Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 27 mai 1992), que M. Philippe de A..., locataire d'un domaine rural appartenant à Mme Y..., épouse X..., l'a mis à la disposition de la société civile d'exploitation agricole Dezed (SCEA) qu'il a constituée, en 1980, avec ses parents, les époux Georges de A... ; qu'en 1985, un nouvel associé est entré dans la société en la personne de M. Xavier de A... avec une augmentation consécutive de capital et, qu'en 1987, les époux Georges de A..., désireux de prendre leur retraite, ont cédé l'essentiel de leurs parts à la société, entraînant une réduction sensible du capital social ; que ces changements ne lui ayant pas été notifiés, Mme X... a sollicité la résiliation du bail, en application de l'article L. 411-37 du Code rural ;
Attendu que M. Philippe de A... et la SCEA Dezed font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, 1° que la résiliation du bail rural, dont tout ou partie des biens dont le preneur est locataire a été mis à la disposition d'une société civile d'exploitation agricole, n'est encourue que si le défaut d'information du bailleur de certains changements survenus au cours de la vie sociale a été de nature à induire le bailleur en erreur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a prononcé la résiliation du bail sans constater le moindre fait matériel propre à caractériser la nature de l'erreur dans laquelle Mme Z... aurait pu être induite du fait des omissions qu'elle reprochait à M. Philippe de A..., n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-37 du Code rural ; 2° qu'après avoir constaté que M. Philippe de A..., fermier des terres appartenant à Mme Z..., les avait mises à la disposition de la SCEA Dezed qu'il avait constituée, en 1980, avec ses parents, M. et Mme de A..., la cour d'appel devait rechercher si l'entrée de son frère, M. Xavier de A..., et le départ de ses parents avaient pu induire la bailleresse en erreur sur sa volonté de poursuivre personnellement l'exploitation ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, elle n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-37 du Code rural ; 3° qu'après avoir constaté, d'une part, que le conflit entre M. Philippe de A... et Mme Z... était né en 1988 en raison d'un désaccord sur la valeur des terres litigieuses, d'autre part, que le départ de M. et Mme de Zutter-Caillot et l'arrivée de M. Xavier de A... étaient intervenus en 1985 et en 1987, enfin les liens de parenté entre Mme Z... et les membres de la SCEA Dezed, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître la portée légale de ses constatations, se fonder sur l'ancienneté du conflit entre Mme Z... et M. Philippe de A... pour se refuser à tenir pour acquise par Mme Z... la connaissance des changements survenus au sein de la SCEA Dezed ; qu'en fondant sa décision sur cette ancienneté, la cour d'appel a violé l'article L. 411-37 du Code rural ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les relations conflictuelles anciennes entretenues entre le preneur et la bailleresse excluaient qu'on puisse tenir pour acquise la connaissance par celle-ci des changements intervenus dans la société, la cour d'appel a légalement justifié sa décision en retenant souverainement que les transferts insidieux de parts sociales avaient, par leur répétition et leur ampleur, porté atteinte aux droits de la bailleresse et devaient s'analyser en un comportement de nature à induire cette dernière en erreur ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.