser à chaque créancier, à l'exclusion de la caisse de sécurité sociale, le solde de sa créance impayée par le Bureau central français ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui n'avait d'autre pouvoir, en application des articles 385-1 et 388-3 du Code de procédure pénale, que de déclarer sa première décision opposable à l'assureur lequel, au demeurant, s'était borné à demander acte de ce que sa garantie était limitée n'a pu, sans ajouter à la chose jugée, régler, sous le couvert d'une interprétation, le différend opposant le Fonds de garantie à la caisse de sécurité sociale sur la contribution de l'assureur ;
Que, d'autre part, en prononçant, de surcroît, condamnation contre le Fonds de garantie, et alors, en outre, que la société Lyonnaise des Eaux, employeur de la victime, ne saurait, en sa qualité de tiers payeur, être bénéficiaire de cet organisme, la cour d'appel a encore méconnu les textes et le principe susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 15 janvier 1993 ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger par la juridiction répressive ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-82700
Date de la décision : 05/10/1994
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ASSURANCE - Action civile - Intervention ou mise en cause de l'assureur - Effet - Opposabilité de la décision concernant les intérêts civils - Constatation suffisante.

1° L'intervention volontaire ou forcée de l'assureur à l'instance pénale n'a pour objet, selon l'article 388-3 du Code de procédure pénale, que de lui rendre opposable la décision rendue sur les intérêts civils(1).

2° FONDS DE GARANTIE - Obligation - Caractère subsidiaire - Effet.

2° Il résulte des articles L. 421-1 et R. 421-1 du Code des assurances que le Fonds de garantie contre les accidents n'intervient, pour indemniser la victime, que dans la mesure où elle n'est indemnisée d'aucune façon et qu'en cas d'indemnisation partielle il ne prend en charge que le complément. Tel est le cas lorsque l'employeur de la victime a la qualité de tiers payeur selon les prévisions de l'article 29.4 de la loi du 5 juillet 1985(2).

3° FONDS DE GARANTIE - Condamnation - Condamnation au paiement de l'indemnité allouée à la victime ou à ses ayants droit - Intervention (non).

3° FONDS DE GARANTIE - Intervention - Effets - Décision opposable - Condamnation (non).

3° En aucun cas, l'intervention du Fonds de garantie ne peut entraîner sa condamnation(3).

4° JUGEMENTS ET ARRETS - Interprétation ou rectification - Pouvoirs des juges - Limites.

4° JUGEMENTS ET ARRETS - Interprétation ou rectification - Cas - Erreur purement matérielle - Définition.

4° Si, en application de l'article 710 du Code de procédure pénale, les juridictions de jugement peuvent interpréter leurs décisions lorsque des difficultés s'élèvent sur le sens de celles-ci, il leur est interdit d'en restreindre ou d'en étendre les dispositions et de modifier ainsi la chose jugée. Encourt, dès lors, la cassation l'arrêt qui, sous le couvert de l'interprétation d'une précédente décision, règle un différend opposant un tiers payeur et le Fonds de garantie quant à la répartition entre les tiers payeurs de sommes dues par l'assureur du responsable de l'accident(4).


Références :

1° :
2° :
2° :
Code de procédure pénale 388-3
Code de procédure pénale 710
Code des assurances L421-1, R421-1 4° :
Loi 85-677 du 05 juillet 1985 art. 29 al4

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 janvier 1993

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1989-10-11, Bulletin criminel 1989, n° 347, p. 841 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1994-10-05, Bulletin criminel 1994, n° 317, p. 775 (cassation partielle sans renvoi). CONFER : (3°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1991-04-18, Bulletin criminel 1991, n° 185, p. 481 (cassation partielle) ;

A comparer : Chambre criminelle, 1988-11-08, Bulletin criminel 1988, n° 378, p. 1001 (rejet). CONFER : (4°). (4) Cf. Chambre criminelle, 1978-05-09, Bulletin criminel 1978, n° 144, p. 366 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1983-05-18, Bulletin criminel 1983, n° 135, p. 326 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1984-06-26, Bulletin criminel 1984, n° 242, p. 645 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1989-12-05, Bulletin criminel 1989, n° 464, p. 1134 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 oct. 1994, pourvoi n°93-82700, Bull. crim. criminel 1994 N° 316 p. 770
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1994 N° 316 p. 770

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Souppe, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Perfetti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Blin.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Coutard et Mayer.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:93.82700
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