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28/06/1994 | FRANCE | N°92-13135

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 juin 1994, 92-13135


Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 février 1992) , qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Technique et Lumière par un jugement du 26 février 1987, la société L'Union métallurgique de la Haute-Seine (l'Union métallurgique), intéressée par la reprise de la société débitrice dans le cadre d'un plan de redressement, a adressé, le 24 septembre 1987, à l'administrateur de la procédure collective une offre de plan de continuation par voie de reprise interne, en proposant l'acquisition de toutes les p

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Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 février 1992) , qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Technique et Lumière par un jugement du 26 février 1987, la société L'Union métallurgique de la Haute-Seine (l'Union métallurgique), intéressée par la reprise de la société débitrice dans le cadre d'un plan de redressement, a adressé, le 24 septembre 1987, à l'administrateur de la procédure collective une offre de plan de continuation par voie de reprise interne, en proposant l'acquisition de toutes les parts de la société Technique et Lumière pour 1 franc et l'apurement du passif suivant certaines modalités ; que le plan de continuation ainsi proposé a été adopté par jugement du 3 décembre 1987 ; que, par lettre du 8 février 1988, l'Union métallurgique a fait connaître à l'administrateur qu'elle ne pouvait plus envisager de reprendre l'entreprise, aux motifs que le déficit d'exploitation postérieur à l'ouverture du redressement judiciaire s'était révélé trop important, et que le passif antérieur au jugement dépassait ce qu'elle avait cru au vu de la situation comptable qui lui avait été remise au cours de la préparation du plan ; que le Tribunal a alors prononcé la résolution du plan de continuation et la liquidation judiciaire de la société Technique et Lumière ; que le liquidateur de la procédure collective a assigné l'Union métallurgique en paiement de dommages-intérêts au profit des créanciers antérieurs et postérieurs à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, tandis que l'Union métallurgique a demandé que la cession des parts sociales soit déclarée nulle pour erreur ;

Attendu que l'Union métallurgique reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'annulation de la cession des parts sociales, et accueilli partiellement la demande du liquidateur alors, selon le pourvoi, d'une part, que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, le liquidateur n'avait pas soutenu dans ses écritures que la cession des parts sociales présentait un caractère aléatoire ; que dès lors, en soulevant d'office, pour écarter la nullité de la cession consentie dans l'ignorance du passif ultérieurement découvert, le caractère aléatoire de ladite cession, sans provoquer les explications préalables des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que les personnes tenues d'exécuter le plan ne peuvent se voir imposer des charges autres que les engagements qu'elles ont souscrits au cours de sa préparation ; que dès lors un engagement différent de celui souscrit par le repreneur au cours de la préparation du plan, ne saurait résulter du fait qu'il était cessionnaire de la totalité des parts sociales pour 1 franc de la société en redressement judiciaire ; que l'absence de vérification du passif antérieur par le Tribunal qui arrête le plan et l'évolution du passif postérieur né de la poursuite de l'activité n'impliquent pas que le repreneur soit tenu d'exécuter un engagement qu'il n'a pas souscrit au cours de la préparation du plan ; qu'en l'espèce, l'Union métallurgique s'était engagée, en contrepartie de la cession de la totalité des parts sociales de la société Technique et Lumière, à apurer son passif antérieur déclaré par l'administrateur au cours de la préparation du plan ; que dès lors en estimant que la cession des parts sociales, distincte du plan de continuation, consentie pour 1 franc était la contrepartie de l'obligation d'assumer la totalité du passif avec l'aléa que comporte la détermination de son montant, la cour d'appel qui a déduit une faute de l'inexécution d'une obligation que l'Union métallurgique, repreneur, n'avait pas souscrite, a violé par refus d'application les articles 1134 du Code civil, 62 de la loi du 25 janvier 1985 et 1147 du Code civil ; et alors, enfin, que le simple fait de présenter une offre de reprise d'une entreprise n'est pas à l'origine du passif né au cours de la période d'observation ; que seule une faute de gestion aurait pu permettre à la cour d'appel de condamner le repreneur à indemniser les créanciers postérieurs au redressement judiciaire qui n'étaient pas soumis au plan de continuation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'ayant offert de reprendre la société Technique et Lumière, l'Union métallurgique était intervenue avant le jugement homologuant le plan de continuation à la demande de l'administrateur, pour apporter sa caution et négocier avec les fournisseurs des délais de paiement, et que la gestion de l'entreprise lui avait été confiée après le jugement arrêtant le plan dans l'attente de la régularisation des différents actes ; qu'en s'abstenant ainsi de caractériser la faute de gestion qu'aurait commise l'Union métallurgique, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'en retenant, pour écarter l'erreur invoquée par l'Union métallurgique, que cette erreur aurait porté sur la valeur des parts sociales cédées et, au surplus, que celle-ci avait été fixée au franc symbolique, parce que le cessionnaire devait prendre en charge le passif social antérieur avec l'aléa que comportait sa détermination, dès lors que le plan de redressement peut être arrêté sans attendre la vérification des créances, la cour d'appel, sans méconnaître le principe de la contradiction, n'a fait que trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui étaient applicables ;

Attendu, d'autre part, que l'Union métallurgique, qui s'est bornée à prétendre, dans ses conclusions, que sa proposition d'apurement du passif antérieur avait été présentée en considération d'un certain montant de celui-ci, n'a pas souscrit l'engagement, au sens de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, de ne payer, dans une certaine proportion, que le seul passif indiqué par l'administrateur de la procédure collective ;

Attendu, enfin, que l'arrêt relève que l'Union métallurgique, qui avait fait connaître, dès la déclaration de cessation des paiements, son intention de présenter une offre, n'a fait parvenir ses premières propositions de redressement qu'en septembre 1987, que la poursuite de l'activité pendant 10 mois n'a eu lieu que pour permettre à l'Union métallurgique de mener à bien son projet, que, pendant la période d'observation, elle a cautionné la société débitrice auprès de ses fournisseurs avec lesquels elle a négocié des délais de paiement et que, sans son intervention, il aurait été mis rapidement fin à la période d'observation pour éviter la création d'un passif soumis aux dispositions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu décider que l'Union métallurgique, en refusant de poursuivre l'exécution du plan, avait commis une faute engageant sa responsabilité envers les créanciers dont les créances sont nées après le jugement d'ouverture " qui pouvaient légitimement compter sur le paiement intégral de celles-ci par la société Technique et Lumière restructurée " ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 92-13135
Date de la décision : 28/06/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Plan de cession - Jugement l'arrêtant - Jugement rendu sans attendre la vérification des créances.

1° CONTRATS ET OBLIGATIONS - Consentement - Erreur - Erreur sur la valeur.

1° Une personne qui s'était proposée d'acquérir, pour 1 franc, toutes les parts d'une société en redressement judiciaire et d'apurer son passif suivant certaines modalités, ayant demandé l'annulation de la cession des parts pour erreur, tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables la cour d'appel qui retient, pour rejeter la demande, que cette erreur aurait porté sur la valeur des parts sociales cédées et, au surplus, que celle-ci avait été fixée au franc symbolique parce que le cessionnaire devait prendre en charge le passif social antérieur avec l'aléa que comportait sa détermination, dès lors que le plan de redressement peut être arrêté sans attendre la vérification des créances.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Plan de cession - Obligations souscrites par le cessionnaire - Engagement de payer le passif en considération d'un certain montant - Portée.

2° Le cessionnaire qui, dans le cadre d'un plan de cession d'une entreprise en redressement judiciaire, se borne à soutenir que sa proposition d'apurement du passif antérieur avait été présentée en considération d'un certain montant de celui-ci, ne souscrit pas l'engagement, au sens de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, de ne payer que le seul passif ainsi pris en considération.

3° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Plan de redressement - Plan de cession - Cessionnaire refusant de poursuivre l'exécution du plan - Faute - Responsabilité.

3° Ayant relevé que le cessionnaire, qui avait fait connaître, dès la déclaration de cessation des paiements, son intention de présenter une offre de redressement n'a fait parvenir ses premières propositions que 10 mois après la mise en redressement judiciaire, que la poursuite de l'activité pendant ce temps n'a eu lieu que pour lui permettre de mener à bien son projet, que, pendant la période d'observation, il a cautionné la société débitrice auprès de ses fournisseurs, avec lesquels il a négocié des délais de paiement et que, sans son intervention, il aurait été mis rapidement fin à la période d'observation pour éviter la création d'un passif soumis aux dispositions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, une cour d'appel, en l'état de ces constatations et appréciations, a pu décider que le cessionnaire, en refusant de poursuivre l'exécution du plan, avait commis une faute engageant sa responsabilité envers les créanciers dont les créances sont nées après le jugement d'ouverture " qui pouvaient légitimement compter sur le paiement intégral de celles-ci par la société débitrice restructurée ".


Références :

Loi 85-1387 du 25 janvier 1985 art. 40, art. 62

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 février 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 jui. 1994, pourvoi n°92-13135, Bull. civ. 1994 IV N° 243 p. 190
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 243 p. 190

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Curti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Rémery.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Delaporte et Briard, M. Barbey.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.13135
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